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CRITIQUES DE CONCERTS |
22 décembre 2024 |
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Carte Blanche à Elisabeth Chojnacka au Festival "Lille Clé de Soleil", France.
Grandeur et cruauté d'un instrument
Dans la très belle salle blanche et or du Conservatoire de Lille, il y avait ce jeudi-là un désir de musique si palpable dans le public, qu'il fallait une interprète exceptionnelle pour y répondre. En donnant « carte blanche » à Elisabeth Chojnacka(marraine du Festival), Denis Simandy avait placé la barre très haut.
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Et la fête fut superbe. Pendant près de deux heures, son clavecin allait établir ce lien si rare et si précieux qui se tisse entre la générosité d'une artiste et la qualité d'une écoute active, autour de pièces qui, toutes, lui étaient dédiées. Car en éveillant, depuis des années, son instrument à une dynamique entièrement nouvelle et à des sonorités proprement inouïes, Elisabeth Chojnacka aura inspiré nombre d'oeuvres majeures aux plus grands compositeurs de ce temps, toutes nationalités et toutes sensibilités confondues. Son répertoire, qui ne cesse de s'enrichir en faisant appel, entre autres, aux jeunes créateurs, constitue aujourd'hui un des grands catalogues de la création contemporaine.
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Pour rendre hommage à Maurice Ohana, dont elle reste l'interprète privilégiée, elle avait réuni auprès d'elle des amis musiciens dont l'engagement était à la mesure des ressources infinies d'un instrument que Maurice Ohana disait être « d'une cruauté et d'une grandeur fantastique ». Dans Miroir de La Célestine, une suite en six mouvements enchaînés pour clavecin et percussions, librement refondés sur le matériau initial de l'opéra éponyme, on retrouvait le mystère et la sensualité d'une envoûtante musique nocturne, explosant soudain dans la violence d'une danse rituelle aux réminiscences africaines, avant de se dissoudra dans un climat désolé, de plus en plus raréfié. Et c'est la guitare à dix cordes qui venait alors arracher au temps la vision flamboyante et rude d'un « caprice » de Goya (« Si le jour paraît, nous partons »), peuplée de créatures meurtries, ombres errantes fuyant aux premières lueurs de l'aube. Ce furent ensuite les échos d'une langue de très ancienne mémoire que reprenaient, dans Sacral d'Ilx, le clavecin, le hautbois et le cor, appelés à se défier dans un combat archaïque ressuscitant l'âpreté d'un monde mythique, enfoui, indéchiffrable, fracturé en courtes plages de silence. L'enchaînement des pièces ne devait rien au hasard, et tout à la volonté de faire accéder l'instrument à des univers sensibles très différents, tous entrant en résonance avec l'oeuvre de Maurice Ohana.
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A celui par exemple d'Astor Piazzola, qui dans La Muffa (le cafard) se souvient au passage d'une passacaille de Bach pour dire le spleen qui prend la tête et le coeur, mais en se résignant à la vie comme elle va, ou à celui de Mauricio Sotelo qui pour Cà bala del caballo convoque le clavecin et la guitare sur le terrain fiévreux du cante jondo andalou, en exigeant la fusion parfaite des deux interprètes. Et celle-ci fut miraculeuse. Il y avait dans le choix de Denis Simandy, de donner à ce moment du programme, deux études pour cor de Giacinto Scelsi, la même évidente recherche qui animait tout le concert, de débusquer les potentialités rarement exploitées de son instrument : travail technique et stylistique sur la sourdine, notes tenues à distance, claires ou étouffées, sur les tiers et les quarts de ton, relayées par le silence dans la lenteur du tempo. Un silence rompu par Africa celebrates de Grant Mac Lachlan : musique de vent, de soleil et de pluie, où le clavecin provoque les percussions africaines, transcende leur rythmes et leurs timbres qui se déchaînent dans une montée en puissance de forces vitales, primitives, scandées par le martèlement sur la terre frappée, jusqu'à la transe.
Pour sa deuxième édition, et avec de tels concerts, le Festival « Clef de Soleil » impose une place de grande classe dans la cité, en espérant que celle-ci lui donne impérativement les moyens de le faire savoir.
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Prochains concerts :
Le 31 juillet : Récital à deux violoncelles (Sigrid Vanderbogaerde, Jean-Paul Dessy)
Le 7 août : Isabel Soccoja(chant) et Ancuza Aprodu(piano)
Le 14 août : David Lively(piano) et Quatuor Johannes
Le 21 août : Slava Chevllanov (orgue)
Le 28 août : Gilles Collard(violon), Carole Carniel (piano)
Tous les concerts ont lieu à l8h30, dans différents lieux de la ville.
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Auditorium Lalo, Lille Le 17/07/2003 Françoise MALETTRA |
| Carte Blanche à Elisabeth Chojnacka au Festival "Lille Clé de Soleil", France. | « AUTOUR DE MAURICE OHANA »
Carte blanche à Elisabeth Chojnacka (clavecin)
Avec Béatrice Daudin (persussions), Stephan Schmidt (guitare), Thierry Cammaert (hautbois), Denis Simandy (cor)
MAURICE OHANA (1914-1992)
Miroir de La Célestine (clavecin et percussions)
« Si le jour paraît » (guitare à 10 cordes)
Sacral d'Ilx (clavecin, hautbois, cor)
ASTOR PIAZZOLLA (1921-1992)
« La Muffa » (transcription pour clavecin de Yves Prin)
MAURICIO SOTELO (1961)
« Cà bala del caballo » (clavecin & guitare)
GIOACINTO SCELSI (19O5-1988)
Deux pièces pour cor seul
GRANT MAC LACHLAN
« Africa celebrates (Umbhiyozo Waze Africa)” (Clavecin & percussions africaines) | |
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