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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert de l'Orchestre de Paris dirigé par Ivan Fischer avec la pianiste Hélène Grimaud.
La belle Hélène
s'Ă©gare dans la bataille
Pour sa seconde série de concerts parisiens d'avril avec l'Orchestre de Paris, Hélène Grimaud avait choisi le Concerto de Schumann. Indisposée pour le premier soir, elle n'a pas semblé au mieux de sa forme pour le second, tant et si bien qu'Ivan Fischer lui a ravi la vedette avec une surpuissante 9e Symphonie de Bruckner.
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Archétype du concerto romantique où le héros armé de son seul piano doit braver un régiment d'archets acérés et de vents puissants (1), le chef-d'oeuvre de Schumann n'est pas avare de pièges. La perte de la continuité narrative n'est pas le moins classique : on voudrait conter une geste, la conquête d'horizons vierges et on se retrouve égaré sur un chemin de traverse. Malgré ses mains d'héroïne et une rutilante armure pianistique, Hélène Grimaud y a versé sa fougue et son naturel pianistique indéniable.
Début avril, Christophe Eschenbach à la tête de ses troupes parisiennes corsetaient la vaillante musicienne dans un étau de cordes inflexibles. À la tête du même bataillon, Ivan Fischer fait cette fois son possible pour épouser les desseins sinueux de la belle Hélène. Un jeu auquel il ne sera que rarement victorieux.
Et pourtant, Hélène Grimaud est haletante, au sens littéral et non métaphorique : elle aspire bruyamment de longues goulées d'air comme si elle accomplissait un effort surhumain (2). La sincérité et l'ardeur indéniables de la pianiste n'en contredisent pas moins un plan de bataille qui semblait mal étayé. À trop élargir et distendre la pulsation, le premier mouvement n'indique plus de direction lisible, le second trop lâche paraît déboussolé, le dernier résolument désordonné perd une impulsion épique normalement irrésistible.
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Conclusion pour ce mois d'avril parisien d'Hélène Grimaud : on retiendra un Quintette pour piano et cordes de Schumann à la Cité de la Musique (qu'Arte a eu la bonne idée de mettre en boite) et un dernier enregistrement Rachmaninov de la plus belle fibre romantique (Teldec).
Pour la deuxième partie du concert, c'est aux éléments déchaînés de la Neuvième Symphonie de Bruckner qu'Ivan Fischer doit livrer bataille. Dans cette partition océanique, le problème n'est pas d'avoir pied mais de nager en espérant survivre à la tempête. Mission plutôt réussie, Fischer adopte une conduite souple qui épouse les vagues mais ne perd jamais le nord.
Son journal de bord est riche en péripéties dramatiques et l'histoire est naturellement saisissante. Peut-être même un peu trop riche, car l'un des défauts du chef réside dans une échelle dynamique pas assez étagée, qui gagnerait en "suspens" narratif avec plus de teintes intermédiaires. À mons sens, un même mouvement ne devrait avoir qu'un climax et un seul, même si d'autres épisodes peuvent approcher et préparer son intensité.
À cette nuance près, cette Neuvième méritait largement le périple et démontre qu'Ivan Fischer comme l'Orchestre de Paris savent se tenir par gros temps.
(1) Du moins dans une conception moderne de l'orchestre qui n'est pas juste historiquement
(2) Il faut remarquer qu'elle Ă©tait malade le 18 avril, il est donc ici question de sa prestation du 19.
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Salle Pleyel, Paris Le 19/04/2001 Eric SEBBAG |
| Concert de l'Orchestre de Paris dirigé par Ivan Fischer avec la pianiste Hélène Grimaud. | Robert Schumann : Concerto pour piano en la mineur Op.54
Anton Bruckner : Symphonie n°9 en ré mineur
Orchestre de Paris,
Direction : Ivan Fischer
Hélène Grimaud (piano)
(concerts des 18 et 19 avril 2001) | |
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