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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Messe de Chimay de Cherubini sous la direction de Riccardo Muti en ouverture du Festival de Saint-Denis 2006.
La grande tradition au service de Cherubini
L'ONF et les Choeurs de Radio-France, le maestro Muti au pupitre, la musique éloquente de Cherubini servie par trois solistes d'ampleur internationale : même s'il s'ouvre désormais à des rivages lointains – à venir, entre autres, un hommage à Istanbul –, le festival de Saint-Denis a pour son concert d'ouverture joué sur une oeuvre rare défendue par des valeurs sûres.
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Ce n'est pas une nouveauté, dans l'immense vaisseau de la basilique des rois de France, l'acoustique n'a jamais été une préoccupation essentielle. Comme dans la plupart des édifices religieux, le son tournoie dans comme dans un énorme chaudron, et une intense réverbération donne presque la berlue. Cela posé, on peut apprécier pour ce qu'elle est, et finalement en des lieux appropriés à une oeuvre sacrée, une partition rarissime : la Messe de Chimay, écrite par Luigi Cherubini en 1808, dans une période riche et troublée, à la charnière de la Révolution, de l'Empire et de la Restauration, par un Italien francophile devenu la plus importante figure musicale du Paris napoléonien.
Voilà une pièce liturgique qui a tout, elle-même, d'un étonnant maëlstrom. À un Kyrie solennel et recueilli succède l'éloquence véhémente d'un Gloria qui n'hésite pas à prendre des libertés avec le sens du texte de l'ordinaire, introduisant un Qui tollis pour le moins dramatique. Dans le Credo, le Sanctus, le bref Benedictus et l'Agnus Dei passent successivement les fantômes d'un XVIIIe siècle brusquement chaviré, délicatesses de violons et de vents abîmés dans les fracas révolutionnaires, pompe et circonstance napoléonniennes, orages et langueurs d'un romantisme encore dans son adolescence.
La superbe démonstration de Riccardo Muti
Avec une telle richesse, une telle profusion quasi berliozienne entre les mains, Riccardo Muti fait évidemment des merveilles. Dirigeant de son geste souple et presque langoureux les forces d'un National au grand complet, d'un Choeur de Radio France toujours impeccable, sans s'émouvoir un instant des échos de la basilique, l'Italien donne une superbe démonstration de ce que peut être la grande tradition symphonique quant elle est défendue par l'un de ses meilleurs champions.
La basse puissante et racée d'Ildebrando d'Arcangelo rend justice à la lyrique profonde de l'oeuvre, toujours dialoguant avec le soprano angélique de Ruth Ziesak. Légèrement en retrait, le ténor Herbert Lippert manque de puissance, d'éclat et de rondeur pour tenir son rang dans un concert où toute chose – le lieu, l'orchestre, les voix, l'oeuvre elle-même – prend des dimensions exceptionnelles.
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Basilique, Saint-Denis Le 30/05/2006 Anne-Béatrice MULLER |
| Messe de Chimay de Cherubini sous la direction de Riccardo Muti en ouverture du Festival de Saint-Denis 2006. | Luigi Cherubini (1760-1842)
Messe de Chimay (1808)
Ruth Ziesak, soprano
Herbert Lippert, ténor
Ildebrado d'Arcangelo, basse
Choeur de Radio France
Orchestre national de France
direction : Riccardo Muti | |
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