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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert de l'Orchestre national de France sous la direction de James Conlon, avec la participation du violoniste Leonidas Kavakos au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Fureur et transparence
On ne quitte pas Paris si facilement. Quelque temps après son départ de l'Opéra de Paris, voici James Conlon de retour à la tête du National pour un programme qu'il a conçu en arche. Un goût pour la forme qui n'occultera pas une technique mûrie pour la transparence orchestrale et une main inflexible pour les fureurs dionysiaques.
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Pour ne pas entamer un programme qu'il veut cohérent, James Conlon a demandé au public de ne pas applaudir en première partie. Son art du contraste et de la transition n'en apparaîtra qu'avec plus d'évidence à travers une forme en arche quasiment menée dans ses moindres contours.
Marquée par des cuivres puissants, la pièce aux réminiscences multiples que constitue Tuning-up sidère par ses fureurs dionysiaques, sa paradoxale cohésion au gré d'un discours éparpillé, ponctué par un la de référence, obstinément réitéré et annonçant déjà l'atmosphère des Pièces sur une note seule de Scelsi. C'est que le son orchestral prend toute son ampleur sous la baguette d'un Conlon des grands soirs, conduisant âprement l'ouvrage d'une seule bourrasque, jouant tant sur le coloris que sur la puissance de l'expression.
Suit un Scherzo fantastique de Stravinski dans lequel le chef américain fait preuve de qualités tout à fait opposées, en s'attachant à ciseler dans la transparence le joyau miroitant de l'élève de Rimski-Korsakov, de sorte à en faire ressortir le moindre détail : la partition d'une infinie richesse sonne alors avec autant de naturel que les saturations dans Varèse tombaient sous le sens, mais aussi avec une clarté et une limpidité exemplaires qui font remarquablement pendant au discours dense et sans concession du compositeur franco-américain.
Centre de ce programme en miroir, comme l'a lui-même conçu Conlon, le Prélude à l'après-midi d'un faune de Debussy transcrit par Schoenberg demeure toutefois moins intéressant. Si le chef retrouve à travers le crible viennois la respiration debussyste et recrée un certain climat, il s'approprie moins bien cette troublante poésie à la moiteur sensuelle. Qu'importe ! Les applaudissements viennent témoigner d'une première partie tout à fait bien menée, mariant des écritures fondamentalement différentes.
L'une des lames les plus fines du moment
Mais l'intérêt musical apparaît avec encore plus d'acuité en seconde partie. Si Leonidas Kavakos évacue tout russisme de l'écriture violonistique du Concerto en ré de Stravinski, son jeu n'en demeure pas moins exceptionnel par sa beauté et sa souplesse, conférant à l'ensemble une touche aérienne de premier ordre. Stravinski sonne alors avec une évidence rhétorique servie par une précision imparable, où l'archet de Kavakos s'impose comme une des lames les plus fines du moment. Impression que vient confirmer en bis un Bach d'une pureté sonore irréprochable.
Le concert se clôt comme il s'ouvre, avec un degré supplémentaire dans l'aboutissement. L'orchestre national de France joue de ses timbres acérés, métalliques, pour des Amériques de Varèse assumées dans la démesure et bénéficiant d'une mise en place propre à rivaliser avec les plus grandes phalanges internationales. Scintillements du glockenspiel, cuivres implacables, acidité des cordes dans les trémolos sul ponticello, timbres sourds et perçants dressent un état des lieux non exhaustif d'une lecture qui sera la pierre de touche de ce concert en arche, entre fureur et transparence.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 02/03/2006 Benjamin GRENARD |
| Concert de l'Orchestre national de France sous la direction de James Conlon, avec la participation du violoniste Leonidas Kavakos au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Edgar Varèse (1883-1965)
Tuning-up (1946)
Ébauches complétées par Chou Wen-Chung en 1998
Igor Stravinski (1882-1971)
Scherzo fantastique pour orchestre, op. 3 (1909)
Claude Debussy (1962-1918)
Prélude à l'après-midi d'un faune
Transcription d'Arnold Scoenberg (1921)
Igor Stravinski (1882-1971)
Concerto pour violon et orchestre en ré majeur (1931)
Leonidas Kavakos, violon
Edgar Varèse (1883-1965)
Amériques (1922)
Version originale, révision de Chou Wen-Chung
Orchestre national de France
direction : James Conlon | |
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