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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Reprise des Contes d'Hoffmann d'Offenbach dans la mise en scène de Robert Carsen, sous la direction de Marc Piollet à l'Opéra de Paris.
Une bien maigre reprise
Encore une reprise décevante aux moyens trop justes. Entre la direction colorée mais sans ossature rythmique de Marc Piollet et un plateau médiocre où Rolando Villazón plus qu'aucun autre déçoit dans le rôle-titre, la mise en scène de Robert Carsen continue de fasciner et de donner aux Contes d'Hoffmann leurs lettres de noblesse.
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Souvent dans le monde lyrique, les reprises des grands spectacles sont l'occasion d'une perte de prestige. C'est le cas de ces Contes d'Hoffmann parisiens inaugurés en 2000, repris en 2001 et 2002 et à nouveau programmés à l'Opéra Bastille, avec une distribution cette fois sans éclat.
Côté féminin, Annette Dasch affiche un matériau somptueux, un français remarquable, une ligne généreuse quoique de vocalité un peu lourde, vite contrainte à donner du volume pour ne pas se mettre en péril. Elle reste cependant une Antonia des plus touchantes, fine musicienne et crépusculaire dès son entrée en scène.
Patricia Petibon est une impayable Olympia, drôle comme peu d'autres, épatante dans son numéro de quasi improvisation, jouant tout sur le scénique pour masquer que les aigus, pincés et vrillants au-delà de l'imaginable, sont d'une voix passée à d'autres emplois. Nancy Fabiola Herrera est quant à elle une Giulietta tout à fait négligeable, Ekaterina Gubanova une Muse et un Nicklausse très présents – parfois trop sombrés –, de belle santé vocale et de diction stupéfiante quand on sait que la mezzo ne parle à la ville pas un mot de français.
Chez les hommes, guère plus de prestations décisives. Christoph Homberger n'a rien du ténor de caractère exigé par les quatre valets et reste empêtré dans une vocalité mastodonte. Sans doute gêné par la tessiture grave des quatre personnages diaboliques, Franck Ferrari, à son avantage dans le seul Docteur Miracle, peine à faire rayonner sa noirceur, voix peu projetée, métal terni, élocution moyenne dans la piena voce, mais surtout incarnations un rien monocordes, sans vraie différenciation ni variété des couleurs, alors qu'en Crespel et Spalanzani, Alain Vernhes et Christian Jean demeurent les hérauts de la tradition du chant français, diction et style irréprochables.
La plus grande déception vient toutefois de l'Hoffmann de Rolando Villazón, qui en fait des tonnes et chante pourtant ce soir gris et sourd – Kleinzach –, sans harmoniques aiguës – les Couplets bacchiques –, qui intonne constamment trop haut les tenues et expose une italianità – les points d'orgue, les ports de voix, les sanglots –, une diction fruits d'un impossible laisser-aller.
La direction de Marc Piollet, de couleur éminemment française, tout en légèreté de touche, en finesse du galbe instrumental, en soudains éclats des cuivres et de la percussion, se voit grevée par une mise en place d'une indécrottable imprécision. Monté sur ressorts et donc dénué de toute assise, le chef français n'engendre que fébrilité et décalages, jusque dans des choeurs proches de l'arythmie.
Mais la mise en scène de Robert Carsen n'a rien perdu de son intelligence, de son acuité, de sa capacité à faire des Contes d'Hoffmann un grand opéra de répertoire, noble, sérieux, loin de la bluette faubourienne trop souvent confiée aux magnats de l'opérette. La mise en abyme chère au Canadien – l'acte de Munich dans une fosse d'orchestre où officie le Kapellmeister Miracle ; l'acte de Venise dans un théâtre où Dapertutto joue les metteurs en scène –, la quasi nudité des volets extrêmes, avec cette lumière rasante happant au final l'artiste vers la seule création, offrent toujours autant de moments saisissants.
Malgré une équipe musicale faible, il faut revoir ce diamant inaltéré qui a changé notre regard sur l'ouvrage.
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Opéra Bastille, Paris Le 07/02/2007 Yannick MILLON |
| Reprise des Contes d'Hoffmann d'Offenbach dans la mise en scène de Robert Carsen, sous la direction de Marc Piollet à l'Opéra de Paris. | Jacques Offenbach (1819-1880)
Les Contes d'Hoffmann, opéra fantastique en un prologue, trois actes et un épilogue (1881)
Livret de Jules Barbier d'après le drame de Jules Barbier et Michel Carré
Choeurs et Orchestre de l'Opéra national de Paris
direction : Marc Piollet
mise en scène : Robert Carsen
décors et costumes : Michael Levine
Ă©clairages : Jean Kalman
préparation des choeurs : Peter Burian
Avec :
Rolando Villazón (Hoffmann), Ekaterina Gubanova (la Muse / Nicklausse), Franck Ferrari (Lindorf / Coppélius / Dr Miracle / Dapertutto), Christoph Homberger (Andres / Cochenille / Frantz / Pitichinaccio), Patricia Petibon (Olympia), Annette Dasch (Antonia), Nancy Fabiola Herrera (Giulietta), Alain Vernhes (Luther / Crespel), Christian Jean (Spalanzani), Marie-Paule Dotti (la mère d'Antonia), Jason Bridges (Nathanaël), Sergei Stilmachenko (Hermann), Yuri Kissin (Schlemil). | |
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