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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Nouvelle production de Maria di Rohan de Gaetano Donizetti à Genève.
Belcanto cardinal
© Carole Parodi
Si ce n'est quelques enregistrements et une production allemande l'an passé, Maria di Rohan est un opéra presque oublié de Gaetano Donizetti. Il est tiré d'un mélodrame français intitulé " Un duel sous Richelieu " de Locronan et Edmond Badon, publié en 1832. Le Grand théâtre de Genève vient de lui rendre une scène.
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L'opéra de Donizetti met en scène des personnages historiques dans un épisode de pure fiction situé sous le règne de Louis XIII, et dont l'action se situe au début de la carrière de Marie de Rohan, qui fut toute sa vie (et elle vécut soixante-quinze ans), une intrigante de première grandeur.
Agée de vingt-cinq ans, courtisée par le Cardinal de Richelieu qui n'obtint pas ses faveurs (!), elle est obligée de cacher son mariage avec le duc de Chevreuse, un autre grand du royaume. S'ensuit une série d'intrigues amoureuses qui se dénoueront par un duel dans une période où ils sont punis de mort.
Avant dernier ouvrage lyrique de Donizetti, Maria di Rohan résume le génie mélodique de cet auteur fécond et inégal. C'est un équilibre parfait entre la passion romantique exprimée par le chant et la dramaturgie, et une écriture orchestrale virtuose inhabituelle dans ce genre d'ouvrage.
Les voix doivent être d'une agilité sans faille, mais capables d'accentuations dramatiques. Les airs ornés de fioritures, " d'abellimente ", sont ici délaissés pour un chant " spianato " c'est-à -dire aplani, épuré de ses vocalises afin d'exprimer avec simplicité et le plus de vérité possible, les sentiments ressentis par les personnages.
Le spectacle genevois possède beaucoup de qualités et quelques défauts. Musicalement, le travail précis et engagé d'Evelino Pido donne raison à l'intérêt porté pour cette partition dont il a choisi la version originale viennoise, plus dramatique que celle de Paris.
Sa direction est soignée. En particulier l'Ouverture, qui montre combien Donizetti avait à coeur de se hisser au niveau de la musique orchestrale germanique.Spécialiste du bel canto romantique, Pido privilégie un orchestre " léger ", sait créer des climats émotionnels forts autour d'un chant extrêmement virtuose.
On se battrait pour elle
Dans le rôle-titre, Annick Massis est plus femme que maîtresse femme, elle sait donner chair et vérité à un personnage qui pourrait être de pure convention. Les hommes se battent pour son amour.
Le Mexicain Octavio Arevalo soutient le difficile rôle du comte de Chalais avec un panache vocal certain, mais quelques raideurs dans ses comportements scéniques. En Duc de Chevreuse, le baryton Stephen Salters est tout à fait l'inverse : son jeu est presque caricatural, mais sa voix est puissante et pleine.
La mise en scène et les décors de Giorgio Barberio Corsetti sont d'une naïveté incroyable. Partant de bons sentiments (c'est le chant qui domine, on doit montrer l'intériorité des personnages
), on aboutit à un décor totalement épuré. Quelques panneaux blancs découpent l'espace dans une lumière fade et laiteuse.
Dans un tel puits de laideur, la direction d'acteur pourtant réelle ne parvient pas à donner du sens au chant. Les costumes sont banals et flirtent avec le contresens : dans un dispositif scénique si abstrait, le plus simple eût été de choisir des tenues de la Renaissance, car quand on entend chanter " Une bande d'archets est entrée chez vous
 ", il est imprudent de montrer une garnison de soldats armés de fusils avec baïonnettes au canon.
Lors de la première, cette production a été accueillie avec une vraie distance critique de la part d'un public attentif qui a su en prendre et en laisser, mais ne l'a nullement boudé. Politesse suisse ou pas, l'ouvrage est d'un intérêt cardinal pour les amateurs de beau chant.
Lire aussi le compte-rendu d'une précédente production à Aix-la Chapelle.
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Grand Théâtre, Genève Le 06/11/2001 Olivier BERNAGER |
| Nouvelle production de Maria di Rohan de Gaetano Donizetti à Genève. | Choeur du Grand Théâtre de Genève
Orchestre de la Suisse Romande
Direction musicale : Evelino Pido
mise en scène et décors : Giorgio Barberio Corsetti
Lumières : Pier Giorgio Foti
Costumes : Christian Taraborrelli
Avec Annick Massis (Maria, comtessa di Rohan), Octavio Arevalo (Riccardo, conte di Chalais), Stephen Salters (Enrico, duca di Chevreuse), Ruben Amoretti (Armando), Alexandre Vassiliev (De Fiesque), Nicolas Carré (Vicomte di Suze), José Pazos (Aubry), Slobodan Stankovic (Familiare). | |
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