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CRITIQUES DE CONCERTS 21 décembre 2024

Nouvelle production des Paladins de Rameau mise en scène par José Montalvo et dirigée par William Christie au théâtre du Châtelet, Paris.

Rameau dans la joie
© M. N. Robert

Succès total que cette aventureuse production de la comédie ballet de Rameau Les Paladins. Là où certains auraient fait fausse route, le chorégraphe chargé de la mise en scène José Montalvo accomplit un sans faute. Une leçon pour les tenants de la sinistrose minimaliste à la mode, et un spectacle réjouissant, comme à la création.
 

Théatre du Châtelet, Paris
Le 14/05/2004
GĂ©rard MANNONI
 



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  • Retrouver l'esprit festif de cette comĂ©die ballet crĂ©Ă©e en 1760 et dont le but n'Ă©tait autre que de divertir, tel Ă©tait le pari engagĂ© par le Châtelet en proposant Ă  JosĂ© Montalvo, Dominique Hervieu et leurs Ă©quipes de prendre en charge Les Paladins. La lĂ©gèretĂ© du livret, une anecdote mouvementĂ©e mais on ne peut plus convenue marquĂ©e par le goĂ»t de l'Ă©poque pour le magique et l'orientalisme – le palais chinois du dernier acte et la fĂ©e Manto – permet en effet toutes les fantaisies, tant que ne s'en empare pas quelque metteur en scène donnant dans l'abstraction ou la psychanalyse.

    Montalvo et Hervieu ont donc pu laisser libre cours à leur fantaisie naturelle, une fantaisie que leur moyens techniques autant que leur humour et leur imagination leur permettent aujourd'hui de nous faire pleinement partager. Alors, aux beaux accents de la musique de Rameau, il ne reste plus qu'à se laisser emporter par ce délire intégral et irrésistible. Comme à l'accoutumée, images virtuelles et réalité se mélangent, se chevauchent, se substituent en un jeu savant, poétique, hilarant, d'une efficacité scénique totale. Tout est possible, d'un vase Médicis dont le lion et l'éphèbe deviennent soudain vivants à un métro sur le toit duquel passent de superbes chevaux blancs, d'un couple en costumes XVIIIe sautant au trempolino sur des nuages aux traditionnelles apparitions animalières chères au chorégraphe.

    © M. N. Robert

    On n'en finirait pas d'énumérer ces images qui accompagnent l'action et la musique, la soulignent, la paraphrasent, la complètent, avec une profusion parfois même difficile à suivre. Car, dans le même temps, le jeu scénique des chanteurs est lui aussi doublé, accompagné, singé par des danseurs, seuls ou en groupe. Là encore, Montalvo se livre à un savant mélange de style : un peu de rap, un zest d'africain, un rien de classique, le tout chorégraphié avec le plus grand soin. Les chanteurs eux-mêmes dansent à l'occasion et l'on ne sait plus qu'admirer le plus des vocalises du ténor ou du rappeur qui tourne indéfiniment sur la tête. La gestuelle de la danse est d'une vivacité stimulante, toujours inattendue, toujours en situation. C'est drôle, tonique et beau, comme les couleurs des costumes XXe siècle, d'une fraîcheur bien mise en valeur par les éclairages. A aucun moment, Montalvo ne cherche à jouer au metteur en scène de théâtre. C'est un homme d'images et de mouvement et il se sert à peu près exclusivement des unes et de l'autre pour tout exprimer.

    Très belle distribution au français moyen

    A l'excellence des danseurs du Centre Chorégraphique national de Créteil s'ajoute celle des chanteurs, au moins pour ce qui est de la qualité vocale, de la vraisemblance physique et de l'engagement dramatique. Car, il faut toutefois reconnaître qu'à l'exception du Finlandais Topi Lehtipuu et de François Piolino, on ne comprend pas un mot de ce qu'ils chantent. Dommage, car, allure de mannequin et voix franche, claire, bien timbrée, Stéphanie d'Oustrac est une superbe Argie, Sandrine Piau est piquante à souhait en Nérine, Laurent Naouri très drôle en Orcan, René Schirrer très adéquat en Anselme trompeur et trompé.

    Mais c'est le jeune ténor finlandais Topi Lehtipuu qui s'impose avec un éclat supplémentaire, grâce à sa diction, à la qualité de son travail vocal, à son physique de jeune premier filiforme et longiligne, à sa manière de bouger. François Piolino est également aussi drôle que bien chantant en fée Manto. William Christie se délecte avec énergie dans cet univers musical qu'il adore et dont il sait nous communiquer la vie et les couleurs.

    Bref, on passe une soirée d'opéra comme on en rêve, hors des sentiers battus, mais sans pédanterie ni prétentieuses divagations cérébrales, généreuse, intelligente. Un modèle du genre !




    Théatre du Châtelet, Paris
    Le 14/05/2004
    GĂ©rard MANNONI

    Nouvelle production des Paladins de Rameau mise en scène par José Montalvo et dirigée par William Christie au théâtre du Châtelet, Paris.
    Jean-Philippe Rameau (1683-1764)
    Les Paladins, comédie lyrique en trois actes
    Livret de Duplat de Monticourt
    Créé le 10 février 1760 à l'Académie royale de musique de Paris

    Danseurs du Centre Chorégraphique National de Créteil et du Val-de-Marne
    Choeur Les Arts Florissants
    Les Arts Florissants
    direction : William Christie
    mise en scène, scénographie et conception vidéo : José Montalvo
    chorégraphie : José Montalvo et Dominique Hervieu
    costumes : Dominique Hervieu, Julie Scobertzine et Emilie Kindt-Larsen
    éclairages : Philippe Berthomé

    Avec :
    Topi Lehtipuu (Atis), Stéphanie d'Oustrac (Argie), Sandrine Piau (Nérine), François Piolino (La Fée Manto), Laurent Naouri (Orcan), René Schirrer (Anselme), Emiliano Gonzalez Toro (un Paladin).

     


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