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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Reprise du concert d’ouverture du festival de Lucerne 2008 par le Lucerne Festival Orchestra sous la direction de Claudio Abbado.
Lucerne 2008 (2) :
Ouverture à la française
Claudio Abbado a choisi d’ouvrir Lucerne 2008 par un programme exclusivement consacré à la musique française. De Berlioz à Ravel en passant par Debussy, trois compositeurs attachés à la couleur magnifiquement mis en valeur par le Lucerne Festival Orchestra, avec une direction toujours svelte et bien menée.
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Consacrer une soirée d’ouverture à la musique française reste un événement. Or, le Lucerne Festival Orchestra est composé de solistes dont les couleurs instrumentales sont à même de défendre le raffinement français en la matière. On sait que Claudio Abbado aime généralement à cultiver un son plutôt fin quant à la densité et lumineux quant à la couleur. Sa direction allie également la sûreté d’un cadrage efficace et la souplesse nécessaire à une bonne respiration musicale, qualités qui transparaissent avec sensibilité dans les interprétations de chacune des pièces.
Le chef italien apporte un soin évident au timbre et surprend par sa capacité à tirer de l’orchestre d’incroyables micro-nuances, qu’il s’agisse des trompettes avec sourdines de Fêtes de Debussy ou du son d’emblée diaphane des cordes au début de Nuages malgré leur effectif, cela jusqu’au bruissement imperceptible des contrebasses, à la frontière même du silence.
Cette transparence témoigne d’un travail d’orfèvre et sert la délicatesse du répertoire français, bien que l’extrême finesse des textures accuse néanmoins un léger manque de présence. Si cette réserve n’est pas valable pour les solos de bois souvent suaves et à la poésie sonore particulièrement soignée – le cor anglais d’Emma Schied et la flûte de Jacques Zoon –, on ne peut s’empêcher de sentir qu’un rien de velouté supplémentaire eût encensé cette musique de davantage de sortilèges, à l’image du chœur de femmes du Bayerischen Rundfunks tout en rondeur, planant sur les eaux.
Si Abbado procède par poses dĂ©licates successives en s’efforçant de respecter l’intĂ©gritĂ© de la partition, c’est surtout dans SchĂ©hĂ©razade que son art de la finesse atteint son summum. Elina Garanča lui donne une rĂ©plique sentie, toute faite de sensualitĂ© discrète, Ă laquelle la flĂ»te rĂŞveuse confère le contrepoint songeur dans l’IndiffĂ©rent. Si le français de la mezzo lettone reste Ă perfectionner, en particulier dans les nasales, son timbre doucement Ă©toffĂ©, sa musicalitĂ© subtile rendent un Ravel d’une captivante beautĂ©.
Bien que Berlioz appartienne aussi à cette lignée de coloristes français par son talent d’orchestrateur, il n’en demeure pas moins un compositeur à aborder avec davantage de corps et de dramatisme. Si Debussy et Ravel laissent leur auditeur relativement libre, Berlioz, comme Beethoven, le saisit et l’emmène là où il le désire.
Succession de méandres
Ainsi, Abbado conçoit le premier mouvement de la Symphonie fantastique comme une succession de méandres et d’errements cyclothymiques, dans lesquels il nous conduit avec un maîtrise consommée du temps, jouant sur la conviction des élans et des chutes inévitables. La Scène aux champs se marque au contraire par une impression de temps suspendu entre le cor anglais et le hautbois, habitant leur silence respectif d’une intensité palpable, tandis que la continuité d’un fil dramatique reprend clairement le dessus à partir du mouvement suivant.
Loin des visions telluriques, Abbado conduit l’ensemble en architecte particulièrement convaincant, structurant la partition à partir d’un sens dramatique évident. Cette vision, menée avec conviction et souplesse, avoue parfois quelques limites au niveau de l’impact orchestral, notamment en raison de la texture très fine de l’orchestre.
Abbado se prive ainsi dans la Marche au supplice d’une pâte sonore plus granuleuse, notamment dans les cuivres, le timbre restant un élément expressif de première catégorie dans cet ouvrage. Manque ainsi à cette Fantastique un surcroît de corps orchestral, qui se serait avéré le pendant idéal au dramatisme bien mené de cette conception efficace.
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Konzertsaal, Kultur- und Kongresszentrum, Luzern Le 15/08/2008 Benjamin GRENARD |
| Reprise du concert d’ouverture du festival de Lucerne 2008 par le Lucerne Festival Orchestra sous la direction de Claudio Abbado. | Claude Debussy (1862-1918)
Nocturnes (1899)
Membres du Chœur du Bayerischen Rundfunks
préparation : Robert Blank
Maurice Ravel (1875-1937)
Schéhérazade, trois poèmes pour chant et orchestre (1903)
Elina Garanča, mezzo-soprano
Hector Berlioz (1803-1869)
Symphonie fantastique op. 14 (1830)
Lucerne Festival Orchestra
direction : Claudio Abbado | |
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