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CRITIQUES DE CONCERTS |
22 novembre 2024 |
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Récital du pianiste Jean-Frédéric Neuburger à l'Auditorium du Louvre, Paris.
Une valeur qui s'affirme
À 21 ans, le jeune Jean-Frédéric Neuburger s'affirme bien comme la valeur montante du piano français, et plus largement comme l'un des grands espoirs du piano international. Un très beau et ambitieux récital romantique partagé entre sonates de Schubert et Brahms et Klavierstücke de ce dernier vient le confirmer à l'Auditorium du Louvre.
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Collectionneur de prix internationaux dès sa sortie du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris où il fut élève notamment de Jean-François Heisser, Jean-Frédéric Neuburger n'est pas seulement un fort en thème musical et une bête à concours. La manière dont il domine ce programme tout romantique à l'Auditorium du Louvre est bien celle d'une véritable interprète, doté déjà d'une belle maturité, même s'il trouvera sans aucun doute à l'avenir mille façons de marquer les oeuvres d'un sceau plus personnel.
Choisir une première partie avec la Sonate en ré majeur D 850 de Schubert et une deuxième avec les Klavierstücke op. 119 suivis de la 1re sonate en ut majeur de Brahms est une sorte de défi. Rien n'est plus difficile en effet que rendre évident et sensible tout ce qui différencie les premières expressions d'un romantisme à peine né de celles bien plus affirmées d'un romantisme établi.
Avec Schubert et ses admirables sonates, on est dans une sorte de rêve pudique et douloureux, où l'angoisse peut se faire merveilleusement mélodique, où surgissent des rythmes de danse, des sonorités populaires qui ne parviennent qu'à éclairer furtivement une nostalgie viscérale. Neuburger a très bien traduit toutes ces nuances, ces tentatives d'élans rageurs opposés à de poétiques visions apaisées.
Avec une bonne conception et une bonne gestion des tempi, sans jamais forcer sur la dynamique mais sans en rester non plus dans de lassantes demi-teintes, il a bien compris et traduit toutes les subtilités si attachantes de l'univers schubertien. Pour être tout à fait hors du commun, son interprétation, comme celle des pages de Brahms, ne manque que de ce zeste de personnalité qui nous ferait dire : « tiens, je n'avais jamais entendu cela joué de cette manière ! ». Mais cela viendra très certainement.
Car son Brahms est aussi paré des plus belles qualités d'analyse et d'exécution. Entrant plus profondément dans le clavier, jouant davantage des forte, Neuburger développe ces deux aspects assez différents aussi du génie brahmsien, une quarantaine d'années séparant la Sonate op. 1 des opus 119.
Il fallait rendre sensible tout ce que contenait déjà ce premier opus et que l'on retrouve à un degré d'évolution autre dans les Klavierstücke. Cela, on le comprend très bien, tout en participant à ce généreux voyage dans un romantisme aux tourments non moindres que celui de Schubert mais vécu déjà avec une sensibilité plus éloignée de celle du XVIIIe siècle.
En France, nous classons globalement et de façon un peu hâtive tous les compositeurs du XIXe siècle sous l'étiquette « romantique », alors qu'en Allemagne, on considère très souvent le premier Beethoven et même Schubert comme des créateurs rattachés à la fin du XVIIIe plus qu'au XIXe.
Un récital important, bien pensé et bien délivré, qui confirme bien tout ce que l'on a déjà constaté et que l'on doit espérer de ce jeune interprète de très grand talent.
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Auditorium du Louvre, Paris Le 05/12/2007 Gérard MANNONI |
| Récital du pianiste Jean-Frédéric Neuburger à l'Auditorium du Louvre, Paris. | Schubert-Brahms
Jean-Frédéric Neuburger, piano | |
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