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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Récital du ténor Jonas Kaufmann accompagné au piano par Helmut Deutsch à l’Opéra de Paris.
L’art du Lied au sommet
Avant d’incarner Florestan dans la nouvelle production de Fidelio qui débutera le 25 novembre à l’Opéra de Paris, Jonas Kaufmann donne dans le cadre du récital une magistrale leçon de chant et d’interprétation devant un très nombreux public emplissant le Palais Garnier. Triomphe sans ombre malgré un programme Liszt-Britten-Strauss sans concessions.
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Si ses derniers triomphes sur les grandes scènes internationales aux côtés des stars féminines du monde lyrique et le succès de ses enregistrements chez Decca ont fait de lui en quelques mois le ténor vedette dont tout le monde parle, c’est avec un programme axé sur la seule musique que Jonas Kaufmann a repris contact avec le public parisien.
Dans la salle du Palais Garnier où il avait triomphé au printemps 2007 dans la Traviata, il se présente avec un programme d’où sont bannies toutes concessions aux effets de voix d’habitude chers au ténors. Mélodies de Liszt, de Britten et de Strauss, ce répertoire ne peut s’imposer que si l’on possède non seulement une maîtrise absolue des possibilités de la voix mais aussi un enracinement réel, viscéral, atavique, dans la culture du Lied.
Comme les grands spécialistes des années 1950 et 1960, qui, peu nombreux d’ailleurs, redonnèrent au public le goût des Lieder de Schubert, Schumann, Brahms, Strauss et Wolf notamment, Kaufmann est né et a grandi en Allemagne, où l’on baigne très tôt dans ce contexte musical de manière quasi permanente et naturelle. C’est irremplaçable.
Mais encore faut-il posséder aussi quelques qualités rarement rassemblées chez un même artiste, à savoir l’instinct, l’intelligence analytique du texte et de la musique, la technique superlative permettant de traduire toutes les intentions que ladite intelligence vous a permis de lire et de comprendre.
Il faut bien reconnaître que Jonas Kaufmann a tout cela au plus haut degré, ce qui rend un récital comme celui qu’il vient donner un moment de musique totalement exceptionnel, comme ceux que l’on connut avec les quelques grands noms d’après-guerre.
Il serait fastidieux d’entrer dans l’analyse précise de toutes les mélodies chantées, même si, pour en retenir juste quelques unes en particulier, on pourrait citer les Trois sonnets de Pétrarque mis en musique par Liszt, chantés dans le grand style romantique, avec une générosité vocale par instants prémonitoire de l’Otello qui se profile dans la carrière du ténor, ou, à l’opposé, Nachtgang ou Morgen de Strauss, émis dans des demi-teintes et des pianissimi impondérables qui relèvent du plus grand art.
Et entre les deux, toutes les nuances possibles, avec plus ou moins de timbre, voire carrément de la voix de tête, des forte charnus et riches, une mezza voce impalpable, bref, tout ce que la voix peut modeler et moduler pour traduire les couleurs et les intentions de poèmes mis en musique et sans que la qualité de la voix ne s’altère jamais, sans que le souffle semble peiner.
Magnifique musique aussi, les Sept sonnets de Michel-Ange de Britten sont abordés avec cette variété expressive qui ne laisse jamais en repos l’émotion de l’auditeur. Helmut Deutsch est, comme l’an dernier au mémorable récital du Grand Théâtre de Bordeaux, le compagnon de route positif, coopératif et sécurisant que l’on sait.
Ajoutons encore que le comportement scénique du ténor est exemplaire de simplicité expressive. Pas un geste, pas une mimique de trop ou de pas assez, juste ce que le visage et le corps peuvent exprimer spontanément quand on vit la musique avec intensité de l’intérieur. Au mois de mars, dans la série des Grandes Voix au Théâtre des Champs-Élysées, Jonas Kaufmann nous gratifiera de l’autre aspect de son assez incroyable talent, avec les grands airs d’opéra qu’il chante du Met à la Scala, de Covent Garden à Vienne, de Berlin à Paris. On y sera !
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Palais Garnier, Paris Le 09/11/2008 GĂ©rard MANNONI |
| Récital du ténor Jonas Kaufmann accompagné au piano par Helmut Deutsch à l’Opéra de Paris. | Franz Liszt (1811-1886)
Tre sonetti di Petrarca, S. 270
Benjamin Britten (1913-1976)
Seven Sonnets of Michelangelo, op. 22
Richard Strauss (1864-1949)
Schlichte Weisen, cinq Lieder op. 21
Sehnsucht, op. 32 n° 2
Nachtgang, op. 29 n° 3
Freundliche Vision, op. 48 n° 1
Ich liebe dich, op. 37 n° 2
Quatre Lieder op. 27
Jonas Kaufmann, ténor
Helmut Deutsch, piano
Bis :
Richard Strauss (1864-1949)
Breit’ über mein Haupt, op. 19 n° 2
Wie sollten wir geheim, op. 19 n° 4
Ich trage meine Minne, op. 32 n° 1 | |
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