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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Est-il donc si difficile de représenter Carmen pour que les deux productions montées à l'Opéra Bastille depuis son inauguration aient été aussi mauvaises l'une que l'autre? Et finalement, celle de José-Luis Gomez en 1993 n'était-elle pas moins affligeante que celle d'Arias en 1997 ? Elle fût d'ailleurs consciencieusement reprise chaque année depuis. Que voit-on ? Une Espagne de cartes postales avec un va-et-vient incessant de nains à la Goya, des mouvements de foules absurdes tenant lieu de direction d'acteurs et une multitude de corridas mimées à tout propos. Le tout est flanqué de perpétuels pléonasmes: chaque fois que vient le thème de la mort, par exemple, surgit quelqu'un, nain ou figurant, portant le masque adéquat, au cas où l'on n'aurait pas compris. Le degré zéro de l'imagination. Et c'est dommage, car Olga Borodina, tête d'affiche de cette série de représentations est certainement l'une des plus belles voix de mezzo qui soit à l'heure actuelle. Elle possède tout: l'ampleur, la qualité somptueuse du timbre, l'égalité de l'émission, la musicalité, une technique capable de restituer toutes les nuances, un phrasé irréprochable et une prononciation française largement aussi intelligible que celle de la plupart de nos compatriotes. Elle est belle, joue sobrement et danse mieux que les danseurs espagnols omniprésents pendant tout le spectacle. Et si le personnage a été parfois plus approfondi, A ses côtés, Gösta Winbergh est un vaillant Don José, extrêmement musical, n'ignorant aucune des nuances de la partition. On peut préférer pour ce rôle un timbre plus méditerranéen, mais son interprétation est attachante et irréprochable. Jean-Luc Chaignaud a l'allure et la prestance d'Escamillo. Dommage qu'il garde toujours une partie de sa voix au fond du gosier. La Micaela de Mary Mills est charmante sans plus. Les choeurs eux sont excellents. Neeme Järvi a une approche très personnelle de la partition dont il cherche à atténuer les éclats au profit de tout ce qui est subtile et raffiné. Ses changements de tempo demeurent néanmoins étonnants, voire perturbants. Bastille verra-t-il un jour une production à la hauteur de l'oeuvre ? Réponse au troisième millénaire.
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Opéra Bastille, Paris Le 03/03/2000 Gérard MANNONI |
| Reprise de Carmen à l'Opéra Bastille | Direction musicale: Neeme Järvi
Mise en scène Alfredo Arias
Décors: Roberto Platé
Costumes: Françoise Tournafond
Avec Olga Borodina (Carmen)- Gösta Winbergh (Don José)- Mary Mills (Micaela)- Henriette Bonde-Hansen (Frasquita)- Delphine Haidan (Mercedes)- Franck Leguérinel (le Dancaïre)- Gilles Ragon (le Remendado)- Reda EL Wakil (Zuniga)- LeRoy Villanueva (Morales). Orchestre et choeur de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine-Choeur d'enfants de l'Opéra national de Paris. | |
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