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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Premier et troisième concerts Tchaïkovski de l'Orchestre Philharmonique de Saint-Pétersbourg sous la direction de Yuri Temirkanov, avec la participation du pianiste Denis Matsuev et du trompettiste Sergei Nakariakov au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Une direction sans emphase
Les concerts que Yuri Temirkanov et la Philharmonie de Saint-Pétersbourg consacrent, au TCE, à l'oeuvre symphonique de Tchaïkovski, confirment que la tradition d'interprétation a survécu à tous les aléas de l'Histoire contemporaine. La perfection inaccessible défendue par Mravinski durant cinquante ans s'est transformée en un style d'une grande noblesse.
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En 1993, pour le centenaire de la mort de Tchaïkovski, Yuri Temirkanov – à la tête d'une formation encore chauffée à blanc par son prédécesseur Evgueni Mravinski – avait déclenché l'enthousiasme au TCE. Depuis, l'Orchestre Philharmonique de Saint-Pétersbourg s'est transformé et les musiciens ayant vécu la férule de fer de l'époque soviétique se raréfient.
Temirkanov n'est ni un dictateur ni un autocrate : il a contribué à alléger la discipline d'antan sans pour autant faire disparaître la splendeur d'une phalange qui s'est pourtant mise à l'heure du temps présent. Le premier concert en apporte la preuve. S'il n'atteint pas la perfection absolue – les bois semblent parfois un peu verts –, il donne cependant de Tchaïkovski une image tout à fait convaincante.
Dans la 4e symphonie, le tragique du fatum l'emporte sur les excès de la dramaturgie expressive et dans le 1er concerto pour piano, la demi-teinte de l'accompagnement presque distancié contraste avec la carrure impressionnante du piano de Denis Matsuev. Fulgurant de virtuosité et de puissance contrôlée, il ne possède pas l'intelligence discursive d'un Gilels, d'un Horowitz ou d'un Richter. Pour lui, l'opposition entre forte et piano, très accusée, signifie accélération ou ralentissement, mais sa prestation et son abattage éblouissent sans faire oublier l'instrument à percussion.
Le troisième et dernier concert laissera une trace dans les mémoires, surtout pour l'exécution de la Symphonie Pathétique. En première partie, l'ouverture Roméo et Juliette avait déjà donné le la par son lyrisme épanoui ainsi que par la sobriété de ses élans où la passion confine d'entrée de jeu avec le mysticisme. En revanche, l'interprétation véloce du trompettiste Sergei Nakariakov des célèbres Variations rococo transcrites ici pour trompette par son père ne fait pas oublier la version originale pour violoncelle autrement plus idiomatique et chaleureuse.
Dans la Pathétique, l'acuité formelle aboutie (mouvement initial), l'élégance chorégraphique de la ligne (Allegro con grazia), la pulsation inexorable (Allegro molto vivace) et le désespoir sans pathos (Adagio lamentoso) brûlent l'âme. Sans doute le même orchestre, dans sa salle de la Philharmonie, aurait obtenu un rendu sonore plus consistant encore, en particulier au niveau des basses, qui souffrent quelque peu de leur enfermement sur la scène du TCE.
Faut-il s'en plaindre alors qu'on est transporté au plus profond de l'âme russe par l'un des plus grands chefs actuels, héritier d'une tradition qui remonte à Tchaïkovski lui-même ?
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 05/12/2007 Michel LE NAOUR |
| Premier et troisième concerts Tchaïkovski de l'Orchestre Philharmonique de Saint-Pétersbourg sous la direction de Yuri Temirkanov, avec la participation du pianiste Denis Matsuev et du trompettiste Sergei Nakariakov au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | 2/12/2007
Piotr Ilitch Tchaïkovski (1840-1893)
Concerto pour piano et orchestre n° 1 en sib mineur op. 23 (1875)
Denis Matsuev, piano
Symphonie n° 4 en fa mineur op. 36 (1878)
5/12/2007
Piotr Ilitch Tchaïkovski (1840-1893)
Roméo et Juliette, ouverture-fantaisie (1870)
Variations sur un thème rococo, op. 33 (1877)
Version pour trompette de Mikhail Nakariakov
Sergei Nakariakov, trompette
Symphonie n° 6 en si mineur op. 74, « Pathétique » (1893)
Orchestre Philharmonique de Saint-Pétersbourg
direction : Yuri Temirkanov | |
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