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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 octobre 2024 |
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Récital de la mezzo-soprano Waltraud Meier avec le pianiste Nicholas Carthy.
Un Walhalla où elle veut
La " Grande " Waltraud Meier, celle que personne ne peut oublier dans Isolde ou Brunhilde de Wagner, était la vedette du Théâtre du Châtelet le 7 novembre dernier. Mais avec le répertoire intimiste du Lied, la mezzo-soprano n'ignorait pas qu'elle risquait sur un terrain qui ne lui est pas des plus favorables.
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Par définition amples et puissantes, les grandes voix wagnériennes semblent mal adaptées à la morphologie vocale du lied. On leur préfère volontiers des gosiers moins généreuses en décibels, pour des voix plus douces et plus aptes à fouiller les moindres détails des partitions.
Mais avec Waltraud Meier, la puissance n'exclut pas une palette extrêmement vaste de nuances et de coloris. Capable de toutes les modulations d'intonations, des plus subtiles aux plus rageuses, elle donne de l'éclat au verbe et des phrasés impeccablement ourlés.
Car la cantatrice vit le texte au plus fort de ses potentialités dramatiques et compense une émission pas toujours dominée par des inflexions de ligne sans cesse convaincantes. La diction est claire, ne néglige jamais la ponctuation et les phrases semblent dites d'un même souffle, sans qu'on y décèle les respirations.
Les Chants tziganes de Brahms sont ainsi traités avec vigueur rythmique mais une indéniable souplesse. Le résultat paraît vif, simple et toujours intense ; à l'inverse des Rückert Lieder de Mahler, emprunts d'une gravité et d'une profondeur poignante soulignées par un grain de voix soudain plus charnu.
Mais c'est évidemment dans Schubert que l'on redoute le plus une Brunhilde. Ici, elle a l'intelligence de ne pas tenter la voie intimiste où elle ne se sait pas la mieux armée, en témoigne un précédent récital raté dans cette même salle. Et effectivement, son Schubert est peu orthodoxe, mais sa manière de privilégier la franchise et la spontanéité donne une Marguerite au Rouet comme neuve, d'une force à laquelle il est difficile de rester insensible.
Jeu fluide, perlé et robuste à la fois, le pianiste Nicholas Carthy soutient, éclaire et répond à la ligne de chant. D'un relief particulièrement étonnant dans Brahms, il dialogue plus qu'il n'accompagne, et son jeu supplée à la part d'ombre qui manque parfois à la chanteuse.
À l'issue de presque deux heures de récital, Waltraud Meier a enchaîné bis sur bis pour contenter un public enthousiaste qui ne refusait de la laisser partir. Cette Isolde de rêve vient de prouver qu'il y a une vie après Bayreuth (où elle n'est plus invitée) et qu'une artiste de cette envergure peut dénicher son Walhalla où elle veut.
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| Le 08/11/2001 Pauline GARAUDE |
| Récital de la mezzo-soprano Waltraud Meier avec le pianiste Nicholas Carthy. | Brahms : Zigeunerlieder (chants tziganes)
Mahler : Rückert Lieder
Schubert : Mignon- lieder, Ganymed, Marguerite au Rouet, La Jeune Fille et la Mort, La Jeune Nonne. | |
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