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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Première à l'Opéra de Lyon d'Alcina de Haendel dans la mise en scène de Jossi Wieler et Sergio Morabito, sous la direction d'Alessandro de Marchi.
Du mauvais côté du miroir
Peu de spectacles d'opéra donnent l'envie irrépressible de fuir en hurlant à la mort, avant de sombrer dans l'ennui le plus affligé. L'Alcina importée de Stuttgart à l'Opéra de Lyon est de ceux-là , qui dévoie la plus sublime des musiques, fort passablement servie par Alessandro de Marchi et un plateau vocal souvent inadéquat, par son goût du sordide.
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La grande et belle idée de Jossi Wieler et Sergio Morabito pour Alcina est un miroir où se succèdent au rythme des inconscients visions fantasmées, cauchemardesques, ou simples reflets. Car l'opéra le plus magique de Haendel se nourrit des tours et détours de l'apparence, en travestissements et ambiguïtés sexuelles, sur lesquelles les deux metteurs n'en finissent pas d'insister, jusqu'à basculer du mauvais côté du miroir.
Sordide est en effet le palais de la magicienne, avec son papier peint crasseux – Anna Viebrock oblige – et ses accessoires épiques entassés dans un coin. Et plutôt que de retenir l'amoureux transi comme le spectateur par ses charmes, lieu de beauté et de délices, ses éclairages indiscrets, son insécurité palpable les invitent à la fuite.
Ici, on règle ses comptes, on tire à bout portant – mains gantées, pour ne point laisser de traces, c'est là la sagesse de Melisso, tuteur de Bradamante –, on fait l'amour sans restriction ni pudeur, puisque sans cesse on se déshabille. Et, poncif ultime de la mise en scène soi-disant moderne, Alcina abandonnée boit ! Voici donc la femme fatale, qui par chaque tenue, toujours noire, dévoile une parcelle de son anatomie, alors que chacun peut satisfaire ses fétichismes, avec une prédisposition marquée pour les pieds, les escarpins même, qu'on les lèche ou les déchiquette.
C'est insupportable, exécrable d'agitation gratuite, mais surtout que de talents, d'énergies gâchés. Car dans ce cloaque, les tensions sont violentes, les passions vécues par des acteurs convaincus et formidablement dirigés, à tel point que le chant s'en trouve parfois sacrifié. Ceci vaut surtout pour le Ruggiero de Stéphanie d'Oustrac, abîmé dans ses névroses, dont la ligne insuffisamment sereine menace à chaque instant de rompre, d'autant que, virtuose et galbée, sinon variée dans ses couleurs, la voix accuse plus que des faiblesses aux extrêmes.
Et dire qu'Ann Hallenberg, le plus formidable Ruggiero de sa génération, doit se contenter ici des ardeurs vengeresses de Bradamante, moins évidente de tessiture, mais dont elle ne fait qu'une bouchée, de son chant irréprochable et toujours opulent.
Plastique avantageuse, tempérament incendiaire, format démesuré, Catherine Naglestad est une Alcina hors norme, qui se doit de composer avec une pâte vocale souvent épaisse sans y parvenir tout à fait. Elle n'en déploie pas moins des ressources dynamiques et chromatiques étonnantes, couronnées par un aigu tranchant, où le bel canto cède la place à l'expressionnisme de cette future Salomé.
La Morgana geignarde, à l'agilité aléatoire et au suraigu écorché de Cyndia Sieden, l'Oronte seulement nasal de Mirko Guadagnini, l'Oberto encore très vert de Katherine Rohrer, et le Melisso pesant de Tómas Tómasson n'en font que plus pâle figure, si peu animés par la direction aride d'Alessandro de Marchi, ennemi de la respiration et de la courbe belcantiste. Il est vrai que le chef italien doit sans cesse veiller sur un Orchestre de l'Opéra de Lyon plus inapproprié que rebelle, auquel sa raideur chronique et ses défaillances d'intonation interdisent l'entrée du palais des délices haendéliens.
Une Alcina Ă oublier, pour peu que l'on tienne Ă ne pas l'Ă©viter.
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Opéra national, Lyon Le 14/05/2006 Mehdi MAHDAVI |
| Première à l'Opéra de Lyon d'Alcina de Haendel dans la mise en scène de Jossi Wieler et Sergio Morabito, sous la direction d'Alessandro de Marchi. | Georg Friedrich Haendel (1685-1759)
Alcina, opera seria en trois actes (1735)
Livret d'après Orlando furioso de l'Arioste
Orchestre de l'Opéra de Lyon
direction : Alessandro de Marchi
mise en scène : Jossi Wieler et Sergio Morabito
décors et costumes : Anna Viebrock
Ă©clairages : David Finn
Avec :
Catherine Naglestad (Alcina), Stéphanie d'Oustrac (Ruggiero), Cyndia Sieden (Morgana), Ann Hallenberg (Bradamante), Mirko Guadagnini (Oronte), Tómas Tómasson (Melisso), Katherine Rohrer (Oberto), Jean-François Gay (Astolfo). | |
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