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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert de l'Orchestre de Paris sous la direction de Frédéric Chaslin, avec la participation du violoncelliste Xavier Phillips à la salle Pleyel, Paris.
Quatre hommages et un enterrement
Frédéric Chaslin
Si le concert qui devait être dirigé par Armin Jordan mort le matin même et remplacé par le français Frédéric Chaslin, a été le lieu d'un hommage ému au grand chef suisse, la soirée n'en a pas moins été décevante tant l'Orchestre de Paris, sans doute affecté par l'événement, s'est montré, tantôt éteint, tantôt d'une perfection sèche et glacée.
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On savait déjà depuis presque une semaine que Frédéric Chaslin remplacerait ce soir Armin Jordan, victime d'un malaise la semaine dernière. Pourtant, lorsque Georges-François Hirsch, le directeur général de l'Orchestre de Paris, monte sur scène, la nouvelle vient de tomber dans l'après-midi : Armin Jordan est mort. Le public, invité à se lever, respecte une minute de silence, et le concert est dédié à la mémoire du grand chef suisse.
La première oeuvre inscrite au programme – inchangé – est le Prélude à l'après-midi d'un faune de Debussy. On se souvient de l'excellent debussyste qu'était Armin Jordan. C'est ainsi que la flûte de Vincent Lucas devient naturellement un hommage au musicien disparu. Ravel lui-même ne disait-il pas vouloir être enterré au son de cette musique ? Si les solistes laissent échapper des bouffées somptueuses de musique, très vite, l'interprétation paraît manquer de ligne d'ensemble, de souffle, d'intensité.
Même constat pour la pièce suivante : le concerto pour violoncelle Tout un monde lointain de Dutilleux, d'après des poèmes de Baudelaire. L'orchestre, étrangement éteint, ne scintille pas des prodiges d'imagination que l'orchestration pourtant recèle. Le constat est d'autant plus douloureux que, si Xavier Phillips privilégie une interprétation moins soucieuse d'humanité que de virtuosité, le chef ne l'aide pas dans cette vision originale qui consisterait à jouer ce concerto pratiquement comme un concerto romantique. En l'état, loin de l'envoûtement digne d'une expérience mystique que procurent d'autres lectures, le « monde lointain » devient le lent cauchemar d'un violoncelle trop charnu.
Les rares Épigraphes antiques de Debussy
Après l'entracte, l'Orchestre de Paris aborde les rares Six épigraphes antiques de Debussy orchestrés par Ansermet. Cette pièce pour deux pianos, qui développe une musique de scène écrite en 1900, appartient aux dernières années de la vie de l'auteur de Pelléas. On peut se demander pourquoi l'oeuvre est si rarement donnée, car tout Debussy y est : celui des premiers opus – l'insouciance de la Suite bergamasque, la légèreté de la Damoiselle élue – mais également le Debussy sardonique et macabre de la dernière période. Si l'orchestration d'Ansermet semble trop chargée, on prend plaisir à entendre l'Orchestre de Paris dans une musique aussi légère et naïve.
Dans la Rhapsodie espagnole de Ravel qui conclut la soirée, la formation fait à nouveau étal de sa science des alliages et de son assurance, notamment dans une excellente Malaguena où pourtant la direction plus brutale qu'inspirée de Frédéric Chaslin ne construit un discours que par à -coups. L'éclatante Feria conclusive sera redonnée en bis après que le chef a une dernière fois rendu hommage à Armin Jordan, cet homme qui « aimait la vie ».
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Salle Pleyel, Paris Le 20/09/2006 Laurent VILAREM |
| Concert de l'Orchestre de Paris sous la direction de Frédéric Chaslin, avec la participation du violoncelliste Xavier Phillips à la salle Pleyel, Paris. | Claude Debussy (1862-1918)
Prélude à l'après-midi d'un faune
Henri Dutilleux (*1916)
Tout un monde lointain, concerto pour violoncelle et orchestre
Xavier Phillips, violoncelle
Claude Debussy (1862-1918)
Six épigraphes antiques
Orchestration d'Ernest Ansermet
Maurice Ravel (1875-1937)
Rhapsodie espagnole
Orchestre de Paris
direction : Frédéric Chaslin | |
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