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CRITIQUES DE CONCERTS 21 décembre 2024

Nouvelle production de A Little Night Music de Stephen Sondheim mise en scène par Lee Blakeley et sous la direction de Jonathan Stockhammer au Théâtre du Châtelet, Paris.

Grande musique en plein jour
© Marie-Noëlle Robert

Dans la lignée de The Sound of Music, et avant Magdalena et Les Misérables, le Châtelet propose un chef-d’œuvre du genre à la croisée d’un sujet de Bergman, d’un titre de Mozart et d’une atmosphère à la Tchekhov. Quelle joie d’assister, enfin, à une vraie comédie musicale américaine dont la musique est à la hauteur de Gershwin et de Bernstein !
 

Théatre du Châtelet, Paris
Le 15/02/2010
Nicole DUAULT
 



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  • Jean-Luc Choplin, directeur du Châtelet, réussit depuis trois ans un parcours hors normes. Il a véritablement inventé un style et donné des lettres de noblesse à un genre qui n’avait jamais eu pignon sur rue, la comédie musicale. Sur la scène du Châtelet il donne à ses productions un lustre et un luxe à faire rêver Broadway. Pour cette Little Night Music jouée à Broadway par une dizaine de musiciens, il en a mis une cinquantaine dans la fosse du Châtelet, issus de l’Orchestre Philharmonique de Radio France.

    Le plus remarquable dans cette comédie, c’est probablement la musique de Stephen Sondheim, parolier et compositeur, qui travailla naguère avec Leonard Bernstein sur les dialogues de West Side Story. Il a acquis l’intelligence et la maîtrise de son mentor tout en assimilant les apports de la musique du XXe siècle. Son Dieu est Ravel ; on le sent à chaque phrase. Il porte un intérêt tout aussi pertinent à Janaček et à la musique répétitive américaine. Le résultat est un melting pot d’adaptations, de compilations et d’influences sans concession aux refrains actuels.

    La chanson Liaisons qu’interprète avec difficulté l’actrice-danseuse-chanteuse Leslie Caron nous touche un peu moins que ce Send in the clowns, mélodie fétiche qui fit fureur avec Sinatra. La voici chantée avec émotion par Lambert Wilson, baryton, qui a longtemps tâté du classique, de la comédie, de la tragédie et de la mise en scène. Il prépare La Fausse Suivante de Marivaux aux Bouffes du Nord avec Carole Bouquet, mais revient volontiers à ses premières amours, comme ici le chant. On sent que la comédie musicale est dans ses veines, même s’il n’impose pas sa carrure de vedette à ses partenaires. L’un des plus remarquables est le baryton-basse Nicholas Garrett – qui n’est pas un inconnu pour le public parisien puisqu’il participa à la Bastille à Don Carlo et au Barbier de Séville.

    Tous les regards des spectateurs vont évidemment vers Leslie Caron, figure de légende, qui fut l’une des belles danseuses de la compagnie de Roland Petit avant de s’immerger dans l’Amérique de l’Entertainment. Aux côtés de Gene Kelly et de Fred Astaire, elle conquit l’Amérique, avant de participer au film mythique Gigi de Minnelli avec Maurice Chevallier. Minuscule, envahissant la scène, blottie dans des robes chatoyantes, elle chante de sa voix hors d’âge Liaisons, poignante méditation sur des amours sans normes.

    La mise en scène, les décors et les costumes somptueux sont dus à l’Anglais Lee Blakeley, habitué de l’Opéra de Lille. Ils respirent la nostalgie, la mélancolie d’une époque proustienne. Quoi de surprenant puisque le véritable créateur de ce divertissement est le cinéaste Ingmar Bergman qui en fit l’inoubliable Sourires d‘une nuit d’été. À la froide lumière scandinave, Sondheim apporte le chatoiement, l’amusement et le divertissement sans jamais oublier la gravité de l’amour qui s’envole.

    On s’étonne que cette production si réussie ne soit programmée que pour six représentations ; elle aurait sans doute pu connaître le succès auprès d’un plus vaste public. Cette comédie musicale est montée avec un luxe sans pareil grâce à des subventions de la ville de Paris. Mais ne pourrait-on pas imaginer qu’ensuite, elle se transplante comme à Brodway dans un théâtre privé ? Quant à Jean-Luc Choplin, pourquoi n’inventerait-il pas après tout un festival de reprises de ses succès ?




    Théatre du Châtelet, Paris
    Le 15/02/2010
    Nicole DUAULT

    Nouvelle production de A Little Night Music de Stephen Sondheim mise en scène par Lee Blakeley et sous la direction de Jonathan Stockhammer au Théâtre du Châtelet, Paris.
    Stephen Sondheim (*1930)
    A Little Night Music, comédie musicale (1973)
    Livret de Hugh Wheeler d’après le film Sourires d’une nuit d’été d’Ingmar Bergman, lyrics du compositeur

    Orchestre Philharmonique de Radio France
    direction : Jonathan Stockhammer
    mise en scène : Lee Blakeley
    chorégraphie : Andrew George
    décors : Rae Smith
    costumes : Jo Van Schuppen
    lumières : Jenny Kane

    Avec :
    David Curry (Henrik Egerman), Rebecca Bottone (Anne Egerman), Lambert Wilson (Fredrik Egerman), Francesca Jackson (Petra), Greta Scacchi (Désirée), Nicholas Garrett (Comte Carl-Magnus Malcom), Deanne Meek (Comtesse Charlotte Malcom), Celeste de Veazey (Fredrika Armfeldt), Leslie Caron (Madame Armfeldt), Damian Thantrey Mr Lindquist), Kate Valentine (Ms Nordstrom), Rachael Lloyd (Mrs. Anderssen), James Edwards (Mr Erlanson), Daphné Touchais (Ms Segstrom), Leon Lopez (Frid).

     


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