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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Premier des trois concerts de la Staatskapelle Berlin sous la direction de Daniel Barenboïm dans le cadre de Piano**** au Théâtre du Châtelet, Paris.
Splendeur orchestrale
Le premier des trois programmes de la Staatskapelle Berlin dans la série Piano**** au Châtelet a soulevé un juste enthousiasme. L'intérêt des approches de Mozart et de Mahler n'a d'égal que la somptueuse qualité instrumentale de la formation germanique et celle du toucher pianistique de Daniel Barenboïm.
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Il n'y a pas à dire, dès que l'on entend un orchestre s'accorder, on sait déjà quelle sera sa sonorité. À peine cette formation qui est celle de la Staatsoper Unter den Linden et dont Daniel Barenboïm est depuis 1992 chef à vie avait elle « accordé ses violons » que l'oreille était déjà séduite par sa sonorité. Impression largement confirmée tout au long de cette soirée comportant deux parties pourtant bien différentes.
Chef et soliste du 23e concerto pour piano de Mozart, Daniel Barenboïm joue sur du velours, dans un répertoire qu'il maîtrise presque depuis l'enfance. Au piano, il est toujours un interprète inspiré, qui donne l'impression de recréer plutôt que de reprendre une partition qu'il connaît. Il ne joue jamais la même oeuvre exactement pareil, sans que l'on sache vraiment s'il s'agit de l'inspiration du moment ou du résultat d'une évolution toujours en marche.
Son Mozart a aujourd'hui une subtilité de toucher et une profondeur de pensée qui semblent couler de source. Ici, le dessin du phrasé, l'invention qui préside à l'accentuation, la nature même du toucher juste assez présent, juste assez distancié, tout contribue à créer l'atmosphère plutôt ludique et sereine de cette partition contemporaine des Noces de Figaro. Et quelle beauté que le son des clarinettes de cet orchestre !
Autre univers et autre voyage que celui proposé par la 7e symphonie de Gustav Mahler, l'une de ces partitions monumentales qui commencent par vous effrayer un peu et dont on ne voudrait finalement plus sortir. Œuvre complexe, cette vaste partition frappe par ses contrastes, dus notamment à la présence de ces deux Nachtmusik et apportant, sous deux formes différentes, quelques moments d'apaisement à la tourmente des trois autres mouvements. Et puis, après le climat sombre, voire angoissé du premier mouvement et du Scherzo, c'est dans une sorte de joie forcée et à peine crédible que se déroule l'imposant Finale.
Comme dans Mozart, Barenboïm apporte aujourd'hui à ce répertoire postromantique une expérience et une réflexion qu'il n'avait pas toujours lorsqu'il le pratiquait avec l'Orchestre de Paris à la fin des années 1970. Mais trente ans ont passé, et la culture musicale de la Staatskapelle Berlin n'est pas celle de nos musiciens parisiens ; leur sonorité non plus.
Car ici, on ne sait qu'admirer le plus de l'harmonie, du quatuor ou de la percussion, voire des harpes. Tout est superbe, que l'on parle de l'interprétation des multiples passages à découvert de tel ou tel pupitre, de tel ou tel soliste, ou de la qualité sonore de chacun comme des ensembles. Il y a là une osmose, un investissement aussi bien collectif que personnel, une fusion avec les intentions du chef dont la gestique reste un exemple de sobriété efficace, qui ne peuvent que forcer l'admiration et engendrer la plus vive satisfaction.
Une 7e de Mahler lucide et pleine d'élan
Barenboïm va bien au fond des intentions d'une musique souvent contradictoire, presque trop riche aussi pour qu'on puisse la cerner sous tous ses aspects. Il est des lectures où le rêve a plus de place. Celle-ci emporte l'adhésion par sa lucidité, ses superbes élans, sa concentration, sa clarté et vision d'ensemble totalement cohérente qui tient néanmoins compte de la diversité d'écriture de chaque partie.
Comme le disaient certains avant le concert, la Staatskapelle Berlin n'est pas la Philharmonie de Berlin. Certes, mais elle se situe dans la même tradition instrumentale et dans la même culture musicale, et le travail régulier effectué depuis maintenant une quinzaine d'années avec Barenboïm est évident.
Comment alors ne pas attendre avec impatience les deux autres concerts qui auront pour solistes des personnalités aussi diamétralement opposées que celles de Lang Lang et Radu Lupu ?
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Théatre du Châtelet, Paris Le 23/10/2006 Gérard MANNONI |
| Premier des trois concerts de la Staatskapelle Berlin sous la direction de Daniel Barenboïm dans le cadre de Piano**** au Théâtre du Châtelet, Paris. | Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Concerto pour piano n° 23 en la majeur, K. 488
Daniel Barenboïm, piano
Gustav Mahler (1860-1911)
Symphonie n° 7 en mi mineur
Staatskapelle Berlin
direction : Daniel Barenboïm | |
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