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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Nouvelle production de la Flûte enchantée de Mozart dans la mise en scène de La Fura del Baus et sous la direction de Marc Minkowski à l'Opéra Bastille, Paris.
Un mauvais rĂŞve
Production phare de la première saison de Gérard Mortier, cette Flûte enchantée importée de la RuhrTriennale n'aura été que le plus anodin des songes. Sous la direction incohérente de Marc Minkowski, le plateau ne révèle que ses faiblesses, incapable de raviver l'intérêt pour l'imaginaire réjouissant mais trop vite essoufflé de la Fura del Baus.
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Un jeune homme d'aujourd'hui, peut-être un peu trop blond pour être réellement commun, est englouti par un épais matelas gonflable : alors débute le songe, immersion au coeur palpitant de son univers mental. Ce jeune homme d'aujourd'hui pourrait s'appeler Tamino, être le héros virtuel d'un Singspiel de Mozart – mais qu'importe Mozart, puisqu'« il faut être absolument moderne » disait Arthur Rimbaud, et dit aujourd'hui Gérard Mortier. Voilà bien l'étonnant paradoxe du concept de la Fura del Baus, qui s'approprie l'esprit de l'oeuvre par la vision du premier acte la plus ludique, la plus féerique qui se puisse projeter dans un présent futuriste de jeu vidéo, tout en la trahissant par la substitution de vers de Rafael Argullol, recréateur prétentieux, aux dialogues, au théâtre même de Schikaneder.
Le collectif catalan se plonge dans les tréfonds d'un théâtre expérimental dont il révèle habilement les ficelles, rendant hommage aux techniciens de scène, foule en blouses blanches peuplant un laboratoire mouvant, mais s'abîme dans les limites de sa contemporanéité : au contact du dispositif modulable et déroutant qui lui tient lieu de dramaturgie, la direction d'acteurs n'est que désespérément banale.
Au foisonnement de trouvailles esthétiquement douteuses mais souvent réjouissantes des premières scènes – jusqu'à l'émerveillement d'une Reine de la Nuit constellée élevée au-dessus de la fosse – succède un deuxième acte vidé de sa substance initiatique, statique, où la perspicace dynamique des couples et des doubles ne peut tromper l'ennui, d'autant que la cohérence mozartienne est sans cesse brisée par l'amplification techniquement indigne des élucubrations serpentines de Rafael Argullol, déclamés par les voix étouffées de Dominique Blanc et Pascal Greggory, vecteurs ennuyés de l'accusation de lâcheté adressée à un public consentant, s'inscrivant dans la lignée soi-disant moderniste d'un théâtre masochiste.
Une direction d'orchestre bien fragile
Privée de son unité organique, la Flûte ne prend pas non plus le chemin de la fosse, où Marc Minkowski, expert dans l'art de la narration, n'obtient qu'un son compact et sec, multipliant les effets de manche, en tempi trop contrastés pour convaincre du bien fondé d'accélérations et d'accents arbitraires, noyant le plateau vocal dans ses fragilités.
Et que penser d'un Sarastro – Ain Anger – embourbé dans un O Isis und Osiris sans pulsation, si inexpert qu'il n'a ni grave ni noblesse de phrasé ? Que dire d'une Reine de la Nuit – Erika Miklosa – dont la pugnacité de l'accent est entravée par un vibrato désordonné, une colorature défaillante, et un suraigu sans réel éclat ? Privé de dialogues, Papageno peut-il exister, même s'il a la voix et la verve de Stéphane Degout ?
Sans sollicitation émotionnelle, la Pamina de Mireille Delunsch déçoit, de projection souvent anecdotique et de lignes chaotiques. Ce sont finalement les ténors, aussi antagonistes que possible, qui tirent le mieux leur épingle d'un jeu contraignant : Monostatos crânement pervers de Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, et Tamino héroïque, percutant, mais parfois stylistiquement négligent de Paul Groves.
L'ire démesurée d'un public passionné aura finalement paru bien vaine face à une production qui, ne laissant que le vague souvenir d'un mauvais rêve, ne mérite pas plus que l'indifférence.
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Opéra Bastille, Paris Le 24/01/2005 Mehdi MAHDAVI |
| Nouvelle production de la Flûte enchantée de Mozart dans la mise en scène de La Fura del Baus et sous la direction de Marc Minkowski à l'Opéra Bastille, Paris. | Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Die Zauberflöte, Singspiel en deux actes (1791)
Livret d'Emanuel Schikaneder et de Rafael Argullol
En langues allemande et française
Choeurs et Orchestre de l'Opéra national de Paris
direction : Marc Minkowski
mise en scène : Alex Ollé et Carlos Padrissa (La Fura dels Baus)
décors et costumes : Jaume Plensa
Ă©clairages : Albert Faura
vidéo : Frank Aleu
préparation des choeurs : Peter Burian
Avec :
Paul Groves (Tamino), Ingela Bohlin (Erste Dame), Marina Comparato (Zweite Dame), Ekaterina Gubanova (Dritte Dame), Stéphane Degout (Papageno), Claire Ormshaw (Papagena), Ain Anger (Sarastro), Wolfgang Ablinger-Sperrhacke (Monostatos), Mireille Delunsch (Pamina), Erika Miklosa (Königin der Nacht), Olaf Bär (Der Sprecher), Christian Elsner (Erster Geharnischte Mann, Zweiter Priester), Scott Wilde (Zweiter Geharnischter Mann, Erster Priester), Solistes de la Maîtrise des Hauts-de-Seine (Drei Knaben), Dominique Blanc et Pascal Greggory (comédiens). | |
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