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CRITIQUES DE CONCERTS 21 décembre 2024

Concert de l’Orchestre Philharmonique de Radio France sous la direction de George Benjamin, avec la participation du pianiste Pierre-Laurent Aimard à la salle Pleyel, Paris.

Un compositeur aux singuliers pluriels

Plus que l'hommage aux centenaires Elliott Carter et Olivier Messiaen, c'est le compositeur-chef d'orchestre anglais George Benjamin qui éblouit une nouvelle fois à la tête du Philharmonique du Radio France en dirigeant son tout récent Concerto pour piano, avec le concours de son camarade de classe du conservatoire de Paris, le pianiste Pierre-Laurent Aimard.
 

Salle Pleyel, Paris
Le 05/12/2008
Laurent VILAREM
 



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  • 1908 semble dĂ©cidĂ©ment un bon cru pour les centenaires, puisque après l'anthropologue Claude LĂ©vi-Strauss, c'est au tour du compositeur amĂ©ricain Elliott Carter, cent ans tout rond, de se voir fĂŞtĂ© au travers d'un vaste hommage mondial auquel la France participe tout ce mois de dĂ©cembre. DonnĂ©es dans le cadre d'un concert du Festival d'Automne, Three occasions est un triptyque dont le premier volet est inhabituellement engageant.

    Mais il est révélateur que la tension dramatique soit obtenue à l'aide d'une gageure technique qui consiste à créer 150 mesures jouées à la vitesse de 150 battements par minute. C'est que Carter est une personnalité dans le langage et non dans un langage qui a de la personnalité, affirmant par ce biais, à notre époque des blogs et des auto-fictions, si l'on voulait schématiser, une acontemporanéité que d'aucuns trouveront réjouissante. Parfaite techniquement, sa musique s'écoute, à nos oreilles, comme on regarderait la carrosserie d'une voiture.

    Autre centenaire de la naissance, le compositeur nous ayant quitté en 1992, Olivier Messiaen dont Pierre-Laurent Aimard et le chef britannique George Benjamin offrent les Oiseaux exotiques pour piano et petit ensemble. La pièce date de la remise en question du langage du compositeur de la Turangalîla lors des formalistes années 1950, auxquelles Messiaen aura participé, en les esquivant à sa manière, avec ses études ornithologiques.

    D’emblée, Aimard saisit cette partition qu'il joue par cœur et réussit le prodige de créer un parfait équilibre entre beau son, virtuosité, structure, articulation, poésie, sans accentuer un aspect ou porter préjudice à un autre, qui font de lui un pianiste immensément accompli. Benjamin peine à revanche à la tête de l’orchestre à donner le tranchant nécessaire à cette volière joyeusement proliférante.

    Mais il est Ă©galement compositeur, et mĂŞme un compositeur dont Olivier Messiaen, son maĂ®tre au Conservatoire de Paris dès l'âge de 16 ans, disait : « C'est notre nouveau Mozart Â». Que ceux qui assistèrent aux reprĂ©sentations de son opĂ©ra Into the little hill, en novembre 2006, s'en souviennent avec Ă©motion, il s’agit bel et bien d’un très grand compositeur, dont la voix rĂ©sonne moins par ses recherches que par son Ă©perdue singularitĂ©.

    L’art des superpositions

    Benjamin a été, comme Messiaen ou Ravel, lui-même dès l'âge de 20 ans. Son Ringed by the flat Horizon, écrit en 1980, est somptueux. Les caractéristiques de son langage sont déjà toutes présentes : cette sonorité qui fait coexister les contraires, les apparitions solistes qui se mêlent aux tutti tonitruants, les différentes musiques qui s’empilent comme un palimpseste superpose différentes écritures, mais dans une forme cherchant encore la narration ou l'articulation entre ses différents éléments.

    Le Duet pour piano et orchestre de 2008 montre son auteur dans la plénitude de ses moyens. En un peu moins d'un quart d'heure, il réussit à nous faire perdre nombre de nos repères d'écoute tout en respirant l'évidence. La partie pour piano évoluera ainsi souvent à la manière du Concerto pour la main gauche de Ravel, à une main, mais la musique se sera métamorphosée, parfois simultanément ou à une vitesse prodigieuse, en une fanfare éclatante contenue dans une boîte à musique démantibulée, ou se sera déplacée dans un manoir hanté où des harpes et des contrebasses se balancent de façon presque jazzy. Étonnant George Benjamin !




    Salle Pleyel, Paris
    Le 05/12/2008
    Laurent VILAREM

    Concert de l’Orchestre Philharmonique de Radio France sous la direction de George Benjamin, avec la participation du pianiste Pierre-Laurent Aimard à la salle Pleyel, Paris.
    Elliott Carter (*1908)
    Three Occasions

    George Benjamin (*1960)
    Duet pour piano et orchestre

    Olivier Messiaen (1908-1992)
    Oiseaux exotiques pour piano et orchestre
    Pierre-Laurent Aimard, piano

    George Benjamin (*1960)
    Ringed by the flat horizon

    Orchestre Philharmonique de Radio France
    direction : George Benjamin

     


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