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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 décembre 2024 |
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Récital du pianiste Andrea Lucchesini au Cloître des Jacobins dans le cadre du festival " Piano aux jacobins " de Toulouse.
Sonates à double sens
L'édition 2001 du festival " Piano aux Jacobins " de Toulouse n'hésite plus à insérer dans sa programmation des oeuvres contemporaines. Jeudi 13 septembre dernier, Andrea Lucchesini, un pianiste italien encore mal connu de ce côté des Alpes, proposait un programme audacieux confrontant Berio à Beethoven.
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Cette année aux Jacobins, deux concerts complets étaient consacrés à la musique du XXe siècle : le 12 septembre, l'ensemble belge Ictus présentait des oeuvres de Harvey, Francesconi, Alvarez, Campion, Mantovani et la très belle pièce " Metallics " de Yan Maresz.
Deux jours plus tard, c'était le pianiste américain Jay Gottlieb dans un programme rassemblant un kaléidoscope d'oeuvres dont une rareté, les " Etudes de jazz " d'Edwin Schulhoff, compositeur victime du nazisme, une création mondiale de Yan Maersz, commande du festival, et un classique du XXe siècle, une des Etudes d'Ohana.
Le 13 septembre, un italien de 38 ans, Andrea Lucchesini proposait un programme rapprochant deux sonates de Beethoven et la Sonate de Luciano Berio, un parcours tout droit inspiré par son illustre compatriote, Maurizio Pollini, qui, pionnier du genre depuis de nombreuses années, n'hésite pas à dresser des passerelles entre Stockhausen et Beethoven.
Virtuose à la silhouette flamboyante, Lucchesini est injustement méconnu en France où il ne fait qu'une carrière épisodique. Son toucher est puissant, sa technique hors du commun, sa musicalité en fait un artiste plus proche de Beethoven que de Schubert dont il donnait en bis un impromptu sans grâce (il était épuisé, mais ne le montrait pas), après une Hammerklavier pleine d'intelligence formelle.
Lucchesini est un spécialiste de l'oeuvre de Luciano Berio dont il a créé et enregistré le concerto pour piano Echoing curves en 1995. Il a créé en juillet dernier la Sonate de ce compositeur au Festival de Zurich, et c'est sa première audition en France.
Berio a écrit plusieurs partitions pour piano solo avant cette oeuvre dont la fameuse Sequenza IV où le compositeur explore les capacités expressives de la " pédale harmonique ", ou troisième pédale, qui permet de sélectionner des notes afin d'en conserver la résonance pendant que d'autres sont jouées sans pédale.
Dans cette nouvelle partition, Berio explore le double sens du mot sonate : " faire sonner " et forme-sonate. Dans le premier sens, il organise son langage autour de " notes pivot " répétées de toutes les manières possibles. Il explore les résonances au moyen de grappes de sons qui parcourent l'étendue du piano.
Dans le second sens, il caractérise plusieurs moments enchaînés, quatre semble-t-il. D'abord une exposition de ces " notes-pivot ", puis un passage rhapsodique où le discours se resserre, puis un temps d'arrêt avec changement de pôle d'attraction, et une récapitulation. On retrouve ici, en plus aboutis, les principaux idiomes pianistiques que Berio avait présentés dans le contexte de sa " Sequenza IV ".
Au total, un concert au programme passionnant, servi par un artiste qui gagnerait à accepter sa séduction naturelle.
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Festival Piano aux jacobins, Toulouse Le 13/09/2001 Olivier BERNAGER |
| Récital du pianiste Andrea Lucchesini au Cloître des Jacobins dans le cadre du festival " Piano aux jacobins " de Toulouse. | Beethoven : Sonate n° 1, opus 2 N°1, en fa mineur
Berio : Sonate (2001)
Beethoven : Sonate n° 26, opus 106 en si bémol majeur " Hammerklavier ". | |
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