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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 octobre 2024 |
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Reprise du Faust de Gounod dans la mise en scène de Jorge Lavelli à l'Opéra Bastille de Paris.
Faust auréolé de scandales
De mémoire de mélomane, la première de cette production du Faust de Gounod, le 3 juin 1975, provoqua l'un des plus bruyants scandales jamais entendus au Palais Garnier. Jorge Lavelli s'attaquait à un pilier du répertoire, et son dépoussiérage ne passait pas inaperçu. Vingt-six ans plus tard, l'entreprise n'a rien perdu de sa force.
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En 1975, Jorge Lavelli était fort connu comme homme de théâtre mais il avait peu fréquenté le répertoire lyrique traditionnel. Son Faust chamboula bien des conventions. C'en était fini du Moyen âge de carton-pâte, de Marguerite et de son rouet. Max Bignens avait imaginé un décor rappelant les pavillons de Baltard, tout de fer et de verre, et l'action du mélodrame sentimental imaginé par Jules Barbier et Michel Carré d'après un épisode du Faust de Goethe se déroulait dans la société bourgeoise de la fin du XIXe siècle, pétrie de préjugés et quelque peu hypocrite.
Double maléfique de Faust, Méphisto orchestrait les amours du docteur avec une Marguerite que son rêve ne pouvait mener qu'à la folie et à la mort. Il ne fallut pas longtemps, heureusement, pour que ce spectacle fasse son chemin, que les applaudissements succèdent aux huées, et que ce Faust, au fil des reprises, devienne un classique.
Au rideau final de cette nouvelle série, Lavelli, souriant, devait rire dans la barbe qu'il n'a pas en pensant aux sarcasmes dont il avait, jadis, été l'objet. Car son spectacle a merveilleusement vieilli, s'est adapté sans aucun mal au plateau de Bastille, sur lequel il est entré en 1992, et paraît, aujourd'hui, plus jeune que jamais.
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Pas une de ses images qui ne trouve immédiatement sa justification ; pas une, non plus, qui ait perdu une once de sa force et de sa beauté, de la kermesse, dominée par sa grande roue, à Marguerite priant dans l'église, cernée par une horde de Méphistos, ou, dans la scène finale, rasée, engoncée dans une camisole de force, s'effondrant dans les bras de Faust retrouvé.
Personne, aujourd'hui, ne hurle plus devant le jardin et ses draps étendus, labyrinthe dans lequel vont se perdre les amants, ou face aux soldats revenant de guerre éclopés tandis qu'éclatent les accents martiaux et pompiers du " Gloire immortelle de nos aïeux ".
Il faut, pour une telle mise en scène, des acteurs crédibles. Soile Isokoski est une Marguerite au timbre de miel, Marcello Giordani un Faust hyper lyrique, Russell Braun un Valentin autoritaire, et Martine Mahé une dame Marthe pittoresque. Seul Ferrucio Furlanetto détonne, à tous les sens du terme, médiocre chanteur, cabotinant à l'extrême. Quant à Maurizio Benini, énergique et dynamique, il insuffle à cette partition si française dans son élégante retenue un petit air d'Italie qui n'est pas sans charme.
C'est ainsi qu'en 1975 une page de l'histoire de la mise en scène se tournait et qu'un nouveau public commençait à revenir vers un genre musical qu'on avait cru désuet. Vingt-six ans plus tard, la leçon de Lavelli conserve sa pertinence.
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Opéra Bastille, Paris Le 11/05/2001 Michel PAROUTY |
| Reprise du Faust de Gounod dans la mise en scène de Jorge Lavelli à l'Opéra Bastille de Paris. | Faust de Charles Gounod
Orchestre de l'Opéra de Paris
Direction musicale : Maurizio Benini.
Mise en scène : Jorge Lavelli.
Avec Marcello Giordani (Faust), Soile Isokoski (Marguerite), Ferruccio Furlanetto (Méphistophélès), Russell Braun (Valentin), Kristine Jepson (Siebel), Nicolas Testé (Wagner), Martine Mahé (Dame Marthe). | |
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