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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Récital de Daniel Barenboïm dans le cadre de Piano**** au Théâtre du Châtelet, Paris.
Au pays des rêves
Chaque récital de Daniel Barenboïm est une invitation au voyage, jamais le même, mais toujours vers le pays des rêves. Avec Liszt, c'est le rêve romantique absolu, avec ses excès et ses splendeurs, une expérience bouleversante. Après la magie d'Alfred Brendel, deuxième grand récital Piano**** au Châtelet en deux jours !
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C'était peut-être le programme idéal, celui dans lequel on avait toujours eu envie d'entendre Daniel Barenboïm sans jamais oser le lui demander. Du Liszt, rien que du Liszt ? et des pages parmi les plus poétiques, les plus folles, les plus imaginatives aussi. Ils sont très rares, les pianistes, même parmi les plus grands, à savoir aborder Liszt par le bon angle, c'est-à -dire d'abord par celui de la pensée, de la liberté d'inspiration poétique du romantisme.
Les doigts suivent toujours. Commencer par la technique est impressionnant, surtout si l'on parvient à retrouver l'ampleur du piano-orchestre voulue par le compositeur, mais c'est aussi frustrant car la pensée lisztienne et si riche, si prompte à s'évader, à multiplier les digressions, les commentaires, à proposer une profusion d'images, de questionnements, qu'il faut savoir s'y abandonner avant tout. Pianiste inspiré entre tous, Barenboïm y est chez lui.
Des Années de pèlerinage, il avait choisi d'abord trois Sonnets de Pétrarque, les n° 47, 104 et 123, fort différents les uns des autres, mais tous d'une incroyable richesse émotionnelle, pleins de contrastes d'humeur, alternant la réflexion intérieure et les élans tourmentés, le bonheur et le doute angoissé ou méditatif.
Sous les doigts du pianiste, tout trouve sa traduction, sa dimension, sa place, sa vie. Après un fabuleux Saint François d'Assise prêchant aux oiseaux où jamais ces derniers n'ont aussi bien gazouillé ni le grand saint prêché, c'est le tour d'un assez étonnant Après une lecture de Dante, pour lequel il faut aussi beaucoup de doigts, des poignets résistants et une vitesse de déplacement sur le clavier qui nécessite autant de précision que de malléabilité dans les nuances.
On se demande alors comment, avec tout ce qu'il fait par ailleurs, Daniel Barenboïm parvient à garder une technique lui permettant d'aborder en toute sérénité des pages aussi musclées. Mais au-delà de l'avalanche de notes de ces pages tout en contrastes de déferlements sonores et de plages de quiétude méditative, c'est toujours la poésie qui domine, la porte qui reste ouverte au rêve, au fantasme.
En deuxième partie, trois Paraphrases de concert sur des opéras de Verdi : le Trouvère, Aïda et Rigoletto. Ici, Liszt laisse libre cours à ses impressions personnelles, à son rapport intime avec ces musiques, faisant vibrer tel passage de la mélodie, favorisant ailleurs plutôt un rythme ou un climat. Le piano chante, ou bien gronde, ou bien se lamente, mais il est sans cesse changeant, inattendu, somptueux d'ampleur ou touchant de confidentialité. Et on voudrait que ce rêve infini ne s'arrête jamais. Il ne reste plus qu'à attendre le prochain récital Barenboïm
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Théatre du Châtelet, Paris Le 30/05/2007 Gérard MANNONI |
| Récital de Daniel Barenboïm dans le cadre de Piano**** au Théâtre du Châtelet, Paris. | Liszt
Daniel Barenboïm, piano | |
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