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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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RĂ©cital du pianiste Nelson Goerner dans le cadre du Verbier Festival 2007.
Verbier 2007 :
Tour de force pianistique
Habitué des alpes valaisannes, le pianiste argentin Nelson Goerner offre un récital-fleuve faisant la part belle au répertoire romantique allemand. C'est avec un bonheur inégal qu'il parcourt un programme exigeant, lequel oscille entre virtuosité brute et réflexion intimiste, tour de force pianistique plus que véritable leçon de musique.
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D'emblĂ©e, on admire chez l'artiste une technique sĂ»re et aboutie, un toucher très physique et incarnĂ© lui permettant de produire un son qui demeure plein et rond sur toute une palette de nuances dynamiques. Son travail n'en est pas moins quelque peu desservi par l'acoustique souvent ingrate du lieu, le niveau de saturation sonore Ă©tant vite atteint alors qu'on lui souhaiterait le luxe d'un plus ample vaisseau. Du coup, certaines gradations et relations en paraissent faussĂ©es ou Ă tout le moins exagĂ©rĂ©ment marquĂ©es, le rendu sonore semble trop souvent flou, la juxtaposition dosĂ©e des plans sonores demeurant essentielle chez Schumann et Janáček.
De ce dernier, la Sonate 1905 constitue un choix audacieux pour tout interprète. Ici, chute vertigineuse vers l'inéluctable et pétrie d'une impétuosité qui occulte toute résignation, elle rate sa cible. Là où un Planès sonde par touches les profondeurs de cette musique de l'âme, manifeste quasi pré-scient de l'infinie douleur du monde et de sa beauté inexplicable, Nelson Goerner refuse le clair-obscur et privilégie l'expression dramatique crue sur les parfums impressionnistes du langage, le refus déchaîné de la fatalité l'emportant au final sur le renoncement et l'acceptation du destin humain.
DĂ©jĂ , l'Humoreske de Schumann le trouve plus Ă l'aise, Ă cheval entre humour grinçant et second degrĂ© d'abstraction, effleurant un niveau d'unification de la pensĂ©e qui, complètement intĂ©grĂ©, rendrait pleine justice Ă une oeuvre d'une complexitĂ© intellectuelle assommante. Ici encore, et assurĂ©ment de manière plus criante que chez Janáček, ce sont deux conceptions ontologiques du monde, deux approches exclusives de l'existence qui s'opposent, s'observent, se commentent et s'absorbent mutuellement.
Le verdict est cependant moins évident : qui, de Florestan ou d'Eusébius, gagne la partie ? Goerner semble vouloir laisser la question en suspens, esquissant à peine un début de réponse – laissant finalement à l'auditeur la liberté de choisir.
C'est plutĂ´t chez Liszt que le musicien et le pianiste rayonnent, trouvent enfin leurs marques. Entre des Feux follets admirables de tactilitĂ© et des Harmonies du soir touchantes d'Ă©vocation poĂ©tique et chatoyantes de coloration des timbres, un Mazeppa brillamment domptĂ© et une MĂ©pĥisto-Valse assumĂ©e crânement rĂ©concilient le commentateur, autrement sceptique, avec un jeu pianistique spectaculaire et justement hĂ©doniste, peinture superbe et dĂ©but de rĂ©ponse, peut-ĂŞtre, d'un compositeur inclassable aux interrogations autrement plus pessimistes de ses contemporains.
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Église, Verbier Le 03/08/2007 Renaud LORANGER |
| RĂ©cital du pianiste Nelson Goerner dans le cadre du Verbier Festival 2007. | Leoš Janáček (1854-1928)
Sonate pour piano en mi bémol mineur, « 1.X.1905 »
Robert Schumann (1810-1856)
Humoreske en si bémol majeur op. 20
Franz Liszt (1811-1886)
Études d'exécution transcendantes S 139 :
Feux Follets
Harmonies du soir
Mazeppa
Méphisto-Valse no. 1 S 514, « Der Tanz in der Dorfschenke »
Nelson Goerner, piano
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