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CRITIQUES DE CONCERTS 21 décembre 2024

Nouvelle production de la Ronde de Philippe Boesmans mise en scène par Harry Kupfer et sous la direction de Winfried Maczewski à l’Opéra de Paris.

Rond comme un zéro pointé
© Franck Ferville

Le compositeur Philippe Boesmans est à la fête ce mois de février à l'Opéra de Paris. Après la création d’Yvonne, l'Amphithéâtre Bastille donne une nouvelle production de sa vibrionnante Ronde de 1993, opéra à l'érotisme trouble qui pâtit cependant d'une mise en scène lourde de Harry Kupfer et d'une troupe de chanteurs néerlandais peu inspirée.
 

Amphithéâtre de l'Opéra Bastille, Paris
Le 17/02/2009
Laurent VILAREM
 



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  • Double honneur pour Philippe Boesmans Ă  l'OpĂ©ra de Paris. Alors que les braises des reprĂ©sentations d'Yvonne viennent de s'Ă©teindre Ă  Garnier, l'Amphithéâtre Bastille propose pour trois soirs une nouvelle production de son premier succès Ă  l'OpĂ©ra, la Ronde, d'après Schnitzler. Et s'il s'agit bien d'un classique d'aujourd'hui, repris depuis sa crĂ©ation dans le monde entier, Reigen tournera encore plus facilement dĂ©sormais dans la virtuose transcription pour orchestre rĂ©duit (vingt-deux musiciens) due Ă  Fabrizio Cassol, avec l'assentiment du compositeur.

    Yvonne demandait un compositeur de la trempe de Chostakovitch ou de Schnittke, bien que Boesmans ait choisi de traiter la charge explosive de la pièce de Gombrowicz par le contre-pied. Dans la Ronde, le compositeur belge semble chanter dans son arbre généalogique. Car à maints égards, l’opéra apparaît comme le prolongement logique des opéras de Strauss et de Berg – l’un des personnages s'appelle même Lulu.

    La ronde, c'est celle de tous les âges de la vie et de toutes les classes sociales, de ce qui nous permet de nous mélanger : le sexe ! En dix scènes et dix couples, l’opéra montre et donne à entendre ce qui est alors le plus souvent en coulisses. La voix quand elle devient chant s'affirme comme l'expression du désir, et l'orchestre mime, d'un trombone en sourdine à un exubérant menuet baroque, une panne sexuelle ou l'explosion tardive d'un éjaculateur précoce.

    Diaboliquement structuré, l'opéra fait s'enchaîner les premières scènes à la manière d'un carrousel virevoltant, s'allonge comme une longue cigarette après l'amour, puis s'achève dans la mélancolie. On se réjouissait donc de revoir cet ouvrage, d'autant qu'il est joué par une troupe (l'Opera Studio Nederland) et un orchestre (De Bezetting Speelt) néerlandais, soit comme à domicile pour le compositeur qui est, rappelons-le, de langue maternelle flamande.

    Mourtant, le résultat est d'une vulgarité terrifiante. Sur la scène couverte de draps rouges à la manière d'un club échangiste s'affronte une troupe de chanteurs en caleçons et nuisettes, qui de gestes brusques en précipitations font a contrario triompher la subtilité et la poésie sous-exploitée de la musique. Non que prude, on soit choqué par les corps déshabillés, mais le sexe y apparaît trivialement sportif, et il faut reconnaître que les chanteurs, s'ils sont incapables de jouer avec leurs corps, ont également des voix bien vertes.

    Une mauvaise idée : les chanteurs qui s'occupent des changements de plateau entre les scènes, avec la brutalité et la maladresse d’une répétition générale. Une bonne : la modernisation des échanges amoureux entre les personnages avec téléphones et ordinateurs portables.

    Tentative de grotesque

    La mise en scène est pourtant signée du grand Harry Kupfer, qui essaie d'injecter du grotesque. Mais le grotesque, particulièrement dans un tel contexte d'intimité, ne nécessite-t-il pas une grande précision ou de grands interprètes ? Imaginez donc des œillades insistantes sur un décolleté protubérant, ou quelqu'un qui vous raconte une histoire salace en se tenant les hanches, espérant de vous un rire gras !

    On frôle l'atterrement quand la troupe entière entame une danse baroque avec la vitalité d'un éléphant heureux et si l'Opera Nederland – qui est un peu l'équivalent de notre Atelier Lyrique de l'Opéra de Paris – permet aux futures étoiles du chant batave de s'aguerrir aux planches, avouons que ce spectacle ne donne guère envie de se balader du côté des opéras de province du plat pays.

    Les femmes – notamment Cristina Dietzsch et Karin Stobbes – s'en tirent mieux, mais plus la complexité de la pièce de Schnitzler s'affirme, moins les chanteurs sont incapables d'incarner une profondeur, sans tomber dans la caricature. Et l'on finit par s'ennuyer ferme à ces scènes qui s'enchaînent mécaniquement. L'orchestre De Bezetting Speelt dirigé avec nervosité par Winfried Maczewski est en revanche parfait.

    Néanmoins, on réalise que, malgré ses longueurs, la Ronde vient de résister à sa première mauvaise mise en scène. C'était son heure de vérité. Par la richesse de son livret capable d'exciter l'imaginaire de nombreux metteurs en scène, et l'imagination musicale avec laquelle Boesmans le traite, il entre durablement au répertoire. C'est la très bonne nouvelle de ce (piètre) spectacle.




    Amphithéâtre de l'Opéra Bastille, Paris
    Le 17/02/2009
    Laurent VILAREM

    Nouvelle production de la Ronde de Philippe Boesmans mise en scène par Harry Kupfer et sous la direction de Winfried Maczewski à l’Opéra de Paris.
    Philippe Boesmans (*1936)
    Reigen, opéra en dix scènes
    Livret de Luc Bondy d'après la pièce homonyme d'Arthur Schnitzler
    Adaptation pour un ensemble de 22 instruments par Fabrizio Cassol

    Chanteurs de l'Opera Studio Nederland
    Orchestre De Bezetting Speelt
    direction : Winfried Maczewski
    mise en scène: Harry Kupfer
    décors: Niels Mathot
    costumes: Yan Tax & Lisa Spooren
    Ă©clairages : Trui Malten

    Avec:
    Cristina Dietzsch (la prostituée), Charles Hens (le soldat), Barbara Kozelj (la femme de chambre), Fabio Trumpy (le jeune homme), Marije van Stralen (la jeune mariée), Pierre Mak (le mari), Karin Strobos (la grisette), Pascal Pittie (le poète), Daphne Ramakers (la cantatrice), Roger Smeets (le comte).

     


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