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CHRONIQUES
22 décembre 2024

Commentaire radio :
Ouverture de Bayreuth 2011

© Yannick MILLON

Pâle tournoi de chanteurs que celui convoqué pour ce nouveau Tannhäuser, seule production inédite d’une édition 2011 sans Ring et qui inaugure le 100e festival de Bayreuth avec bien peu de faste. Seule originalité sur le papier, la direction du baroqueux Thomas Hengelbrock se glisse sagement dans la tradition, à la tête d’un plateau bien maigre.
 

Le 25/07/2011
Yannick MILLON
 



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  • Tannhäuser
    Diffusion en direct le 25/07/2011 sur Bayern 4 Klassik


    Outre la mise en scène de Sebastian Baumgarten, le nouveau Tannhäuser de Bayreuth faisait a priori acte de modernité en la baguette de Thomas Hengelbrock, chef parmi les plus actifs de la vague baroque, dont les Mozart dynamités ne laissent jamais indifférent. On s’attendait donc à voir nos repères wagnériens voler en éclat au contact d’une véritable relecture aux antipodes de la tradition.

    Las, l’abîme mystique a inspiré au trublion une direction charpentée, solennelle, aux masses généreuses, aux cuivres amples et bien ronds. N’était une réelle chasse à l’appesantissement dans les ariosos et les ensembles, une tendance caractéristique à constamment relancer le tempo, jamais on ne devinerait la présence d’un baroqueux au pupitre.

    Mieux encore, sans doute par peur des échos de bruits de botte que peut évoquer cette page sous des baguettes plus militaires, le chef allemand arrondit par trop les angles dans une Entrée des convives molle et sans relief, et s’essouffle dans la lenteur de la partie centrale du duo Elisabeth-Tannhäuser, de la même manière que le chœur final, qui donne si souvent le frisson, semble paralysé par la retenue.

    Le gain d’une certaine transparence dans les vents s’obtient sans grande modification de la pâte sonore habituelle, ici jamais sèche, phrasant juste un brin plus court que d’ordinaire, mais sans provoquer la révolution attendue qui aurait fait entrer l’œuvre dans une ère musicale nouvelle digne de l’Atelier Bayreuth voulu par le créateur des lieux.

    Reste une exécution de belle qualité, tout à fait convenable mais ne parvenant pas à enflammer un bien piètre plateau. Après ses Salomé bien projetées mais quelque peu impersonnelles, Camilla Nylund est une simple Elisabeth à voix, vibrant trop large, dénuée de toute virginalité et chantant bas dès que la nuance approche le piano. Plutôt fruste et nasal, Lars Claveman est un honnête Tannhäuser, guère poète ou aristocrate, surtout fort d’un troisième registre vigoureux et d’une belle endurance.

    Le sens de la phrase, de la ligne, d’une vocalité châtiée, ne fait à aucun moment défaut au Wolfram musical de Michael Nagy, dont seul l’instrument, plutôt pâle et sans réelle beauté du timbre, amoindrit la prestation, l’inverse en somme du roi Hermann de Günther Groissböck, en bonne voix mais gêné aux extrémités de la tessiture et plutôt placide.

    Si les chanteurs précités ne s’aventurent jamais hors de la dignité, on ne peut pas en dire autant de la Vénus de Stephanie Friede, qui frôle l’abomination en donnant l’impression de chanter – mal – la Comtesse de la Dame de Pique, avec un matériel tout à fait inacceptable.

    D’aucuns évoquent déjà l’adéquation entre cette voix impossible et le propos du metteur en scène. Il faudrait toutefois arrêter de se moquer du monde en acceptant tout et n’importe quoi aux dépens d’une partition qui exige un minimum de tenue en termes de ligne vocale, de déclamation et de valeurs rythmiques, pour ne rien dire du personnage, cantonné sans la scène à une sorcière hystérique de livre-disque pour enfants. Comment dès lors en vouloir aux spectateurs, dont certains ont attendu dix ans une place, qui lui manifestent un accueil ouvertement hostile aux saluts ?

    Avec le passage de flambeau de Wolfgang Wagner à ses deux filles, on espérait ne plus entendre pareil désastre à Bayreuth, qui ne redore vraiment pas le blason d’une institution aujourd’hui largement dépassée en termes de distributions wagnériennes – Berlin, Munich, Paris, Londres, Milan : Wagner semble aujourd’hui chanté partout mieux qu’à Bayreuth…




    Le 25/07/2011
    Yannick MILLON



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