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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 octobre 2024 |
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Nouvelle production du Viol de Lucrèce de Britten par les artistes de l'Atelier lyrique de l'Opéra de Paris au Théâtre de l'Athénée.
Des soudards prometteurs
Voici un triple régal : celui d'assister à un opéra de chambre dans un lieu idéal, le Théâtre de l'Athénée, celui de savourer la cuvée 2006-2007 des talents émergents de l'Atelier Lyrique de l'Opéra de Paris, et enfin celui d'entendre un chef-d'oeuvre trop rarement donné, le Viol de Lucrèce de Benjamin Britten.
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Théâtre de l'Athénée-Louis Jouvet, Paris
Le 26/06/2007
Nicole DUAULT
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Complicité artistique
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Avec ses « lundis », Pierre Bergé avait créé jadis un rendez-vous musical et vocal de très haut niveau où se sont succédées toutes les stars du chant. Patrice Martinet, directeur de l'Athénée, maintient chaque saison avec bonheur une présence musicale dans sa programmation : la résidence du Quatuor Psophos et au moins une production lyrique. Le Viol de Lucrèce, opéra de chambre de Benjamin Britten, va comme un gant à cette ravissante bonbonnière : on ne perd rien de la densité de la musique ni de l'intensité du propos.
L'Ensemble de Basse-Normandie souligne autant la poésie, la sensualité que la violence tragique qui se dégage de la troublante partition du compositeur britannique, avec une mention spéciale pour le hautboïste et le clarinettiste de la formation. Le chef Neil Beardmore est un habitué des jeunes voix, il l'a démontré en dirigeant l'Atelier du Rhin, le voici avec les artistes de l'Atelier lyrique de l'Opéra de Paris.
Ceux-ci paraissent, au premier abord, morts de trac. C'est d'autant plus étonnant que la plupart d'entre eux sont déjà des professionnels qui ont tenu cette saison de petits rôles dans de grands opéras à Garnier et à Bastille. L'un des mérites de l'Atelier devrait être de leur faire dépasser ce stress qui visiblement paralyse leur jeu dramatique.
Certes le décor et les costumes, sans grâce, ne les aident guère. Britten a conçu son opéra de chambre à l'issue du deuxième conflit mondial, sans doute est-ce ce contexte d'une société guerrière qui a donné l'idée au metteur en scène Stephen Taylor de le situer chez des soudards américains aussi peu policés que pouvaient l'être Tarquin et ses sbires.
Le dispositif scénique de couleur orange est d'une laideur assurée. Lucrèce en soldate n'est pas d'une sensualité irrésistible. Heureusement que la musique dit toute l'évidence et jusqu'à l'indicible autant dans l'épure que dans l'incandescence. Les artistes sont plus assurés à la deuxième partie, ce qui permet aux jeunes voix de s'épanouir, notamment lors du superbe quatuor.
Dans sa longue plainte d'une souffrance outragée, d'une innocence bafouée, la mezzo anglaise Anna Wall (Lucrèce) offre une émotion touchante à laquelle on aurait aimé un peu plus de fragilité. Belle voix du baryton polonais Bartlomiej Misiuda (Tarquin) dans l'escalade du désir et de la violence. Les autres paraissent d'une formation solide et de qualités vocales qui ne demandent qu'à s'épanouir, comme la mezzo Cornelia Oncioiu (Bianca), les sopranos Yun Jung Choi (female chorus) et Elisa Cenni (Lucia).
Une seule remarque pour les hommes, qui semblent à peu près tous sortis du même moule, fabriqués sur un modèle identique. Peut-être l'Atelier lyrique devrait-il chercher plus à favoriser leurs personnalités propres qu'à leur donner un ton et un son.
Le Viol de Lucrèce, après quatre représentations – dommage qu'il n'y en ait pas davantage à l'Athénée –, partira en tournée avec ses deux distributions. Bonne chance à ces recrues qui ont l'étoffe des grands interprètes. À eux de la déployer !
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