|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
|
Nouvelle production de la Finta Giardiniera de Mozart mise en scène par Doris Dörrie et sous la direction d'Ivor Bolton au festival de Salzbourg 2006.
Salzbourg 2006 (12) :
Les joies du jardinage
Spectacle gentiment décapant et toujours amusant que cette Finta Giardiniera de Doris Dörrie se déroulant dans la réserve d'un Jardiland autrichien. Du rythme, des gags qui font mouche, une direction drue et un plateau remarquable ; de quoi entamer la dernière ligne droite de Salzbourg 2006 dans les meilleures conditions.
|
|
Bons baisers d’Eltsine
RĂ©gal ramiste
L'Étrange Noël de Mrs Cendrillon
[ Tous les concerts ]
|
Grand succès auprès d'un public salzbourgeois pourtant pas vraiment friand de transpositions que cette Finta Giardiniera mise en scène par Doris Dörrie au Landestheater. Déjà auteur d'un Così fan tutte hippie à l'Opéra de Berlin, l'Allemande plante le décor de sa Finta dans la réserve d'un magasin de jardinage, et use de toutes les ressources possibles – l'arrivée de Belfiore sur un chariot Fenwick ; les rapports de séduction employée-patron de Serpetta et Don Anchise ; la rixe à la pelle, à la pioche et au râteau au Finale du I ; l'énorme tourterelle claquant du bec sur la ligne de chant de Sandrina ; la plante carnivore qui en donne à recoudre au Comte ; l'araignée géante dans la scène nocturne.
Ramiro est un jeune amoureux révolté à tendance gothique, Serpetta la petite peste irrésistible après qui soupirent tous les employés masculins, Sandrina la Comtesse standard, pas même fichue d'utiliser une colleuse d'étiquettes. Pendant l'ouverture, une courte scène rappelle, dans un espace XVIIIe au sein du décor contemporain, la dispute entre Belfiore et Violante préliminaire à l'intrigue et se terminant par le fameux assassinat raté. Puis l'action à proprement parler peut commencer, et dès lors le lit du crime, à saisir pour quelques centaines d'euros, se voit attribuer une étiquette « Rokoko-Bett ».
Beaucoup d'imagination, de rythme, d'astuces et de gags pour maintenir l'intérêt d'une partition qui tend à s'essouffler, mais aussi une mise en scène qui parvient à démêler au mieux les fils d'une intrigue passablement emberlificotée, et qui ne perd jamais de vue les enjeux moins souriants, plus amers de cet opera buffa d'un Mozart de 18 ans, même si l'on reste évidemment bien loin des ambiguïtés marivaudiennes de Così.
La distribution, d'une remarquable homogĂ©nĂ©itĂ©, est seulement dĂ©pareillĂ©e par la Sandrina sans grâce d'Alexandra Reinprecht, voix dure et Ă©mission peu soignĂ©e. Car le reste du plateau frĂ´le le tableau d'excellence : PodestĂ sonore et d'aigu conquĂ©rant de John Graham Hall ; Belfiore di grazia de John Mark Ainsley ; Arminda magnifiquement en voix de VĂ©ronique Gens ; Serpetta mutine d'Adriana Kučerová ; Ramiro sensuel et rayonnant – l'aigu – de Ruxandra Donose ; Nardo Ă©blouissant de Markus Werba, dont on se demande comment, avec de pareils moyens, il ne laisse pas une empreinte plus profonde en Papageno.
Dans la fosse exiguë du Landestheater, Ivor Bolton défend un Mozart dru, parfois roide mais toujours roboratif, servi par les cordes aux coups d'archet tranchants d'un Orchestre du Mozarteum dans son jardin. Et si la formation salzbourgeoise sonne beaucoup, avec un impact rythmique toujours fort, ce n'est jamais au détriment d'un plateau qui a les moyens de se faire entendre. Quel confort en tout cas à notre époque de grands vaisseaux qu'un opéra de Mozart dans une salle à taille humaine !
Un spectacle parmi les plus réussis de l'année Mozart à Salzbourg, un bonheur sans nuage dans une fin de festival pourtant copieusement arrosée et aux airs de Toussaint.
| | |
| | |
|