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CRITIQUES DE CONCERTS 21 décembre 2024

Concert des Berliner Philharmoniker sous la direction de Christian Thielemann Ă  la Philharmonie de Berlin.

Le monde à l’envers

Christian Thielemann, le fils perdu de la vie musicale berlinoise, est toujours attendu avec beaucoup d’impatience lors de ses trop rares prestations dans sa ville natale. En cette période de l’avent, sa vision des pièces pour chœur de Brahms s’avère étrangement faible, alors que son Pelléas et Mélisande de Schönberg devient un événement majeur.
 

Philharmonie, Berlin
Le 10/12/2009
Hermann GRAMPP
 



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  • Au dĂ©but du mois, un cri de protestation a traversĂ© Berlin et toute l’Allemagne musicale lorsqu’une une indiscrĂ©tion rĂ©vĂ©lait que les deux anciens orchestres de la radio de Berlin-ouest (Deutsches Symphonie Orchester Berlin, ex-RIAS-Symphonie-Orchester de l’après-guerre) et Berlin-est (Rundfunk-Sinfonieorchester Berlin) allaient devoir fusionner faute de moyens financiers. MĂŞme si le projet a très vite avortĂ© suite Ă  l’indignation du tout Berlin culturel, l’affaire illustre l’étendue de la faiblesse des subventions dans la capitale allemande.

    L’héritage riche autant que lourd de deux villes regroupées en une en 1990 a constamment été un objet de discussion, autour du financement des trois opéras et huit orchestres de Berlin. Car voilà une densité musicale énorme dans une commune endettée qui doit assumer presque seule la totalité de ses institutions, conséquence du fédéralisme qui décharge l’état du financement culturel. La seule formation berlinoise qui surnage au-dessus de la mêlée est le Berliner Philharmoniker, qui demeure intouchable.

    Une fois par an, le fils perdu Christian Thielemann revient dans sa ville natale qu’il a quittée en 2004 pour Munich pour présenter la plupart du temps un concert d’exception. On se souvient notamment d’une 8e symphonie de Bruckner en décembre 2008 qui figure parmi les plus grands moments que la salle mythique de la Philharmonie a connus de ces deux dernières décennies.

    Cette année, Thielemann a choisi un programme Brahms-Schönberg assez inattendu pour qui connaît la préférence du maestro pour le seul grand répertoire romantique. Pourtant, il n’y a pas seulement un goût particulier de Thielemann pour le Pelléas de Schönberg, qu’il avait déjà dirigé à Berlin il y a dix ans, mais aussi un lien direct entre les deux compositeurs, par le biais de l’article important que Schönberg a consacré à Brahms le progressiste.

    Dans cet article, l’auteur de la Nuit transfigurée, qui dans les années 1890 passait de l’influence brahmsienne à l’influence wagnérienne, redécouvrait Brahms comme prédécesseur de sa propre esthétique et établissait un lien de Beethoven à lui-même via le maître de Hambourg. Indépendamment de cette observation, Pelléas et Mélisande, achevé en 1902, a été écrit par Schönberg dans une phase fortement wagnérienne da sa formation musicale.

    On pouvait toutefois s’attendre que Thielemann, ayant laissé le souvenir d’un saisissant Requiem allemand pour les victimes du bombardement de Dresde ou d’une magnifique 1re symphonie à Munich, soit nettement plus dans son jardin dans l’univers de Brahms. C’est pourtant tout le contraire qui se produit : les trois sombres pièces pour chœur et orchestre Nänie, le Chant des Parques et le Chant du destin, avec leur esthétique solennelle, ne trouvent à aucun moment un réel accomplissement sous une baguette ne rendant guère justice à l’ampleur de la fatalité des textes de Schiller, Goethe, et Hölderlin.

    Certes, demeurent une fabuleuse sonorité sombre, inexistante avec Rattle et tout de suite de retour dès que Thielemann revient au pupitre, des bois magnifiques et la pulsation magique assurée par le timbalier Wieland Welzel, qui sont en soi impressionnants. Mais manque en permanence le climat fatidique de la relation entre humains et dieux décrite par les textes.

    Voilà une interprétation correcte, parfois un peu molle et d’une justesse pas perfectible, qui ne dépasse pas le stade de l’ordinaire. Le fait que l’on ne comprenne presque pas un mot des chœurs – qui ont pourtant une belle clarté et une sonorité très enviable – n’arrange pas vraiment la situation non plus.

    Mais soudain, après la pause, dès les premières mesures du Pelléas et Mélisande de Schönberg, on retrouve Thielemann chez lui. Le langage post-wagnérien et son immense orchestre comptant pas moins de dix-huit cuivres sont le domaine de prédilection de ce chef spécialisé dans le XIXe siècle tardif. Dans ce long poème symphonique, il développe magnifiquement les leitmotivs, crée des tensions inouïes menant à de saisissants climax, fait chanter les violoncelles comme des voix, transforme le pupitre des bois en lamentations célestes et termine dans une noirceur absolue qui donne littéralement la chair de poule.

    Avec Thielemann, on entend surtout Wagner et Mahler dans cette partition de jeunesse, et notamment comme des échos du premier acte de la Walkyrie. Cette lecture passionnante est portée des vents brillantissimes, qui achèvent de donner à cette interprétation un rang d’incontournable, au niveau des plus grandes soirées de la Philharmonie de ces dernières années.




    Philharmonie, Berlin
    Le 10/12/2009
    Hermann GRAMPP

    Concert des Berliner Philharmoniker sous la direction de Christian Thielemann Ă  la Philharmonie de Berlin.
    Johannes Brahms (1883-1897)
    Nänie op. 82
    Gesang der Parzen op. 89
    Schicksalslied op. 54
    Rundfunkchor Berlin
    préparation des chœurs : Robin Gritton
    Arnold Schönberg (1874-1951)
    Pelleas und Melisande op. 5
    Berliner Philharmoniker
    direction : Christian Thielemann

     


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