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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Intégrale des quatuors à cordes de Chostakovitch par le Quatuor Danel à la salle Cortot, Paris.
Quatuors de titan
À l'occasion du centenaire Chostakovitch, le quatuor Danel finit cette année anniversaire par une intégrale des quatuors à cordes salle Cortot. Un projet titanesque en cinq séances, où le quatuor français confirme à la suite de son récent enregistrement l'excellence et l'authenticité de son jeu chostakovien, dans une salle malheureusement clairsemée.
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Ce qui s'est imposé comme un des événements musicaux majeurs de cette fin d'année à Paris n'aura malheureusement pas attiré les foules. À quelques jours des fêtes de fin d'année, les Parisiens semblent bouder les concerts matinaux sans doute au profit d'activités plus prosaïques. Une intégrale des quatuors de Chostakovitch par les Danel a pourtant de quoi susciter autant d'intérêt sinon plus que l'intégrale des symphonies par l'Orchestre national, car les quatre Français s'imposent comme les légataires des éminents Quatuors Borodine et Beethoven, qui ont chacun travaillé avec Chostakovitch.
Un cachet sonore d'une incroyable authenticité, un jeu racé alliant une technique magistrale à une musicalité idéale : peu de quatuors actuels peuvent se targuer d'incarner de manière aussi sentie toute la tradition d'un jeu et le témoignage musical d'une époque, tout en ayant leur propre personnalité et en intégrant les données interprétatives que seule une fréquentation assidue de la musique contemporaine peut faire acquérir.
Si on laisse de côté le concert de samedi soir dans lequel une certaine fatigue et un manque de conviction se font sentir – mais qui pourrait le reprocher vu l'ampleur du défi ? –, le brio interprétatif des Danel ne cessera de s'affirmer jusqu'à la dernière note du 3e quatuor clôturant ce cycle. C'est ainsi qu'ils dépassent parfois en perfection même les Borodine. On donnera pour exemple le 11e quatuor dans lequel on apprécie une science du timbre et un parachèvement incroyable du moindre phrasé, les Danel jouant sur le contraste entre des textures lisses et transparentes et un son massif, dense, révélateur d'une certaine manière d'accrocher la corde ; des qualités qui donneront même à des pièces plus secondaires – le 1er, le 6e quatuor – une véritable fraîcheur.
Les quatuors plus dramatiques apparaissent quant à eux toujours charpentés au moyen de contrastes forts, d'une puissance sidérante dans les scherzi, d'une manière de trancher dans le vif rappelant le déchaînement du Quatuor Beethoven, de pizzicati d'une précision incroyable, d'un chant intense et déchirant allant de la plus grande fragilité au lyrisme le plus effervescent, toujours parfaitement senti en fonction de la nécessité dramatique du moment.
On reste hébété devant tant de maîtrise et d'exigence, devant une matière sonore si incandescente servant idéalement des oeuvres titanesques ; et on se dit que décidément, les absents ont une fois de plus toujours tort.
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Salle Cortot, Paris Le 17/12/2006 Benjamin GRENARD |
| Intégrale des quatuors à cordes de Chostakovitch par le Quatuor Danel à la salle Cortot, Paris. | Dimitri Chostakovitch (1906-1975)
Intégrale des quatuors à cordes
Quatuor Danel
Marc Danel, violon I
Gilles Millet, violon II
Vlad Bogdanas, alto
Guy Danel, violoncelle | |
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