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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 octobre 2024 |
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Concert de l'Orchestre national de France sous la direction d'Ingo Metzmacher, avec la participation d'Hélène Grimaud, au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Le National au sommet
Ingo Metzmacher
Sans doute attiré avant tout par la présence d'Hélène Grimaud pour ce concert, le public du Théâtre des Champs-Élysées a été gratifié d'une somptueuse démonstration orchestrale de l'Orchestre national de France avec un chef à connaître, Ingo Metzmacher, dans un cheval de bataille aussi périlleux que l'Oiseau de feu de Stravinsky.
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Ils étaient certainement venus plus pour Hélène Grimaud que pour le chef allemand Ingo Metzmacher, tous ceux qui remplissaient à ras-bord le Théâtre des Champs-Élysées ce samedi soir. Grimaud est toujours aussi belle, rayonnante, et la manière dont elle joue le Troisième concerto de Bartók justifie pleinement cet engouement et cette popularité. Elle a tout pour être et rester une star : le physique, le talent, le charisme, et cette personnalité toujours un peu déjantée qui fait que la manière dont elle aborde la musique lui appartient en propre.
Elle jongle à sa manière avec les humeurs souvent contradictoires de cette partition majeure, passant de la rêverie à l'agression de quelques mesures aux rythmes syncopés, du charme en demi-teinte à des couleurs violentes, comme spontanément, comme si elle improvisait. L'essentiel de l'oeuvre est là , mais proposé comme nul autre ne le ferait ou même ne tenterait de le faire. Evidemment, le succès est au rendez-vous, ce qui nous vaut d'entendre deux fois le final, ce dont personne ne se plaindra.
Le concert avait débuté par Miserae de Karl Amadeus Hartmann, poème symphonique dédié au début des années 1930 aux premières victimes des camps de concentration. C'est une page sobrement poignante, écrite dans un style où les cuivres et la petite harmonie, prépondérants, rappellent beaucoup Stravinsky. Avant de se lancer en deuxième partie dans la version intégrale de l'Oiseau de feu, les musiciens du national y font déjà une éblouissante démonstration. Car c'est bien avec cet Oiseau de feu que chef et instrumentistes déchaînent finalement le plus de passion.
Ingo Metzmacher est l'actuel directeur musical de l'Opéra de Hambourg, fonction qu'il occupera au Nederlandse Opera d'Amsterdam à partir de 2005. Il n'a guère encombré jusqu'à présent nos estrades de concert, et c'est bien dommage. Très impliqué dans la musique d'aujourd'hui, mais tout autant dans son jardin avec Mozart ou Beethoven, il donne une somptueuse lecture de la partition de Stravinsky dans sa version originale de 1910.
Quarante-cinq minutes de splendeur sonore, de poésie, de mystère, de magie. Le National visiblement fasciné lui-même, a su passer des plus subtiles et arachnéennes nuances ponctuant cette légende faite d'or, de cruauté et d'amour, aux déchaînement extrêmes du monde mortifère de Katcheï l'Immortel. La fulgurance de l'oiseau, les affres du Tsarévitch amoureux, les maléfices des créatures du royaume magique, avec toutes leurs racines dans la sensibilité russe la plus ancienne où l'on aime tellement se faire peur et se donner d 'atroces états d'âme, tout était perceptible avec la plus belle efficacité instrumentale, dans un chatoiement exceptionnel de couleurs.
Un chef d'exception, sans aucun doute et un orchestre au sommet de ses moyens, comme chaque fois qu'il veut s'en donner la peine.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 06/03/2004 Gérard MANNONI |
| Concert de l'Orchestre national de France sous la direction d'Ingo Metzmacher, avec la participation d'Hélène Grimaud, au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Karl Amadeus Hartmann (1905-1963)
Miserae
Béla Bartók (1881-1945)
Concerto pour piano et orchestre n°3
Hélène Grimaud, piano
Igor Stravinsky (1882-1971)
L'Oiseau de feu, ballet en deux parties
Version originale de 1910
Orchestre national de France
Ingo Metzmacher, direction | |
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