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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Première à Paris de Medea de Cherubini dans la mise en scène de Yannis Kokkos, sous la direction d'Evelino Pidò au Théâtre du Châtelet, Paris.
Promise à l'oubli
La pénultième saison de Jean-Pierre Brossmann à la tête du Châtelet serait-elle maudite ? Après des Bassarides privées d'orchestre, une Arabella privée de chef, voici Anna Caterina Antonacci privée de voix. Dès lors réduite à sa seule silhouette, Medea n'a plus à offrir que ses monstruosités formelles. Une soirée promise à l'oubli !
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Monstrueuse Médée ! Née sans succès le 13 mars 1797, la tragédie hybride, mêlant chant et déclamation, de Luigi Cherubini connaît dès 1800 un regain de fortune en Allemagne. Mais c'est Franz Paul Lachner qui guide la magicienne sur les voies de la postérité en composant en 1855 des récitatifs dont on cherchera en vain le rapport avec la musique originale. La version reprise au Châtelet est l'ultime traduction italienne de ce maelström stylistique, créée à la Scala il y a moins d'un siècle.
Il faut, pour faire avaler cet indigeste collage, une interprète d'exception, capable, bien sûr, de rivaliser avec le souvenir de Callas, mais plus encore de porter toute l'oeuvre sur ses épaules. Sacrée reine du Châtelet depuis son incandescente Cassandre, auréolée de son triomphe toulousain, Anna Caterina Antonacci aurait dû relever le défi avec le feu qui la caractérise. Réduite au silence par une laryngite, cette silhouette frustrée et frustrante n'a malheureusement pu tenir la distance par ses seules ressources théâtrales. Il est vrai qu'Irene Ratiana, arrivée d'Italie l'après-midi même, n'a pu offrir en Médée qu'un chant approximatif et ennuyeux, ayant pour seul mérite de venir à bout de l'ouvrage d'une voix suffisamment imposante pour lui permettre de tenir ce rôle particulièrement exigeant assise.
Pris au piège des incertitudes stylistiques de la partition, le reste de la distribution n'est guère plus enthousiasmant. Giuseppe Gipali confond Giasone et Pollione d'une voix claironnante, tandis qu'Annamaria dell'Oste minaude sans attrait particulier, Giorgio Giuseppini faisant à peine plus que de la figuration en Creonte. Seule Sara Mingardo semble concernée par son personnage, d'une tenue inespérée, malgré un aigu que la fréquentation de rôles trop graves a rendu fuyant.
A la tête d'un Orchestre du Capitole de Toulouse dont les cordes peinent souvent à le suivre, Evelino Pidò expédie Cherubini avec le même fracas que Donizetti ou Bellini, sans parvenir à animer un plateau sur lequel Yannis Kokkos fait souffler son habituel statisme de scénographe d'une sempiternelle variation sur le thème de l'escalier.
Ajoutons pour l'anecdote deux entractes interminables, énièmes avatars d'une soirée promise à un oubli salutaire.
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Théatre du Châtelet, Paris Le 05/07/2005 Mehdi MAHDAVI |
| Première à Paris de Medea de Cherubini dans la mise en scène de Yannis Kokkos, sous la direction d'Evelino Pidò au Théâtre du Châtelet, Paris. | Luigi Cherubini (1760-1842)
Medea, opéra en trois actes (1797)
Livret de Carlo Zangarini d'après François Benoît Hoffmann
Choeur et Orchestre national du Capitole de Toulouse
direction : Evelino Pidò
mise en scène, décors, costumes : Yannis Kokkos
éclairages : Patrice Trottier
Avec :
Anna Caterina Antonacci / Irene Ratiani (Medea), Giuseppe Gipali (Giasone), Annamaria dell'Oste (Glauce), Giorgio Giuseppini (Creonte), Sara Mingardo (Neris), Elena Poesina (première servante), Blandine Staskiewicz (deuxième servante), Frédéric Caton (Un capitaine de la garde). | |
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