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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Nouvelle production du Roi d'Ys de Lalo mise en scène par Nicolas Joel et sous la direction d'Yves Abel au Théâtre du Capitole, Toulouse.
De belles voix pour un demi-spectacle
Inva Mula (Rozenn) et Sophie Koch (Margared).
La deuxième représentation de la nouvelle production du Roi d'Ys qui ouvre la saison du Capitole ne fut qu'une demi-soirée. Sophie Koch brusquement aphone, il n'y eut pas de reprise après un entracte très allongé. Juste assez de temps pour apprécier voix, musique, spectacle et direction, mais frustrant quand même !
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Les malédictions dont elle abreuve Rozenn, sa douce soeur, se serait-elles retournées contre elle ? Toujours est-il que la très méchante Margared, en l'occurrence Sophie Koch, s'est retrouvée sans voix à la fin de la première partie de cette deuxième représentation. L'opéra de Lalo, déjà rarement donné, ne put donc aller à son terme. C'est dommage, car cette nouvelle production signée Nicolas Joel et qui ouvre la saison du Capitole bénéficie de très solides atouts.
Et d'abord une très bonne distribution. Cela, on peut en juger, même sur un demi-spectacle. Dans le rôle-titre, Paul Gay s'affirme avec une réelle autorité, par la sûreté de l'émission, la qualité du timbre et la prestance scénique. Très en voix, Inva Mula est une Rozenn aussi touchante que possible, sans une once de mièvrerie, nous gratifiant aussi bien de grands sons éclatants que de nuances très subtiles.
On retrouve aussi le ténor américain Charles Castronovo en Mylio, le bel objet de la passion des deux soeurs. Il chante toujours aussi bien que lors de ses brillants Nemorino dans l'Élixir d'amour à l'Opéra Bastille, mais la voix manque sans doute un peu d'épaisseur ici, car l'orchestre de Lalo est d'une texture très riche.
Gageons que bien des spectateurs auront découvert la beauté musicale de cette partition concise, énergique, sans débordements sentimentaux, presque trop sèche même, dans l'expression des transports amoureux de Rozenn et Mylio. Il y a certes la marque de Wagner, mais on est plus proche de la clarté de Debussy ou de Ravel que de la sentimentalité de Massenet ou de Saint-Saëns. L'ouverture est déjà à elle seule une admirable page orchestrale, très bien prise en main par Yves Abel et les musiciens de l'orchestre. Et c'est dans la fureur et les éclats guerriers que Lalo semble s'exprimer avec le plus de liberté et de succès.
La première partie regroupant le premier acte et une moitié du deuxième ne permet pas d'entendre beaucoup le personnage très méchant lui aussi de Karnac. Franck Ferrari y a paru tout à fait adéquat. Reste le cas de Sophie Koch. Elle ne semblait pas vraiment mal à l'aise en début de soirée, mais ceux qui connaissent bien sa voix auront remarqué qu'elle forçait beaucoup, avec des problèmes inhabituels de stabilité.
Une question, cependant : ce rôle n'est-il pas trop dramatique, trop tendu de tessiture pour elle ? On peut s'interroger, sans certitude cependant. Yves Abel, il est vrai, ne ménage pas les décibels de l'orchestre ni des choeurs, mais c'est une vision puissante, bien dans l'esprit de ce drame à la fois historique, religieux et très marqué par les rudesses de la civilisation bretonne ancienne.
Dans un monumental décor unique d'Ezio Frigerio, avec de très étonnants costumes de Franca Squarciapino, ceux des guerriers rappelant les images des mangas avec leurs samouraïs hérissés de pointes, Nicolas Joel a mis sagement en place ses personnages, sans chercher autre chose qu'une visualisation de l'anecdote. C'est efficace, et pour un ouvrage aussi peu connu des générations actuelles, mieux valait représenter ce qui se passe dans le livret que tout autre chose.
Souhaitons maintenant que Sophie Koch puisse assurer les autres représentations, car le personnage qu'elle campe, sorte de Carabosse hyper maléfique, est d'une force théâtrale de grande envergure.
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