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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Version de concert du Roi pasteur de Mozart par les Folies Françoises sous la direction de Patrick Cohën-Akenine au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
La noblesse du pastoureau
SĂ©bastien Droy
L'année Mozart restera la meilleure occasion de redécouvrir de petits ouvrages lyriques jamais joués, comme ce pétillant Rè pastore en version de concert que le Théâtre des Champs-Élysées avait confié à Patrick Cohën-Akenine et ses Folies Françoises, avec une distribution inégale dont se détache l'authentique tenore di grazia du jeune Sébastien Droy.
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Sitôt rentré du carnaval de Munich où la Finta giardiniera n'a connu qu'un succès d'estime, Mozart se voit commander par l'Archevêque Colloredo une festa teatrale pour le passage à Salzbourg en avril 1775 de l'archiduc Maximilien-Franz, dernier fils de l'impératrice Marie-Thérèse, de retour d'une visite à Versailles. Le livret imposé, de l'incontournable Métastase, a déjà été mis en musique deux décennies plus tôt par des pointures comme Hasse ou Gluck. Le jeune Mozart boucle alors dans l'urgence sa commande en moins de cinq semaines.
À l'exception notable d'Idoménée presque six années plus tard, le prodige de Salzbourg ne recevra plus la moindre commande opératique avant son installation à Vienne. Le Roi pasteur demeure donc son ultime opus lyrique « de jeunesse » – la première rédaction de Thamos remonte à 1773 et Zaïde demeurera inachevé – où triomphent l'esprit galant et la mode manifeste du style concertant jusque dans la vocalité. Mozart en prisait d'ailleurs assez la musique pour en extraire par la suite plusieurs numéros remis au goût du jour.
L'orchestre des Folies Françoises de Patrick Cohën-Akenine affiche une belle vigueur, un entrain qui sied au mieux à cette sérénade arcadienne sans prétention mais souvent touchée par la grâce. Sonorités idoines – des vents particulièrement colorés –, tempi vifs, parfois au détriment de la netteté de l'articulation – premier air d'Alessandro un peu à court de superbe dans l'accompagnement dévolu à l'entrée du monarque –, les musiciens témoignent en tout cas d'une bonne humeur et d'une vitalité qui ne s'essoufflent à aucun moment de ces deux heures de musique.
La distribution affiche quant à elle des réussites plus diverses. L'Aminta de Céline Ricci, agile, volontaire, expressif, pâtit d'une émission serrée et pointue, et d'une couleur trop à la française – jusque dans la réalisation des trilles aux cadenze. Annoncée victime d'un refroidissement, Sandrine Piau n'en est pas moins une Elisa au fort tempérament. La pureté du timbre comme du style sont seulement entachées par des vocalises raides et trémulantes, et un recours trop fréquent à des sons détimbrés. Tous deux réservent quoi qu'il en soit un pétillant duo final de premier acte.
On remarquera surtout l'Agenore lumineux de Sébastien Droy, voix saine, timbre de tenore di grazia comme on n'en entend que trop rarement de nos jours, mezza-voce rappelant souvent celle d'un Michael Schade. L'instrument est homogène, le phrasé souple, la couleur suave. Comment ne pas non plus savourer les joliesses de la Tamiri vif-argent de Sophie Karthäuser, émission soignée, vocalises jamais heurtées, toujours sur le souffle – Di tante sue procelle –, deux en deux d'une rare élégance – Se tu di me fai dono ?
La déconvenue de l'Alessandro de Paul Agnew n'en paraît que plus cruelle. Si le style, le texte, la vélocité sont toujours là , la voix apparaît usée jusqu'à la corde, privée de toute séduction. Pas une valeur longue tenue jusqu'au bout de sa durée, une ligne de chant lacunaire, une émission engorgée et éteinte qui ne saurait rendre justice à l'étoffe royale du héros macédonien.
Il en fallait toutefois plus pour grever une soirée qui aura malgré quelques avatars permis au Roi pasteur d'acquérir ses lettres de noblesse.
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