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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 décembre 2024 |
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Concert anniversaire au Théâtre de Poissy avec les Musiciens du Louvre de Marc Minkowsky et la mezzo Anne-Sofie Von Otter.
Heureux comme des Poissy
L'histoire d'amour entre Marc Minkowski, les Musiciens du Louvre, Anne-Sofie von Otter et le Théâtre de Poissy remonte à plusieurs années. Elle avait connu un climax lors du mémorable Ariodante de janvier 1997. Les mêmes viennent de se retrouver pour un double anniversaire placé sous le signe d'une égale félicité.
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Bons baisers d’Eltsine
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Voilà dix ans déjà que le Théâtre rénové de Poissy bénéficie d'une acoustique sans rivale à Paris et d'une programmation incroyablement relevée pour une commune de la banlieue parisienne. Pour cette double célébration (les musiciens du Louvre fêtaient aussi leurs vingt ans), Von Otter et Minkowski ont évidemment interprété ce Scherza infida d'Ariodante qui est à soi seul l'emblême d'une complicité et d'une alchimie digne des Callas et de Sabata.
Mais le programme ne manquait cependant pas de nouveautés, à commencer par cette cantate de Bach, Ich habe genug, qui ouvrait la soirée ; une apologie récurrente de la mort et de ses bienfaits, sans conteste un chef-d'oeuvre de masochisme religieux rarement atteint.
Vêtue de noir, profondément imprégnée de sa culture protestante et nordique, Anne-Sofie von Otter en donne une lecture saisissante, presque morbide, et exprime avec une rage sombre et une délectation quasiment extatique tous les états successifs de l'interrogation métaphysique engendrée par l'approche de la mort : Bergman et Dreyer semblent planer sur cette interprétation inhabituelle, presque expressionniste.
La Symphonie en Ré majeur de Carl Philipp Emmanuel Bach qui lui succède met, elle, en valeur, les qualités de l'orchestre. La construction est audacieuse, presque péremptoire et volontiers abrupte, mais le mouvement semble varié à l'infini. Malgré quelques approximations dans la cohésion des violons, Marc Minkowski délivre une énergie contagieuse en même temps que chaleureuse et caressante. Les flûtes, hautbois et bassons sont ici particulièrement bien servis.
Anne-Sofie von Otter revient en scène non sans avoir troqué la veste noire des lamentations pour celle, rouge sang, de la passion amoureuse. Son Resign thy club est étourdissant de drôlerie et de rouerie féminine. Il semble avoir encore gagné en raffinement et en profondeur d'interprétation en regard du concert d'il y a deux ans. Mais ce sont les deux airs d'Ariodante que tout le monde attend.
L'expérience de la scène à Garnier a manifestement permis au tandem de mûrir. Moins désincarné et angélique, le lunaire Scherza infida est devenu désespéré et névrotique. De son côté, s'il est toujours aussi virtuose, le solaire Dopo notte transpire déjà le désespoir à venir malgré sa joie extérieure.
Triomphe absolu pour la chanteuse, qui salue au pupitre avec humour et sens du théâtre. On sait qu'elle va revenir, puisque Marc Minkowski, après avoir annoncé un bouleversement de l'ordre initialement prévu dans le programme, avait fait mention d'une " surprise"
La seconde partie du concert est livrée à la furie que déchaîne Jean Philippe Rameau pour son ultime chef-d'oeuvre opératique : Les Boréades. Ici, la suite instrumentale extrapolée de l'opéra met en valeur une approche novatrice de l'orchestre, tant pour la virtuosité que le sens des couleurs et du tissu sonore.
Marc Minkowski n'est jamais en retard d'un coloris nouveau ni d'une rafale de vent (l'opéra mettant en scène le courroux des éléments). Sans négliger les dentelles dont regorge la partition, le chef n'oublie jamais le relief et la théâtralité qui constituent sa manière si caractéristique. Sous sa houlette, les inventions respectives de Rameau et de Haendel semblent se répondre et parfois se confondre.
Les Bis furent divers en cette fin de concert : d'abord la Pizzicato Polka de Johann Strauss (une réelle « surprise » avec des instruments XVIIIe !) et, toujours Haendel, le célébrissime Ombra mai fu de Xerxès ; une lecture sobre et poignante comme un adieu impossible ? Oui, mais surtout une promesse de remettre le couvert avant dix ans.
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Théâtre municipal, Poissy Le 04/04/2002 Juliette BUCH |
| Concert anniversaire au Théâtre de Poissy avec les Musiciens du Louvre de Marc Minkowsky et la mezzo Anne-Sofie Von Otter. | Jean-Sebastian Bach (1685-1750)
Cantata BWV 82 "Ich habe genug"
Aria - Recitativo - Aria - Recitativo - Aria
Carl Philip Emmanuel Bach (1714-1788)
Symphonie en RĂ© majeur H 663 - W183.1
Allegro di molto - Largo - Presto
Georg Frideric Haendel (1685-1759)
Hercules (1744)
Aria "Resign thy club" (acte II)
Ariodante (1734)
Aria "Scherza infida" (acte II)
Aria : "Dopo Notte" (acte III)
Jean-Philippe Rameau (1683-1764)
Les Boréades - Suite d'orchestre | |
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