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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Troisième et quatrième concerts de l'intégrale des symphonies de Sibelius par le Los Angeles Philharmonic sous la direction d'Esa-Pekka Salonen à la salle Pleyel, Paris.
Exploration intellectuelle de la galaxie Sibelius
Pour les deux derniers concerts du cycle consacré aux sept symphonies de Sibelius, Salonen offre de nouveau une vision très personnelle de l'univers du compositeur finlandais, entre analyse spectrale et conception intériorisée, plus intellectuelle que sensible, notamment dans une 2e symphonie débarrassée à l'excès de ses oripeaux romantiques et nationalistes.
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Épisodique au concert, l'oeuvre de Sibelius reste pour beaucoup de mélomanes terra incognita, parasitée par l'éternelle Valse triste et le Concerto pour violon. À mille lieues de toute forme connue, son originalité ancrée dans la cosmologie et les légendes recèle un idéal de perfection où Sibelius, sans cesse en quête de musique pure, est davantage attaché « à une logique profonde où les motifs créent une unité interne plus que la raison raisonnante si chère à la musique occidentale ».
L'interprétation que donne Esa-Pekka Salonen des 2e, 4e et 7e symphonies semble plus adaptée à une conception cérébrale dégagée de tous les oripeaux romantiques et nationalistes qu'à une véritable portée héroïque si bien défendue entre autres par Barbirolli, Beecham, Berglund, Segerstam, sans parler de Bernstein ou Maazel. Un tel regard est nécessairement réducteur. La 2e symphonie perd de son impact et de sa projection ; le sort fait à chaque motif enlève précisément la tension voire la ligne d'ensemble ainsi que l'hystérie du déferlement hymnique final que Toscanini savait si bien restituer.
Il en va différemment de la 4e symphonie, plus abstraite et qui entre davantage dans la perception analytique défendue par le chef finlandais qui propulse Sibelius dans la modernité. Moins colorée que d'ordinaire, monochrome même, l'interprétation privilégie l'implosion, le minimalisme, loin de tout pathos. Si la démonstration parfaite convainc, elle enlève en revanche l'incandescence au profit d'une lecture sans concession et tenue de bout en bout.
Une 7e symphonie Ă la fois aride et narrative
La 7e, fouillée jusqu'au moindre détail, s'avère séduisante par la hauteur du geste, d'une seule coulée, comme fondue dans le flux sonore avec un aspect aride et narratif à la fois. Le Los Angeles Philharmonic répond aux intentions du chef avec une discipline de tous les instants, même si les pupitres n'ont pas toujours l'homogénéité d'autres orchestres américains – les cordes graves ont une ampleur impressionnante, les cuivres sont infaillibles et ont cette sûreté qui manque parfois aux bois, à la sonorité assez impersonnelle.
Le Retour de Lemminkäinen joué en ouverture de la première soirée détient cette dimension épique qui n'est pas jusque là l'apanage de la direction de Salonen et les bis – une Valse triste sombre et un Finlandia moins pétaradant que d'ordinaire – dépoussièrent l'image traditionnelle de carte postale défendue par certains chefs.
La pièce de Salonen – Wing on Wing, composée pour l'ouverture du Walt Disney Concert Hall en 2004 – possède une belle générosité mais demeure sans personnalité très marquée. Quant à celle de Steven Stucky – Radical Light, créée à Los Angeles en octobre 2007 –, elle se laisse écouter mais fait pâle figure dans ce cycle Sibelius.
En dépit de ces remarques, il faut avant tout saluer une entreprise de haut vol qui a permis de resituer Sibelius parmi les créateurs les plus originaux de son époque, loin de tout souci de classification cartésienne.
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Salle Pleyel, Paris Le 08/11/2007 Michel LE NAOUR |
| Troisième et quatrième concerts de l'intégrale des symphonies de Sibelius par le Los Angeles Philharmonic sous la direction d'Esa-Pekka Salonen à la salle Pleyel, Paris. | 6/11/2007
Jean Sibelius (1865-1957)
Le Retour de Lemminkäinen, op. 22 n° 4
Version définitive de 1901
Esa-Pekka Salonen (*1958)
Wing on Wing (2004)
Anu Komsi et Cyndia Sieden, sopranos
Jean Sibelius (1865-1957)
Symphonie n° 2 en ré majeur op. 43 (1902)
8/11/2007
Jean Sibelius (1865-1957)
Symphonie n° 4 en la mineur op. 63 (1911)
Steven Stucky (*1949)
Radical Light (2007)
Jean Sibelius (1865-1957)
Symphonie n° 7 en ut majeur op. 105 (1924)
Los Angeles Philharmonic Orchestra
direction : Esa-Pekka Salonen | |
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