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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Récital de Nelson Freire dans le cadre de Piano**** au Théâtre du Châtelet, Paris.
L'art absolu du piano
Une fois encore, on ne peut que puiser dans la boîte à superlatifs pour évoquer le récital Piano**** de Nelson Freire donné au Théâtre du Châtelet. Dans un programme varié mais tout romantique, le grand pianiste brésilien aura transcendé comme toujours l'art de son instrument, sans artifices et avec une vraie authenticité musicale.
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Mendelssohn, Beethoven, Schumann, Chopin, cela pourrait être le plus banal des voyages romantiques. Avec Nelson Freire, c'est une épopée émotionnelle sans cesse renouvelée, sans cesse surprenante, toujours profonde, bouleversante, qui débute par les Variations sérieuses op. 54 de Mendelssohn, oeuvre piège à l'écart de laquelle se tiennent prudemment la plupart des pianistes.
Peut-être moins inspirées que les célèbres Romances sans paroles, ces dix-sept variations bien dans la tradition de l'époque sont d'une belle pureté d'écriture et d'inspiration, mais peu propices aux effets faciles. Pour leur rendre justice, il faut ce toucher miraculeux, cette inspiration poétique continuelle et ce génie de la coloration qui restent les caractéristiques du jeu de Nelson Freire.
Changement d'univers mais non de magie musicale avec la Sonate op. 110 de Beethoven. Là s'ajoute une manière unique de se jouer des structures comme si elles allaient de soi pour donner un élan vital autonome à des pages dont la versatilité est fascinante, d'autant qu'elle va de pair avec une incontestable homogénéité de pensée. Il y a de la profondeur, mais surtout une utilisation toujours expressive de toutes les finesses, de toutes les nouveautés, de toutes les idées brillantes d'écriture que Beethoven déploie ici. Magistral !
On imagine aisément que le poète et coloriste Freire trouve un terrain de prédilection dans les Scènes d'enfants de Schumann qui ouvrent la deuxième partie de ce récital. Ludiques, immatérielles ou au contraire figuratives, les pièces se succèdent dans un climat imaginatif irrésistible, tout en nuances, en subtilités, en finesse.
Avec la Sonate en si mineur de Chopin enfin, on retrouve cette même manière d'aborder l'oeuvre par ce qu'elle a de plus sensible, de plus vrai, en évitant toute tentation de l'éclat facile ou de la virtuosité démagogique. Dieu sait pourtant si la virtuosité y est reine, dans la fulgurance des traits, dans les chevauchées fantastiques auxquelles se livrent les deux mains, unies ou rivales. Sous les doigts de Nelson Freire, tout reste propos essentiel, intime, au coeur du romantisme le plus exact et donc le plus perceptible à la sensibilité d'aujourd'hui, de toutes les époques, d'ailleurs.
On quitte à regret un tel concert, mais on se sent privilégié d'avoir pu vivre des moments d'une telle authenticité musicale.
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Théatre du Châtelet, Paris Le 28/01/2008 Gérard MANNONI |
| Récital de Nelson Freire dans le cadre de Piano**** au Théâtre du Châtelet, Paris. | Mendelssohn, Beethoven, Schumann, Chopin
Nelson Freire, piano | |
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