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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert du Quatuor Johannes au cinquième festival d'été de Bordeaux.
Le sang viennois des Johannes
En France, les concours de quatuors à cordes se multiplient et révèlent des gisements de talents nouveaux. Lauréat en 1999 du premier Concours International de Bordeaux, le jeune Quatuor Johannes est de cette veine. Se produisant cet été dans la même capitale d'Aquitaine, il démontrait une affinité remarquable avec l'esprit viennois.
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On a trop souvent opposé le Schubert adolescent des quatuors et symphonies au compositeur adulte, c'est pourquoi il faut remercier d'emblée le Quatuor Johannes d'avoir écarté le cliché d'une maturité sans prémices en choisissant deux ouvrages séparés de dix années, à l'étonnante parenté de structure, sinon de tonalité et d'ampleur.
Le ré mineur du célébrissime quatuor la jeune fille et la mort est traversé de macabres sarcasmes que seule une lecture rigoureuse de la partition révèle. L'archet exact du violoncelliste et maître d'oeuvre, Jean-Sébastien Barbey y trouve son chemin sans faille.
Ici, les Johannes tournent délibérément le dos à toute " germanité " appuyée au profit d'une réelle souplesse rythmique mêlée d'un respect scrupuleux de toutes les nuances dynamiques (le retour au thème principal après l'ultime digression du II) ; leur virtuosité sans outrance les rend capables du plus grand moelleux (variation 2 du II encore, avec un alto olympien, trio du III, sans omettre le développement du I), comme du plus méchant coup de fouet (coda du IV).
Et cette versatilité n'est pas coquetterie mais nécessité organique : au pathétique de surgir s'il y a lieu de l'ambivalence tonale ou rythmique d'une ligne fermement tenue (fut-elle dansante), et non l'inverse. Avec les Johannes, l'équivoque entre le divertissement et l'anxiété, si récurrente chez Schubert, retrouve logiquement sa seule nationalité : viennoise.
Dans le clair ré majeur du quatuor D 94, ils poursuivent la démonstration en donnant à entendre bien plus qu'une vague incertitude au sein d'une pièce gracieuse et concise ; comme une de ces journées radieuses d'été où le ciel se plombe en quelques minutes.
Pour qui aurait oublié le tribut que le compositeur paya à Haydn – autre Viennois en sa vieillesse -, les complices d'archets viennent reverser en bis un peu de leur miel corsé dans deux admirables extraits (opus 76 et 64) empruntés au génial inventeur du quatuor à cordes. Un concentré d'archets radieux, cette fois sans nuages à l'horizon.
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Festival d'été de, Bordeaux Le 17/07/2001 Jacques DUFFOURG |
| Concert du Quatuor Johannes au cinquième festival d'été de Bordeaux. | Schubert : Quatuors en ré majeur n° 7, D 94 ; en ré mineur n° 14,
D 810, " la jeune fille et la mort ".
Quatuor Johannes : Frédéric Angleraux et Jérôme Meunier, violons ;
Nicolas Mouret, alto ; Jean-Sébastien Barbey, violoncelle.
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