|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
|
Récital du violoniste Sergey Khachatryan, accompagné au piano par sa sœur Lusine dans la série des Grands Solistes au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Cordes sensibles
Aussi musiciens l’un que l’autre, le jeune violoniste arménien Sergey Khachatryan et sa sœur Lusine, pianiste, ont donné un concert de haut niveau, preuve d’une grande sensibilité musicale et d’un bel art instrumental, sans pour autant convaincre dans toutes leurs options. Beaucoup de talent, un peu moins de maturité, sans doute.
|
|
Bons baisers d’Eltsine
RĂ©gal ramiste
L'Étrange Noël de Mrs Cendrillon
[ Tous les concerts ]
|
Du talent, Sergey Khachatryan en a beaucoup, comme il l’a montré récemment sur cette même scène en jouant le concerto pour violon de son quasi homonyme Khatchaturian. À 24 ans, il est déjà au cœur d’une grande carrière internationale tout à fait justifiée. Ce n’est pas pour autant que l’on doive occulter les quelques réserves que suscitent le récital qu’il donne ce soir avec sa sœur Lusine au piano.
Commencer par le 2e Partita en ré mineur de Bach pourrait passer pour de la provocation si dès les premières minutes, il n’était aussi évident que ce n’est pas vers une affirmation de virtuosité que s’oriente l’interprétation de Khachatryan. Le propos s’affirme tout de suite dans la logique d’une approche préromantique assumée avec une sensibilité à fleur de peau, un contrôle permanent du son, un choix de tempi et de nuances mettant beaucoup plus en valeur l’émotion de la phrase musicale que les rigueurs de sa structure.
Une sorte de Bach rêvé, même dans l’hyper célèbre Chaconne finale, que l’on a rarement entendue abordée avec autant de finesse, un son aussi flexible et maîtrisé. On pourra reprocher à Khachatryan une trop grande tendance à l’alanguissement, au ralenti, à une certaine volupté dans l’étirement de la phrase musicale des mouvement lents, notamment dans la sonate de Brahms qui suit et dans celle de Beethoven de la deuxième partie du concert.
Avec Bach, cela relève nettement d’une volonté de rapprocher la sensibilité du compositeur des premiers émois du romantisme, choix qui procure de très beaux moments d’émotion et une impression d’ensemble assez bouleversante.
Avec la 1re sonate pour piano et violon op. 78 de Brahms, tout en retrouvant les multiples qualités de tenue d’archet, de finesse et de musicalité d’une technique jamais forcée ni brutale, on peut effectivement préférer plus d’affirmation dans la mise en valeur des formes elles-mêmes, en particulier dans l’Adagio, qui, comme celui de la Sonate à Kreutzer de Beethoven un peu plus tard, finit par sembler interminable tant le violon s’attarde dans des ralentis certes bien dessinés et très musicaux, mais pas toujours indispensables.
À trop rêver, on finit par ne plus savoir où l’on en est. D’autant que le piano incomplètement ouvert, car Sergey n’a pas ce que l’on appelle un grand son, s’avère assez mat et sans beaucoup de présence sous les doigts de la grande sœur Lusine, pourtant elle aussi fort belle musicienne. Et c’est encore plus vrai du deuxième mouvement de la sonate de Beethoven, déjà fort long par lui-même avec ses variations et ses reprises et qui dure vraiment ici une éternité.
Mais trêve de critiques, car les deux jeunes artistes, une fois encore, ont un potentiel étonnant déjà en grande partie concrétisé, une sensibilité exceptionnelle qui leur permet d’apporter ce supplément d’âme, de poésie, qu’aucun travail ne peut vous faire acquérir. Le son de Sergey est toujours beau et tout a chez lui une dimension intérieure, quasi spirituelle qui relève aussi de l’instinct et sera une richesse des plus précieuses dans la carrière si brillante mais personnelle qu’il continuera à mener.
| | |
|
Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 03/04/2009 Gérard MANNONI |
| Récital du violoniste Sergey Khachatryan, accompagné au piano par sa sœur Lusine dans la série des Grands Solistes au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Johann Sebastian Bach (1685-1750)
Partita pour violon seul n° 2 en ré mineur BWV 1004
Johannes Brahms (1833-1897)
Sonate pour violon et piano n° 1 en sol majeur op. 78
Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Sonate pour violon et piano n° 9 en la majeur op. 47, « à Kreutzer »
Sergey Khachatryan, violon
Lusine Khachatryan, piano | |
| |
| | |
|