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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Nouvelle production du Comte Ory de Rossini à l'Opéra Comique, Paris.
Entre Disneyland et l'Opéra de Paris
Telle est la place que, lors de la « fausse première » du Comte Ory, le 26 février (la soirée du 25 avait été annulée du fait d'un mouvement des intermittents), Jérôme Savary a désignée à l'Opéra-Comique. Pourquoi pas, après tout ? Les Américains de Disneyland sont de grands professionnels ; Savary, aussi. L'Opéra de Paris est un nom, un mythe avant même d'être une réalité ; Savary, aussi.
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C'est sur ce nom qu'une partie du public s'était déplacé (remarque entendue au foyer, à l'entracte) ; c'est pour Rossini que des belcantistes acharnés étaient venus ; c'est pour Annick Massis que beaucoup avaient pris leur billet. La composition de cette salle est, somme toute, emblématique du travail de Jérôme Savary : il s'agissait de ne décevoir personne. Et comme il n'est pas facile de plaire à tout le monde, certains ont pu ne pas y trouver leur compte. Comme si le spectacle, au demeurant drôle et réussi, avait à tous égards manqué de folie. Surtout au premier acte, assez classiquement mis en scène dans les jolis décors et les costumes colorés d'Ezio Toffolutti, on ne voyait pas bien clairement la différence avec la très traditionnelle production de John Cox, montée ici même par Éric Vigié en 1997 et déjà chantée, à l'époque, par Annick Massis dans le rôle de la comtesse Adèle (elle était, à l'époque, accompagnée de Rockwell Blake en comte Ory).
Il faut dire que ce Comte Ory a d'abord été créé pour le festival de Glyndebourne : comme presque toujours dans ce cas, il était fatal qu'il perde de son sel et de ses effets bucoliques (sages bovins circulant dans le lointain, festivaliers en tuxedo et en retard déambulant au milieu du choeur
) en intégrant les murs de l'Opéra-Comique. Même si le deuxième acte est plus inventif, avec la bonne idée du lit « érectile » où la Comtesse subit les assauts de son page, lui-même livré à ceux du Comte déguisé en nonne. Ambiguïté maîtrisée, érotisme subtil et malin, la scène est une des plus réussies de la soirée.
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Vocalement et scéniquement, Annick Massis est au sommet de son talent. Le timbre et la projection sont irréprochables. Lumineuse, enjouée, élégante, tour à tour tendre et offusquée, la Comtesse – est-ce le déshabillé de satin du second acte qui nous fait dire cela ? – a déjà l'étoffe d'une Maréchale. Même s'il est, convenons-en, périlleux de comparer Strauss et Rossini.
Mais, là encore, pourquoi pas ? Malgré la direction, tambourinante, du très jeune chef sicilien Antonino Fogliani à la tête de l'Ensemble orchestral de Paris (est-ce parce qu'il est un clone du compositeur que Jérôme Savary l'a choisi ? on serait tenté de le croire), la partition a des accents de tendresse et de délicatesse pour ainsi dire viennois. Ce qui n'est, du reste, pas si paradoxal, puisqu'elle est largement reprise du très européen Voyage à Reims, composé en 1825, en France, pour le sacre de Charles X
Le reste de la distribution se tient. Certes, Marc Laho n'est pas entièrement à l'aise avec les aigus du Comte, mais il faut dire que le rôle est redoutable. Marc Barrard, Raimbaud, est drôle et précis. Nicolas Cavallier, qui remplace Denis Sedov défaillant dans le rôle du Gouverneur, a une voix noble et bien placée ; l'acteur est tout à fait convaincant. Anna Steiger, Dame Ragonde, qui sort de la Cenerentola du Palais-Garnier, est un peu perdue dans un rôle de duègne qui ne sied pas vraiment à sa vis comica. Enfin, le page d'Isabelle Cals est fin et charmant ; dommage, juste, que son élocution ne soit pas toujours très compréhensible.
En définitive, Jérôme Savary signe là une production qui, si elle n'est sans doute pas destinée à rester dans les annales, se laisse voir et entendre avec grand plaisir.
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Opéra Comique - Salle Favart, Paris Le 26/02/2003 Anne-Béatrice MULLER |
| Nouvelle production du Comte Ory de Rossini à l'Opéra Comique, Paris. | Le Comte Ory, opéra en deux actes de Giacchino Rossini
Mise en scène : Jérôme Savary
Direction musicale : Antonino Fogliani
DĂ©cors et costumes : Ezio Toffolutti
Lumière : Alain Poisson
Études musicales : Éliane Manchet
Chef de choeur : Yves Parmentier
Assistante à la mise en scène : Frédérique Lombart
Ensemble orchestral de Paris
Avec Marc Laho (le comte Ory), Marc Barrard (Raimbaud), Nicolas Cavallier (le Gouverneur), Rodolfo Cavero (premier coryphée), Guy Vives (deuxième coryphée), Annick Massis (la comtesse Adèle), Isabelle Cals (Isolier), Anna Steiger (Dame Ragonde), Lys Nordet (Alice).
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