L’Orchestre de la Radio de Francfort ouvre le festival pour trois concerts sous la direction de son chef permanent Alain Altinoglu. Le troisième d’entre eux fait la part belle à Brahms, avec des Variations Haydn plutôt ludiques et dégagées de leur gangue germanique au profit d’un classicisme privilégiant la clarté.

Le trompettiste soliste Sebastian Berner livre ensuite une lecture spectaculaire du bref Concerto pour trompette en mib de Haydn où l’auteur se délecte des possibilités des tout nouveaux pistons. Vainqueur du dernier Concours Maurice André, Berner possède une virtuosité impressionnante mais peut aussi se transformer en chanteur dans l’Andante. Acclamation d’une salle chauffée à blanc non seulement par la température, mais aussi par cette prestation.

Après l’entracte, la Symphonie n° 3 – la plus piégeuse – est électrisée par une baguette qui joint précision, souplesse et engagement dans des tempi plutôt rapides. L’osmose entretenue par Altinoglu avec les musiciens allemands fait plaisir à voir, chacun donnant le meilleur de lui-même, en particulier les cors et les vents stimulés par l’enjeu. La Danse hongroise n° 5 en bis participe pour conclure de cette fête musicale partagée.

Le lendemain matin, précédant la pluie, le Colmar Symphonic Mob© est un moment particulièrement attendu qui met en synergie musiciens de l’Orchestre national de Mulhouse, instrumentistes et choristes amateurs dans les partitions les plus connues de la musique classique. En véritable Monsieur Loyal, Alain Altinoglu présente et dirige en plein air un ensemble formé d’une foule de participants. Un moment populaire très apprécié dans le Parc du Champ de Mars, sonorisé pour l’occasion.

Le soir, dans l’église Saint-Matthieu, Bertrand Chamayou, sous les voûtes gothiques, en ravélien devant l’Éternel, s’attaque à une quasi-intégrale de l’œuvre pour piano du compositeur français. Au-delà de sa prestation marathonienne, le soliste alterne moments de fluidité pure (Jeux d’eau), virtuosité aiguisée (Scarbo de Gaspard de la nuit), sensibilité à fleur de peau (Pavane pour une infante défunte), couleurs et timbres supérieurement distillés (Miroirs), charme (Sonatine), raffinement (Le Tombeau de Couperin) avec une élégance, un style où tout paraît d’une justesse et d’un équilibre parfaits.

Le 7 juillet à l’heure du déjeuner, dans le cadre du cycle consacré aux Jeunes Talents, la pianiste Ayano Kamei propose un récital qui met bien en valeur son aptitude à appréhender les partitions les plus complexes. Cette musicienne, après un cursus au Japon, s’est formée au Conservatoire de Paris auprès de Marie-Josèphe Jude, Jean-Frédéric Neuberger, et Erika Guiomar en direction de chant.

Dès le Concerto italien de Bach, sa maîtrise digitale sans faille comme l’organisation de son jeu attirent l’intérêt, puis les Danzas argentinas de Ginastera, très contrastées, sont exécutées de manière tonique. On pourra trouver les Scènes d’enfants de Schumann un peu morcelées et distanciées, mais les pages de Ravel convainquent à l’image des rares Trois beaux oiseaux du paradis transcrits pour clavier en 1914 et la redoutable Valse jouée avec tout le rebond exigé. Une artiste à suivre.




Église Saint-Matthieu, Parc du Champ de Mars, Koïfhus, Colmar, les 05, 06 et 07/07/2025.