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CRITIQUES DE CONCERTS 22 novembre 2024

Récital Schubert du pianiste Paul Badura-Skoda à la salle Gaveau, Paris.

Un grand maître schubertien
© D.R.

C'est son art de la musique que Paul Badura-Skoda, l'un des plus illustres représentants de la tradition viennoise, nous a offert lors de son récital Schubert à Gaveau pour ouvrir la série Piano**** 2005-2006. Tant dans les impromptus que dans les deux dernières sonates, une interprétation qui révèle toute la subtilité de l'univers schubertien.
 

Salle Gaveau, Paris
Le 06/12/2005
Pauline GARAUDE
 



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  • « Avant de jouer, il faut imaginer une belle sonorité Â», a pour coutume de dire Paul Badura-Skoda. Et en effet, sa sonorité est si variée que son jeu est un kaléidoscope de lumières et de climats, une composition en clair-obscur. Schubert ne s'installe jamais dans un climat mais révèle une lumière changeante. Chaque émotion possède sa propre couleur et sa propre lumière. Le timbre, les contrastes francs, la gradation des nuances, le sens du phrasé, sous les doigts de Badura-Skoda, coulent de source et derrière une grande impression de liberté se cache une parfaite maîtrise du clavier et une lecture extrêmement rigoureuse du texte.

    Aux premières mesures du 1er impromptu, on tombe sous le charme du thème dont l'énoncé est à la fois triste et fantaisiste, nimbé d'une lumière blanche, quasi diaphane. Puis les forte vibrent et résonnent, les contre-chants de la main gauche se font graves et profonds. Dans les 2e et 4e impromptus, les arpèges apparaissent comme de la dentelle, mais le plus saisissant est cette impétuosité de la main gauche, d'un caractère parfois quasi démoniaque. Dans le 3e impromptu, c'est toute une ambiance d'au-delà que Badura-Skoda restitue, un Schubert intimiste et indicible. La mélodie se déploie avec calme et plane, dans un legato enveloppant.

    Suivent les Sonates en la majeur et en si bémol, les dernières que Schubert ait écrites, moins de deux mois avant sa mort. Dans la première, si l'Allegro évolue sur une opposition tension-détente, le quatrième mouvement – Allegretto – est peut être celui où le pianiste, grand représentant de la tradition viennoise, aura le plus étonné. Sa façon de marteler les basses, de marquer certains appuis rythmiques, traduisent comme un cri de déchirement, auquel se juxtaposent des passages emplis d'une grâce et d'une simplicité mozartiennes, pour conclure dans une coda joyeuse et scintillante.

    Dans la D. 960, le pianiste autrichien nous transporte dans un univers de sage résignation qui sera celui de toute l'oeuvre. Surtout dans l'Andante sostenuto où la mélodie doucement plaintive s'expose sur des basses timbrées comme des cloches solennelles. Dans le Finale, on retrouve ce caractère un peu fantaisiste et espiègle du thème de l'Allegro de la Sonate en la, et l'on conclut sur un Presto digne d'un feu d'artifices : couleurs éclatantes, octaves plaquées, sonorité pleines.

    Badura-Skoda a une fois de plus conquis l'univers schubertien. Car derrière toute cette richesse, la maîtrise est le maître mot de son jeu. Un jeu qui ne cherche jamais à faire d'effets mais qui exprime tout simplement toute la vie intérieure de Schubert.




    Salle Gaveau, Paris
    Le 06/12/2005
    Pauline GARAUDE

    Récital Schubert du pianiste Paul Badura-Skoda à la salle Gaveau, Paris.
    Franz Schubert (1797-1828)
    Quatre impromptus op. 90, D. 899
    Sonate pour piano en la majeur, D. 959
    Sonate pour piano en sib majeur, D. 960

    Paul Badura-Skoda, piano

     


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