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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert de l'Orchestre de Paris sous la direction de Christoph Eschenbach, avec la participation de la soprano Karita Mattila Ă la salle Pleyel, Paris.
La diva survoltée
Voici le genre de concert dont on raffole, qui rompt avec le sempiternel cérémonial ouverture-concerto-symphonie. Ce jeudi 22 novembre, l'Orchestre de Paris brille de sa diversité avec des musiciens en sextuor, puis en quintette à vents précédant la formation complète dans des extraits de Salomé, dont la scène finale chantée par l'incandescente Karita Mattila.
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Une soirée de plaisirs, un de ces concerts qui font trembler Pleyel, un grand concert symphonique hors des sentiers battus, et une prestation de celles qui restent dans les mémoires, avec de surcroît une palette de sonorités fascinantes. C'est ce qu'avait préparé en cette triste semaine de novembre un Orchestre de Paris gonflé à bloc, tout juste de retour d'une tournée triomphale en Asie.
Dédié par Georges-François Hirsch, directeur général de l'orchestre, au chorégraphe Maurice Béjart disparu ce 22 novembre, le concert s'ouvre par la mélancolie ambiguë et très fin de siècle du sextuor initial du Capriccio de Richard Strauss, où la nostalgie célèbre en permanence la beauté d'un monde d'hier. Étrangement, chaque note égrenée par les cordes semble un écho à la magie de Béjart.
Fluide, mélodique, désinvolte, la conversation mozatienne du Quintette pour piano, hautbois, clarinette, basson et cor a cette rigueur sans sécheresse et cette émotion tout en retenue que Christoph Eschenbach au piano, aussi magnifique que dans notre souvenir, communique à tout ce qu'il touche. Une première partie de concert qui prend en tout cas un malin plaisir à bousculer le rituel quasi immuable de l'ouverture suivie du concerto. Une petite escapade hors des chemins tracés tout à fait rassérénante.
Mais le grand moment restait à venir après l'entracte. Qui a pu oublier la soprano finlandaise Karita Mattila, nue sur la scène de la Bastille dans la Danse des sept voiles de Salomé, lors de la première série de représentations de la production Lev Dodin à la rentrée 2003 ? La revoici, plus époustouflante encore ! Ce soir, de dénudé, elle n'a qu'une épaule et les pieds, dont les ongles vernis de rouge répondent à ceux de ses mains et au boa qu'elle arbore au bras gauche.
Atmosphères expressionnistes
Moulée dans un fourreau noir orné d'argent, le front et les cheveux or miroitant de strass, elle feule, gémit, hurle, rugit comme une tigresse, assoiffée du sang des lèvres de Iokanaan. Elle trépigne, illuminée, s'agenouille, habitée par cette partition hallucinée dont elle restitue plus que jamais les atmosphères expressionnistes, avant d'embrasser avec passion le premier violon, Roland Daugareil, qui n'en revient pas.
Magnifique autant de beauté physique que d'une prestation vocale au rayonnement inouï – plus encore qu'à la Bastille avons-nous dit, mais, ne chantant que la scène finale, elle n'a pas besoin de s'économiser, et se consume d'un inextinguible feu sacré –, elle déchaîne le public, jusqu'à l'hystérie. Jusqu'à faire sourire Christoph Eschenbach !
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Salle Pleyel, Paris Le 22/11/2007 Nicole DUAULT |
| Concert de l'Orchestre de Paris sous la direction de Christoph Eschenbach, avec la participation de la soprano Karita Mattila Ă la salle Pleyel, Paris. | Richard Strauss (1864-1949)
Capriccio : Sextuor Ă cordes
Roland Daugareil, violon I
Eiichi Chijiiwa, violon II
Ana Bela Chaves, alto I
David Gaillard, alto II
Emmanuel Gaugué, violoncelle I
François Michel, violoncelle II
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Quintette pour piano, hautbois, clarinette, basson et cor, K. 452
Christoph Eschenbach, piano
Alexandre Gatter, hautbois
Philippe Bernod, clarinette
Giorgio Mandolesi, basson
André Cazalet, cor
Richard Strauss (1864-1949)
Salomé : Danse des sept voiles et scène finale
Karita Mattila, soprano
Orchestre de Paris
direction : Christoph Eschenbach | |
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