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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 octobre 2024 |
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Concert de l'Orchestre national de Lyon sous la direction d'Heinz Holliger à l'Auditorium Maurice Ravel, Lyon.
Couronnement en ut majeur
Heinz Holliger aura particulièrement marqué la saison de l'ONL, avec pas moins de trois apparitions. Son exigence se révèle une fois de plus dans une soirée consacrée aux classiques viennois. Un concert qui ne sera pas seulement la plus grande réussite de cette triade, mais aussi l'occasion d'entendre un hautboïste désormais légendaire.
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Complicité artistique
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Hommage au réalisme poétique
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Holliger n'aime pas particulièrement les symphonies de Beethoven. Il leur préfère largement les quatuors et les sonates. C'est par conséquent dans un répertoire qu'il dirige rarement qu'il ouvre le concert de ce soir. Mais en optant pour la 1re symphonie, le musicien suisse fait le choix de la plus classique de toutes, en cohérence avec un programme organisé autour du ton d'ut majeur.
Il recompose d'abord les équilibres entre les différents pupitres, en recourant notamment à des cors et timbales à l'ancienne. Les cors anciens, d'une moindre puissance, sonnent plus proches des bois conformément à la tradition sonore de l'époque classique, et intègrent du coup mieux la matière orchestrale. La maîtrise des instruments par les musiciens de l'ONL reste néanmoins approximative ; leur son nasillard nous rappelle constamment que nous sommes loin du lustre des cors viennois et quelques impairs viennent fragiliser l‘ensemble. Les bois sont en revanche magnifiques et ressortent avec une plus grande clarté qu'à l‘accoutumée, conformément à l'impression de musique « militaire » qui avait tant frappé les esprits à l'époque de la création.
Holliger anticipe souvent, poussant systématiquement l'orchestre de l'avant, et privilégie une vision cursive, nerveuse. Le mouvement général l'emporte sur la mise en place, de petites imprécisions venant fréquemment émailler le pupitre des cordes en cours de soirée. Mais la grande force de cette approche est que l'ensemble de l'ouvrage est envisagé avec cohérence, chaque mouvement profitant de l'élan du précédent. Un Beethoven dans le droit chemin d'un classicisme solaire et jupitérien, défendu avec maestria.
Place ensuite au hautboïste dans le concerto de Mozart. Très timbré, le hautbois d'Holliger reste d'une grande maîtrise technique – faisant encore mentir le compositeur Mauricio Kagel qui voit dans la « difficulté d'émission » de l'instrument l'effort d'un homme confronté à une vierge frigide – et surtout d'une incroyable finesse musicale. La mise en valeur des notes expressives, la précision rythmique et la saveur aigre-douce de ce timbre pincé ne sont pas les moindres de ses atouts. Un Mozart plein de verve, aussi lumineux que le Beethoven qui l'avait précédé.
Pour terminer dans le même esprit, Holliger a choisi l'ut majeur de la 6e symphonie de Schubert, plus approprié que celui de la 9e, tournée vers d'autres horizons esthétiques. L'orchestre apparaît plus massif et met cette fois les bois très en avant. Le chatoiement rossinien des vents et le bruissement des cordes font de cette 6e une symphonie à la croisée de Vienne et de l'Italie.
Une interprétation qui couronne en ut majeur une série de brillants concerts sous la baguette de l'une des personnalités décisive de la musique à notre époque.
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Auditorium Maurice Ravel, Lyon Le 10/06/2005 Benjamin GRENARD |
| Concert de l'Orchestre national de Lyon sous la direction d'Heinz Holliger à l'Auditorium Maurice Ravel, Lyon. | Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Symphonie n°1, en ut majeur, op. 21 (1800)
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Concerto pour hautbois et orchestre en ut majeur, KV314 (1777)
Heinz Holliger, hautbois
Franz Schubert (1797-1828)
Symphonie n°6, en ut majeur, D. 589 (1818)
Orchestre national de Lyon
direction : Heinz Holliger | |
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