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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert Luigi Rossi à la cour d'Anne d'Autriche par Véronique Gens et l'ensemble L'Arpeggiata de Christina Pluhar au Château de Versailles.
Versailles sous le charme de l'Italie
L'ensemble L'Arpeggiata de Christina Pluhar est assurément l'un des ensembles les plus intéressants en musique ancienne de ces dernières années. Dans le cadre de l'Automne Musical du Château de Versailles, la formation entourait la grande Véronique Gens pour une soirée Luigi Rossi qui s'est avérée mémorable.
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Au premier abord, on pouvait s'interroger sur les capacités de Véronique Gens à revenir à ses premiers amours – le répertoire baroque – entre deux Fiordiligi et trois Mélisande. Mais dans un programme il est vrai habilement construit, ménageant beaucoup plus d'airs que de pièces recitativo, la soprano française a asséné une époustouflante démonstration vocale de type weight watchers, contrôlant idéalement un vibrato qu'on aurait pu craindre envahissant, sans jamais que la substance vocale perde de son épaisseur, la longueur du souffle faisant le reste. Rarement on aura entendu courbes mélodiques aussi galbées et lignes de chant menées à leur conclusion avec autant d'art.
De ce fait, le Begl'occhi, che dite ? d'Il Palazzo incantato du compositeur romain est proprement hypnotique, le Laschiate Averno d'Orfeo du même compositeur dans une magnifique transcription du si regretté Jean Lionnet tirerait des larmes à une pierre. Infime réserve, l'ampleur de la voix empêche la chanteuse d'accomplir les diminutions si présentes dans le premier baroque : mais vétille que cela, face à la fascination que Véronique Gens a exercé sur son public, fascination rehaussée par une prestance scénique à couper le souffle.
Autour d'elle, Christina Pluhar a réuni une parure instrumentale d'une opulence digne de sa chanteuse. Alors que L'Arpeggiata s'était plutôt jusque-là fait connaître par une cohorte de cordes pincées aux mille couleurs, l'ensemble s'est présenté avec des cordes frottées virtuoses (mention spéciale pour le violon radieux de Veronika Skuplik, qui compte parmi ce qui se fait de mieux dans le violon XVIIe siècle), le tout donnant cette opulence de couleurs si particulières aux musiciens de Christina Pluhar. La chef-harpiste-théorbiste a une nouvelle fois démontré une science magistrale des combinaisons sonores, sans renoncer à une carrure rythmique qui dynamite proprement la Ciaccona de Maurizio Cazzati ou celle d'Antonio Bertali.
L'ampleur rythmique, parfois comme suspendue, permet en outre à Véronique Gens de déployer sereinement un phrasé royal. En tout état de cause, Christina Pluhar et ses complices offrent une beauté sonore trouvant peu d'équivalent à l'heure actuelle, hormis peut-être, dans une autre perspective, Jordi Savall – la prestation de L'Arpeggiata dans les extraits d'Orfeo font paraître presque décorative celle maintenant ancienne des Arts Florissants – enregistrement Harmonia Mundi.
Un mot pour finir de Luigi Rossi : qu'attend-on pour exhumer plus activement son oeuvre sublime ? Espérons que Christina Pluhar transformera dignement cet essai si prometteur.
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Chapelle Royale, Versailles Le 13/11/2004 Isabelle APOSTOLOS |
| Concert Luigi Rossi à la cour d'Anne d'Autriche par Véronique Gens et l'ensemble L'Arpeggiata de Christina Pluhar au Château de Versailles. | Dans le cadre de l'Automne musical du Château de Versailles
Cycle Les Italiens à la Cour de France
Concert Luigi Rossi à la cour d'Anne d'Autriche
Véronique Gens, soprano
Ensemble L'Arpeggiata
Mira Glodeanu, Veronika Skuplik, violons
Mieneke van der Velden, Christine Plubeau, violes
Paulina van Laarhoven, viole & lirone
Bruno Cocset, violoncelle
Richard Myron, contrebasse
Elisabeth Seitz, psaltérion
Eero Palviainen, archiluth & guitare baroque
Elisabeth Geiger, Haru Kitamika, clavecin & orgue
Christina Pluhar, harpe baroque, théorbe & direction | |
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