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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 octobre 2024 |
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Nouvelle production de Mazeppa de mise en scène par Peter Stein et sous la direction de Kirill Petrenko à l'Opéra de Lyon.
La vérité dramatique par la musique
Anatoli Kotscherga (Kotchoubeï)
Alors que Paris présente un Don Giovanni détourné à la Défense, Lyon offre une nouvelle production de Mazeppa sous des dehors historicisants. On laissera cependant de côté la mise en scène décevante de Peter Stein pour se délecter d'un niveau musical admirable, où le Kotchoubeï d'Anatoli Kotscherga emporte tout sur son passage.
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Du premier rôle au moindre second couteau, la nouvelle production lyonnaise de Mazeppa affiche un plateau irréprochable. Qu'il s'agisse de la Maria passionnée jusqu'à la folie d'Anna Samuil, jeune fille immature et indécise jusque dans ses demi-teintes, ou du cosaque ivrogne déjanté d'Eberhard Francesco Lorenz, chaque rôle sonne dramatiquement juste.
Mikhaïl Agafonov est un Andreï lumineux et puissant, ténor ardent et juvénile mais suffisamment senti psychologiquement pour ne pas ravir la première place aux véritables personnages masculins de premier plan que sont Mazeppa et Kotchoubeï. Lioubov brisée, épouse et mère prête à se damner corps et âme, Marianna Tarasova, au timbre de mezzo racé et à la projection idéale, offre une incarnation mémorable.
Dans cette distribution remarquable, les qualités vocales des deux rivaux s'ajustent jusqu'à faire parfaitement sens avec le drame. On ne sera ainsi nullement surpris que des deux adversaires, Maria choisisse Mazeppa, car le baryton magnifique, souple et puissant de Wojtek Drabowicz, d'une parfaite égalité, est séduisant et mâle à souhait. Certes moins stylé, Anatoli Kotscherga, à l'émission rugueuse, presque râpeuse et à la projection phénoménale, sidère par sa musicalité brute qui nous vaut un début de II confondant de vérité. La noirceur du pourtant très honorable Orlik de Marek Gasztecki en pâlirait presque en comparaison, car Kotscherga a un art de la caractérisation si marqué que l'on finit par se demander si Kotchoubeï ne devrait pas supplanter Mazeppa comme rôle-titre.
Pour soutenir ce plateau de choix, Kirill Petrenko fait la démonstration d'une direction d'étoffe parfaitement tchaïkovskienne, tour à tour théâtrale, puissante, lyrique et chantante. Si l'ouverture débute un rien en deçà , jamais la tension ne faiblira dans cette lecture aussi ouvragée qu'habitée. Et certainement pas dans des choeurs dont l'excellence et l'impact physique ne sont plus à vanter.
En comparaison, la mise en scène de Peter Stein paraît anecdotique. Porter sur scène un sujet historique pose toujours des problèmes tout à fait spécifiques. Il en est ainsi de Mazeppa comme des opéras de Moussorgski : vaut-il mieux se focaliser exclusivement sur l'événement historique, avec costumes d'époque et les apparats afférents, ou, par l'introduction d'anachronismes, solliciter particulièrement le regard du spectateur, afin que certains aspects du texte saillissent davantage ?
Une mise en scène exsangue
En recourrant à la première méthode – mais d'autres y ont réussi –, Peter Stein ne nous révèle rien d'autre que nous ne connaissions déjà . Ne ressort de ce travail scénique qu'une lecture sèche : si les décors font parfois sens – perspective fermée, presque étranglée, du deuxième tableau pour une maison Kotchoubeï prise en étau après le départ de Maria – ils ne suffisent pas à nourrir un propos exsangue. Une mise en scène dont, fatalement, le seul mérite est de ne pas froisser grand monde.
À l'heure où le metteur en scène est devenu le premier argument de vente dans les grandes maisons d'opéra, cette production reste la preuve rassurante qu'une équipe musicale de choc peut rester à elle seule capable de produire un spectacle de haute tenue.
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Opéra national, Lyon Le 05/02/2006 Benjamin GRENARD |
| Nouvelle production de Mazeppa de mise en scène par Peter Stein et sous la direction de Kirill Petrenko à l'Opéra de Lyon. | Piotr Illitch Tchaïkovski (1840-1893)
Mazeppa, opéra en un trois actes et six tableaux, (1884)
Livret de Viktor Bourénine et du compositeur d'après Pouchkine
Choeurs et Orchestre de l'Opéra de Lyon
direction : Kirill Petrenko
mise en scène : Peter Stein
décors : Ferdinand Wögerbauer
costumes : Anna Maria Heinrich
éclairages : Duane Schuler
chorégraphie : Heinz Wanitschek
préparation des choeurs : Alan Woodbridge
Avec :
Wojtek Drabowicz (Mazeppa), Anatoli Kotscherga (Kotchoubeï), Marianna Tarasova (Lioubov), Anna Samuil (Maria), Mikhail Agafonov (Andreï), Marek Gasztecki (Orlik), Ian Caley (Iskra), Eberhard Francesco Lorenz (Cosaque ivre). | |
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