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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert des Wiener Philharmoniker sous la direction de Riccardo Muti au festival de Salzbourg 2009.
Salzbourg 2009 (1) :
Les surprises du roi Muti
Curieuse association pour ce troisième programme symphonique salzbourgeois des Wiener Philharmoniker, où après l’excellente surprise d’une Arcana furieuse et bruitiste, Riccardo Muti use de tout son métier pour favoriser l’audition d’une Faust-Symphonie de Liszt demeurant, même à ce niveau de qualité, un ouvrage bavard.
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Revenu en grâce après les froissements de l’ère Mortier, en passe d’être considéré comme un nouveau Karajan, Riccardo Muti fait exactement ce dont il a envie à Salzbourg comme ailleurs. Lui prend-il l’envie de diriger un Otello sans voix ? Vœu exaucé. A-t-il la lubie de gaver le Palais Garnier du massacre musicologique de Demofoonte de Jommelli ? Qu’à cela ne tienne. On ne s’étonnera donc pas de le voir pareillement imposer Moïse et Pharaon de Rossini en tête d’affiche de Salzbourg 2009, signe que tout est permis au roi Muti.
Concession à une série Kontinent Varèse par ailleurs fort bien conçue, sa programmation inattendue d’Arcana précédant la Faust-Symphonie de Liszt, qui plus est à la tête du Philharmonique de Vienne, aurait pu virer au gag. Que nenni, c’est même tout le contraire qui se produit. On en est le premier étonné, et si bien entendu ce Varèse-là n’a pas le dixième du pouvoir analytique et structurel d’un Boulez, d’un Chailly, du moins rend-il parfaitement justice à sa manière au chaos urbain suggéré par le compositeur.
Le chef italien soigne ici le geste, d’une limpidité métrique absolue, sans se permettre le moindre écart, et si sa battue fait preuve d’une certaine raideur pour ne pas se laisser dépasser par un langage aux antipodes du lyrisme face à des Wiener Philharmoniker improbables dans ce répertoire – et qui peinent effectivement quelques secondes à synchroniser leurs attaques –, le résultat est d’un impact sonore fracassant qui dit bien la cruauté déshumanisée du monde industriel.
On n’est sans doute pas près de réentendre les Viennois se livrer à une telle sauvagerie – cuivres cinglants, percussions déchaînées, piccolo et violons crucifiants – et l’on doit bien reconnaître à l’orchestre de s’être parfaitement approprié l’œuvre et à Muti d’avoir réussi un pari qui était tout sauf gagné d’avance. Dont acte.
Changement radical de ton pour les « terrestres longueurs » de la Faust-Symphonie, que le grand Riccardo soigne de tout son amour, de son sens de la phrase, de l’arche comme de l’individualisation des motifs, à la tête de sonorités de rêve – le hautbois si évocateur, des violoncelles d’une sveltesse admirable.
Il n’empêchera pas le mouvement initial – Faust –, de paraître interminable, ni le suivant – Gretchen – de donner la nausée à force de gruppetti redondants, mais il mène cette grande et pénible fresque jusqu’au bout de Méphisto, le mouvement le plus stimulant, avec une malice berliozienne et une ampleur terminale dans l’épisode vocal qui sont d’un grand maestro – même s’il est préférable de ne pas penser à Mahler et à sa mise en musique du même texte.
Michael Schade, irradiant tel un évangéliste de passion, et des chœurs masculins à tomber à la renverse rachètent un peu l’ennui des pages désespérément bavardes entendues jusque-là . Et dire qu’on s’attendait à rire à Varèse, alors que c’est Liszt qui nous aura fait pleurer !
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GroĂźes Festspielhaus, Salzburg Le 13/08/2009 Yannick MILLON |
| Concert des Wiener Philharmoniker sous la direction de Riccardo Muti au festival de Salzbourg 2009. | Edgard Varèse (1885-1965)
Arcana (1927)
Franz Liszt (1811-1886)
Eine Faust-Symphonie in drei Charakterbildern, S 108 (1857)
Michael Schade, ténor
Konzertvereinigung Wiener Staatsopernchor
préparation : Thomas Lang
Wiener Philharmoniker
direction : Riccardo Muti | |
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