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CRITIQUES DE CONCERTS 24 novembre 2024

Reprise du Rake's Progress de Stravinski mis en scène par André Engel, sous la direction de Frédéric Chaslin au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.

L'Enfer en dentelle
© Alvaro Yanez

Thomas Randle (Tom Rakewell)

Déception avec la reprise de cette production du Rake's Progress de Stravinski que André Engel avait réalisée pour cette même scène du Théâtre des Champs-Élysées en 2001. Une approche aussi superficielle de l'un opéras les plus importants du XXe siècle est frustrante, surtout avec une distribution qui ne sauve rien.
 

Théâtre des Champs-Élysées, Paris
Le 07/11/2007
GĂ©rard MANNONI
 



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    La série du Rake's Progress n'échappe pas à la règle et il n'y a aucune raison de croire qu'en la choisissant pour sujet de son opéra, Stravinski n'en ait pas eu conscience. S'il a choisi une approche apparemment giocosa, c'est sûrement en référence au Don Giovanni de Mozart, avec en particulier cette conclusion où les héros reviennent faire un ultime commentaire après la magnifique scène finale, tout comme dans Don Giovanni. Il s'agit d'ailleurs d'une course à l'abîme du même type, d'une marche inexorable vers la déchéance, même si Tom Rakewell n'a ni l'élégance ni le courage ni la flamboyance de Don Juan et échappe à l'Enfer par la folie
    châtiment qui ne vaut guère mieux.

    Vouloir traiter l'oeuvre dans l'esprit des comédies musicales américaines est donc une erreur. On a l'impression de folâtrer du côté de Broadway, sous prétexte que le compositeur flirte avec quelques rythmes américains et quelques sonorités jazzy, jusqu'au moment où il faut bien aborder le vrai sujet à la deuxième scène du III, celle du cimetière – encore Don Giovanni ! – suivie par celle, non moins dramatique, de l'asile de fous.

    On y plonge ici sans préparation, sans aucune gradation préalable, sans que le spectacle nous y ait conduits peu à peu comme il aurait dû le faire. Cela est d'autant plus sensible que le Nick Shadow devenu gentil domestique n'a absolument rien de démoniaque et que même le personnage ajouté par Stravinski de Baba la Turque ne préfigure quasiment pas la déchéance finale de Tom, Elsa Maurus restant bien trop élégante et jolie, malgré barbe et moustaches ! Nul doute qu'Olivier Py qui signera la production de l'Opéra de Paris en 2008 trouvera les chemins de l'Enfer de manière plus convaincante avec plus de soufre et moins de dentelle.

    La distribution masculine est correcte, sans susciter aucun enthousiasme particulier, avec un Thomas Randle virevoltant mais à la voix sans charme en Tom Rakewell et un David Pittsinger vocalement à l'aise mais théâtralement à côté du personnage de Nick Shadow. La jeune Olga Peretyatko, récente lauréate du prix Operalia Placido Domingo a certes une jolie voix légère, mais encore trop discrète et trop peu aguerrie pour un rôle comme celui d'Ann Trulove marqué par tant d'autres personnalités tant au disque qu'à la scène. Elle a néanmoins une jolie silhouette, de la grâce et une aisance certaine sur le plateau.

    Sous la baguette d'un Frédéric Chaslin moyennement inspiré, l'Ensemble Orchestral de Paris tient discrètement mais honorablement son rôle.




    Théâtre des Champs-Élysées, Paris
    Le 07/11/2007
    GĂ©rard MANNONI

    Reprise du Rake's Progress de Stravinski mis en scène par André Engel, sous la direction de Frédéric Chaslin au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
    Igor Stravinski (1882-1971)
    The Rake's Progress, opéra en trois actes

    Choeur du Théâtre des Champs-Élysées
    Ensemble Orchestral de Paris
    direction : Frédéric Chaslin
    mise en scène : André Engel
    décors : Nicky Rieti
    costumes : Nicole Galerne & Chantal de la Coste
    éclairages : André Diot

    Avec :
    Gregory Reinhart (Trulove), Olga Peretyatko (Ann Trulove), Thomas Randle (Tom Rakewell), David Pittsinger (Nick Shadow), Nuala Willis (Mother Goose), Elsa Maurus (Baba la Turque), Simeon Esper (Sellem, le gardien de l'Asile).

     


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