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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Nouvelle production de la Grande Duchesse de Gerolstein d'Offenbach mise en scène par Laurent Pelly au Théâtre du Châtelet, Paris.
Ah ! Que j'aime cette Grande Duchesse !
Felicity Lott (la Grande Duchesse)
Si cette incroyable Grande Duchesse sortie de l'imagination d'Offenbach et de Meilhac et Halévy aime les militaires, gageons que tout Paris aimera désormais la Grande Duchesse. Une réussite de plus à l'actif de l'équipe branquignolesque Pelly-Minkowski-Scozzi-Mélinand, et de leur super star, Dame Felicity Lott.
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Ils auraient pu tout rater. Ils ont quasiment tout réussi. L'équipe gagnante de La Belle Hélène a remis ça, avec une partition moins populaire dans son ensemble, ce qui augmentait les risques. Mais Pelly et ses sbires sont bien trop futés, bien trop malins et surtout talentueux pour tomber dans pareille chausse-trappe. Même constatation pour Dame Felicity Lott, sans doute encore plus déjantée et originale en potentat hyper féminin guettée par la ménopause qu'en séductrice antique. Plongeant tête baissée dans la loufoquerie de ce duché de pacotille ô combien parodique du second Empire, ils tirent mille ficelles pour ne laisser au spectateur aucune seconde de répit. On passe d'un gag à un jeu de scène irrésistible, avec bien sûr toutes sortes d'inventions pour faire surgir par groupes les personnages là où on les attend pas, mais avec surtout une incroyable faculté d'invention dans la direction d'acteurs.
Chaque personnage est en effet caractérisé tant dans son comportement et son costume que dans sa gestuelle, composant une série de portraits hauts en couleurs, de la petite paysanne gourde, niaise mais entêtée et madrée pour Wanda, à la grande dame un peu alcoolo mondaine, un peu esseulée, trop portée sur la chose mais n'y pouvant rien, pour une Grande Duchesse d'anthologie, en passant par un Fritz aussi bêta que sa future épouse et vaniteux comme un paon, et un trio de conspirateurs parodique de Meyerbeer à mourir de rire. Et puis, il y a mille idées de décor, avec par exemple ce squelette de tour tout en haut de laquelle la Grande Duchesse attend désespérément le retour de son héros de Fritz, telle soeur Anne, ou ces parcours interminables nécessaires pour quitter le plateau à travers les salles du palais alors que rien ne s'opposerait à ce qu'on les quitte directement.
Magnifique Felicity Lott, sans une once de vulgarité
Menés par un Minkowski d'une vraie précision et d'un entrain aussi contrôlé qu'en apparence débridé, les chanteurs, les choristes et les danseurs dirigés par la si facétieuse Laura Scozzi, nous en donnent à cour joie, et loin des traditionnels cancans et autres divertissements de rigueur, les ballets deviennent des intermèdes aussi cocasses qu'inattendus. Felicity Lott, on l'a dit, déploie des trésors d'intelligence, de sens du théâtre, d'humour, de musicalité, sans une once de vulgarité, ce qui touche à l'exploit. A-t-elle vraiment la voix du rôle ? On peut en discuter, mais l'art du chant est si totalement maîtrisé dans ses moindres détails, que la question devient superflue.
En revanche, aussi drôle qu'elle soit, Sandrine Piau a du mal à franchir la rampe, même quand elle parle. Ravissante petite voix venue du baroque, elle est à la peine dans cet univers orchestral qui réclame un autre impact vocal. Mais le personnage existe quand même par ses qualités théâtrales. Yann Beuron est aussi convaincant en Fritz totalement dépassé par les événements qu'il le fut en Paris. Voix bien en place, jeu spontané et spirituel, il est parfait, tout comme les trois abominables conspirateurs, Puck, Paul et Boum, sortis tout droit de bandes dessinées, respectivement Franck Leguérinel, Eric Huchet et François Le Roux.
Bref, on s'amuse, même si les décors peuvent paraître dans des tonalités un peu sombres et si un incontestable tunnel persiste au milieu de l'oeuvre dont les dialogues ont pourtant été astucieusement resserrés et réactualisés. Ne boudons pas notre plaisir et sachons goûter cette escapade hors de la morosité ambiante des autres spectacles de la rentrée.
Théâtre du Châtelet jusqu'au 2 janvier.
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Théatre du Châtelet, Paris Le 05/10/2004 Gérard MANNONI |
| Nouvelle production de la Grande Duchesse de Gerolstein d'Offenbach mise en scène par Laurent Pelly au Théâtre du Châtelet, Paris. | Jacques Offenbach (1819-1880)
La Grande Duchesse de Gerolstein, opéra-bouffe en trois acte et quatre tableaux (1867)
Livret de Henri Meilhac et Ludovic Halévy
Choeur des Musiciens du Louvre
Les Musiciens du Louvre-Grenoble
direction : Marc Minkowski
mise en scène et costumes : Laurent Pelly
décors : Chantal Thomas
chorégraphie : Laura Scozzi
adaptation des dialogues et dramaturgie : Agathe MĂ©linand
éclairages : Joël Adam
préparation des choeurs : Christophe Grapperon
Avec : Felicity Lott (La Grande Duchesse), Sandrine Piau (Wanda), Yann Beuron (Fritz), Franck Leguérinel (Le Baron Puck), Eric Huchet (Le Prince Paul), François Le Roux (Le Général Boum), Boris Grappe (Le Baron Grog), Alain Gabriel (Népomuc), Maryline Fallot (Iza), Blandine Staskiewiecz (Olga), Aurelia Legay (Amélie), Jennifer Tanni (Charlotte), Christophe Grapperon (Le Notaire). | |
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