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CRITIQUES DE CONCERTS 21 décembre 2024

Concert de l'orchestre de Paris dirigé par Christoph Eschenbach avec le pianiste
Nikolaï Lugansky.


Un jeune homme trop sage
© Xavier Lambours

Nikolaï Lugansky

Pour son second concert de la rentrée avec l'Orchestre de Paris dont il est l'actuel directeur musical, Christoph Eschenbach avait programmé deux symphonies de Schumann et un concerto de Mozart. Ce dernier était l'occasion de découvrir le jeune pianiste Nikolaï Lugansky loin de Chopin ou de Rachmaninov. Une acclimatation difficile.
 

Salle Pleyel, Paris
Le 11/10/2001
Françoise MALETTRA
 



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  • Après un ordre d'évacuation " pour des raisons techniques ! ", immédiatement suivi d'effet, et qui vida la salle Pleyel au beau milieu de la première symphonie de Schumann, la musique reprenait ses droits vingt minutes plus tard, avec, de la part du public, une volonté presque palpable de banaliser l'incident : une réponse qui ne manquait pas d'allure.

    Il a semblé que l'orchestre, lui aussi, enchaînait avec une énergie réaffirmée : les cuivres, qui sonnaient haut et fort l'éclosion du printemps, allaient ,d'entrée de jeu, donner son élan et sa générosité sonore à toute la partition.

    On peut ne pas être entièrement d'accord avec une interprétation qui accentue délibérément ses tempi abrupts, ses couleurs franches, ses accélérations dans les mouvements lents, si l'on oublie que cette prime symphonie est l'oeuvre d'un musicien de 30 ans qui aborde enfin l'orchestre dans un des rares bonheurs qu'il connaîtra après son mariage tant espéré avec Clara Wieck, qui le vit intensément, et qui le dit.

    La seconde symphonie, composée trois ans plus tard, et qui, refondue, deviendra en 1851 la quatrième, est d'une toute autre nature. Elle porte déjà les signes de l'angoisse et des crises annonciatrices qui conduiront Schumann à la lente dégradation de la personnalité et à la démence : " Je peux bien dire, " écrit Schumann, " que c'est la résistance de l'esprit qui est ici manifeste, et que j'ai cherché à lutter contre mon état ".

    Christoph Eschenbach a donné un sens extrême au combat qui s'engage entre l'ombre et la lumière : martèlement des thèmes, exubérance des développements, brusquement assombrie par des pensées funèbres, celles-ci à leur tour conjurées par l'exaltation retrouvée de toutes les voix de l'orchestre.

    Visiblement, une telle vision ne peut donner toute sa mesure dans l'acoustique si sèche de Pleyel. Vivement l'installation de l'orchestre au théâtre Mogador, dont on nous promet des merveilles


    Entre les deux symphonies, à la juste place du concerto, on attendait " le " Mozart de Nikolaï Lugansky. Le pianiste russe est un jeune homme aux doigts d'or, un jeune homme sage, beaucoup trop sage. Il joue Mozart à la lettre, dans un esprit terriblement scientifique, à tel point qu'il en semble virtuel, un peu comme s'il proposait de contempler une collection de perles rares, parfaitement calibrées, mais que nul n'aurait envie de toucher, et encore moins de caresser.

    Dans le sublime andante, le chant ne s'élève jamais. Lugansky ne se permet pas le moindre rubato, le moindre son suspendu qui permettrait de respirer avec lui. Ce soir-là, ce fut donc dommage pour le piano et tant mieux pour l'orchestre.




    Salle Pleyel, Paris
    Le 11/10/2001
    Françoise MALETTRA

    Concert de l'orchestre de Paris dirigé par Christoph Eschenbach avec le pianiste Nikolaï Lugansky.
    Robert Schumann : Symphonie n° 1 " Du Printemps ", Symphonie n° 2.
    W.A. Mozart : Concerto pour piano et orchestre n° 21, K 467.

     


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