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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Récital du pianiste Piotr Anderszewski dans le cadre des concerts Jeanine Roze Production au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Un alchimiste du piano
En invitant Piotr Anderszewski dans sa série de concerts de la saison 2005/2006 au TCE, Jeanine Roze a eu la main heureuse. L'originalité de ce pianiste inventif et volontiers rebelle peut dérouter par ses choix interprétatifs qui sortent des sentiers battus mais qui ne laissent jamais indifférents.
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Piotr Anderszewski a incontestablement une tête bien faite et des moyens pianistiques à la hauteur de ses intentions. Son univers sort volontiers d'un moule qui banalise l'approche du clavier de Mozart au nom de la perfection et d'une certain authenticité, quitte parfois à donner l'impression de surjouer et d'attacher de l'importance autant à la rhétorique qu'au moindre détail.
L'opposition des contrastes dans les mouvements rapides (Molto allegro et Assai allegro de la 14e sonate en ut mineur K. 457), la sophistication expressive mais toujours contrôlée de la sublime Fantaisie en ut mineur K. 475 s'écartent du classicisme simple et pur, auquel d'autres interprètes nous ont convié – Gieseking, Gulda, Badura-Skoda, Barenboïm, Pirès
À la légèreté et à la grâce aristocratique répondent un sens tragique de la vie – malgré un certain détachement quelque peu pervers – et une grandeur majestueuse de la conception. Le piano de Piotr Anderszewski dompte l'instrument avec une violence, une réflexion hautaine quasi beethovéniennes, où la vision introspective sans austérité bouleverse les visions tièdes, moroses et plus conformistes.
Sans oser dans les 6 bagatelles de Beethoven une provocation destructrice (comme le faisait Gould), le soliste donne de ces pièces brèves, intenses, roboratives, une vision très décapante où la vivacité, l'alacrité, l'opposition des contrastes emportent l'adhésion. L'architecture de l'opus 110 comme la conduite du discours n'ont plus de secret pour celui qui s'est déjà confronté, au concert et au disque, à l'Himalaya des Variations Diabelli.
Raison analytique et sensualité du chant
Concentré, tendu comme un arc, il s'élève au fur et à mesure de la progression de l'oeuvre vers des sommets où la raison analytique et cérébrale rejoint la sensualité du chant – Adagio ma non troppo – avec une maîtrise et un dosage des sonorités proches de Michelangeli auquel il voue une admiration sans partage.
Le public est séduit par ce récital conduit de bout en bout avec une aisance et une assurance sans faille. S'il n'est pas systématiquement convaincu par les choix de ce pianiste atypique et parfois déroutant, il n'en a pas moins le sentiment, l'espace d'un instant, d'avoir été plus intelligent.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 29/05/2006 Michel LE NAOUR |
| Récital du pianiste Piotr Anderszewski dans le cadre des concerts Jeanine Roze Production au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Sonate n° 14 en ut mineur K. 457
Fantaisie en ut mineur K. 475
Ludwig van Beethoven (1770-1827)
6 Bagatelles op. 126
Sonate n° 31 en lab majeur op. 110
Piotr Anderszewski, piano | |
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